Après la visite, la semaine dernière, du chef de l'OTAN, c'était au tour hier du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, de se rendre pour la première fois à Tripoli afin de «s'entretenir avec les dirigeants du Conseil national de transition (CNT)». Objectif du voyage : s'enquérir des moyens par lesquels l'ONU pourrait aider les nouvelles autorités libyennes. Cependant, rien n'a filtré, hier, sur le contenu de ces discussions qui n'auront duré que quelques heures. Le SG de l'ONU n'avait pas effectué de visite en Libye durant les huit mois de conflit armé qui ont abouti au renversement du régime du colonel Mouammar El Gueddafi, tué le 20 octobre à Syrte par des combattants du CNT. M. Ban s'est rendu en suite au sommet du G20 à Cannes (France) où le dossier libyen sera à l'ordre du jour. A rappeler que M. Rasmussen, le secrétaire général de l'OTAN, avait déclaré, lors de sa visite en Libye, qu'«il revient désormais aux Nations unies d'être en première ligne dans l'assistance internationale aux nouvelles autorités libyennes». Une chose est sûre : la mission ne sera pas de tout repos pour la communauté internationale, eu égard au chaos qui règne actuellement dans ce pays. En septembre, le conseiller du secrétaire général de l'ONU, Ian Martin, en visite à Tripoli, avait estimé que l'un des enjeux-clés pour le nouveau pouvoir serait d'établir des forces de police et un système judiciaire garantissant l'ordre et la sécurité tout en respectant les droits de l'homme. Celui-ci avait également tiré la sonnette d'alarme sur les dangers que fait peser sur la région la prolifération des armes provenant de l'important arsenal libyen. La torture se banalise dans les prisons de Tripoli La situation des droits de l'homme dans le pays est également très préoccupante. Après les cris d'alarme des ONG Amnesty International et Human Rights Watch (HRW), c'était au tour, hier, de la France de se montrer inquiète après y avoir dépêché son ambassadeur, François Zimeray, qui a constaté diverses violations. M. Zimeray, ambassadeur chargé des droits de l'homme, s'est rendu dans deux centres de détention et dans deux camps de réfugiés et déplacés, à Tripoli, où il a séjourné du 24 au 27 octobre. L'ambassadeur a constaté des cas de détention arbitraire dans les prisons et identifié des traces de tortures, notamment de chocs électriques, sur le corps de plusieurs détenus. Des mineurs – ils seraient une centaine au total – étaient également incarcérés dans les mêmes conditions que les adultes. Une quarantaine de centres de détention ont été répertoriés dont certains, non officiels, n'ont jamais été inspectés par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). 2500 personnes auraient été arrêtées depuis septembre, après la prise de Tripoli par les rebelles et la fuite de Mouammar El Gueddafi, ont affirmé des sources diplomatiques à la presse occidentale. La situation des réfugiés et des déplacés dans les camps n'est, dit-on, pas conforme au droit international. Le sort des Africains subsahariens est particulièrement préoccupant, en particulier celui des Somaliens qui vivent dans les pires conditions. El Kib rassure les russes Depuis la chute fin août aux mains des forces du CNT de la capitale Tripoli, plusieurs responsables et dirigeants étrangers, notamment occidentaux, se sont succédé en Libye. Le président français, Nicolas Sarkozy, et le Premier ministre britannique, David Cameron, dont les pays ont été les fers de lance de l'intervention militaire en Libye, sont allés à Tripoli le 15 septembre. Ils ont été suivis par la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, le 18 octobre, deux jours avant la mort d'El Gueddafi. A signaler que le ministre iranien des Affaires étrangères, Ali Akbar Salehi, s'y rendra également. Le chef de la diplomatie iranienne avait été invité en août à se rendre en Libye par le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, lui-même invité à se rendre à Téhéran. Il est à rappeler que l'Iran a observé une position ambiguë durant la révolte de la population libyenne contre le régime d'El Gueddafi, affirmant soutenir la rébellion mais dénonçant avec virulence l'aide militaire de l'OTAN qui a permis aux insurgés de l'emporter. La visite de M. Ban survient au surlendemain de l'élection par le CNT, Abdelrahim El Kib, au poste de Premier ministre. Celui-ci a été chargé de former un gouvernement intérimaire d'ici le 23 novembre avec la lourde tâche de désarmer le pays et de remettre l'économie sur pied. Ce gouvernement aura principalement pour mission de préparer des élections constituantes dans un délai de huit mois maximum, suivies d'élections générales un an après au plus tard. Mais dans l'immédiat, M. Al-Kib a surtout entrepris de rassurer les partenaires traditionnels de la Libye, comme la Russie ou la Chine, sur le fait que les contrats signés avec le régime d'El Gueddafi seront respectés. «Nous allons respecter les contrats signés avec la Russie ainsi qu'avec les autres pays mais à condition que ces accords soient légaux et légitimes», a-t-il indiqué, selon une déclaration rapportée par la presse russe. Selon cette source, M. El Kib s'est interrogé sur le refus de la Russie de signer la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU n° 1973 ayant autorisé l'intervention étrangère en Libye.