A lire le communiqué du Conseil des ministres sur l'avant-projet de loi sur les associations apolitiques, dans le cadre des réformes engagées par le pouvoir, on constate non seulement un recul par rapport à la loi 90/31 du 4 décembre 1990, pis encore, une arnaque. L'avant-projet de loi fait cas «d'obligation faite à l'administration de se prononcer dans un délai de trois mois sur la demande d'agrément d'une association, le silence valant agrément automatique et tout refus d'agrément ouvrant droit au recours devant la juridiction administrative». Or, la loi en vigueur édicte dans son article 7 : «L'association est régulièrement constituée, passé le délai de soixante (60) jours après le dépôt du dossier. L'article 8, de la même loi, permet à l'autorité compétente de saisir, si elle estime que l'association est contraire aux dispositions de ladite loi, huit jours avant la fin du délai, la Chambre administrative de la cour territorialement compétente…» Ce n'est même pas un quiproquo. D'une administration qui introduit le recours auprès de la Chambre administrative, on inverse les rôles, on tolère aux associations le droit au recours… ! Les nouvelles dispositions en la matière annoncent que toute association agréée ouvre droit à des subventions. Elles n'apportent rien de nouveau dans la mouture proposée aux débats à l'APN. Mieux, ce problème de subventions existe plus pour aliéner les associations à l'administration, aux partis de l'exécutif que d'aider ces structures civiques et civiles à fonctionner, à assumer les objectifs qu'elles se sont assignés. De plus, les articles 4 et 5 de la loi en vigueur expriment, on ne peut mieux, ce qu'on peut attendre de membres d'une association sans recourir et/ou user d'atteinte à la personne comme annoncé dans le communiqué du Conseil des ministres : «Les associations seront tenues de satisfaire à un certain nombre d'obligations universelles, notamment la probité de leurs dirigeants, ainsi que la transparence dans leur gestion, particulièrement financière, le respect de leurs statuts, y compris en ce qui concerne leur propre domaine d'activité, le respect de la Constitution et de la législation en vigueur, ainsi que de l'ordre public». La loi en vigueur, déjà rébarbative et n'incitant guère le citoyen à participer à la vie de la cité, contraint les associations par son arsenal de dispositions à rendre compte périodiquement aux structures administratives concernées, la wilaya ou le ministre de l'Intérieur sans porter de jugements sur ses membres si ce n'est jouir de ses droits civils et civiques, tout en étant de nationalité algérienne. Des associations, connues pour être des bides des pouvoirs successifs en place, crient à l'aliénation des associations. C'est l'hôpital qui se moque de la charité ! La pratique de la vie associative nous a mis en face de situations qu'on peut qualifier de subversives. Des personnes en situation d'imposture, de faux et usages de faux, épaulées par des membres de l'exécutif festoient dans la capitale au nom d'une association. Ces personnes vont jusqu'à signer un contrat avec une entreprise internationale dans un hôtel de renom en présence de représentants de l'administration au nom de l'association et avec un faux cachet. Bizarrement, nos plaintes disparaissent ! Dans ce même désordre administratif, nous avons eu à nous élever contre un président d'association, fraîchement reconnu par l'administration, alors qu'il venait de sortir de prison pour soutien au terrorisme, pour ses atteintes à ses élèves… On pourrait citer ce directeur de CEM qui, pour défendre son collègue et ami, accusé d'atteinte aux mœurs par ses élèves, n'a rien trouvé de mieux à faire que de traduire cinq adolescentes et un gosse devant le juge d'instruction d'El Harrach.
Un directeur qui fut bien évidemment promu à un autre poste… La loi 90/31 du 4 décembre 1990, énoncée dans le cadre des réformes politiques d'octobre 1988, en remplacement de la loi 87-15 du 21 juillet1987, a été pervertie notamment cette dernière décennie. Elle n'a pas été respectée mais instrumentalisée par l'administration au profit du pouvoir. Le statut type imposé aux associations dans la wilaya d'Alger est une remise en cause pour ne pas dire une violation de la loi 90/31 qui érige, par son article 22, l'assemblée générale comme seul organe souverain alors que son article 15 interdit à toute autre personne morale ou physique de s'ingérer dans le fonctionnement d'une association. Non contente de ces dépassements illégaux, l'administration a, en décentralisant la gestion des associations locales sur les circonscriptions administratives, recouru à d'autres mesures draconiennes pour dissuader tout élan de civisme. Les entraves et les lourdeurs bureaucratiques, dignes des services d'inquisition sont le lot inévitable aux personnes qui voudraient créer ou activer dans une association.
Salah Amer-Yahia : Président-fondateur de l'Union des parents d'élèves de la wilaya d'Alger