Les travaux de la première réunion du groupe Sahel, dépendant du Forum global de la lutte contre le terrorisme (FGCT), se sont ouverts, hier à Alger, en présence d'experts de 29 pays, de l'Union européenne, de l'ONU et de nombreux organismes internationaux. Coprésidée par l'Algérie et le Canada, cette rencontre vise le renforcement des capacités civiles de lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel à travers une meilleure coordination et une coopération dans les cinq thèmes domaines retenus par la plateforme du forum institué à l'initiative des Etats-Unis d'Amérique, le 21 septembre dernier, à New York. Il s'agit de la sécurité transfrontalière, de la coopération policière, de la lutte contre le financement du terrorisme, du renforcement de la coopération juridique et judiciaire, et enfin des engagements communautaires. Durant les six séances de travail, réparties à travers les deux journées, les experts de chaque pays et de chaque organisation s'exprimeront, loin de la presse, sur les menaces auxquelles leurs Etats sont confrontés, ainsi que sur les solutions possibles pour y faire face. Le représentant de l'Algérie, M. Sbaâ, a estimé que cette rencontre constitue un complément utile aux efforts de la communauté internationale dans la lutte contre le terrorisme et un appui à la mise en œuvre de la stratégie mondiale des Nations unies dans le domaine. Il a, de ce fait, rappelé «les connexions avérées avec le crime transnational organisé qui servent, outre le paiement de rançons contre la libération des otages, de source de financement des groupes terroristes dans notre région», sans pour autant omettre de signaler «la pauvreté qui, au-delà de sa négation des droits humains élémentaires, constitue une menace pour la cohésion des populations». En clair, l'atelier du groupe Sahel permet en réalité aux experts des Etats membres du Forum de profiter de cette tribune informelle pour échanger leurs informations sans pour autant se heurter aux divergences politiques des uns et des autres sur des sujets qui peuvent faire obstacle à la riposte contre le terrorisme. Ce fléau devient de plus en plus inquiétant vu son expansion et le renforcement de ses capacités de nuisance grâce à la crise libyenne. A ce titre, l'ambassadeur américain, Daniel Benjamin, coordinateur de la lutte contre le terrorisme au département d'Etat et coprésident (avec la Turquie) du FGCT, n'a pas manqué, dans son allocution d'ouverture, de noter que «la menace terroriste est devenue plus complexe avec certains changements survenus dans la région, en particulier la Libye. Une des conséquences de cette situation est la nécessité de bâtir des partenariats, une coopération et des capacités pour faire face à ces chalenges devenus plus urgents que jamais». L'ambassadeur reconnaît être conscient qu'au sein des réunions du forum, «nous ne serons pas toujours d'accord sur chaque question». Cependant, a-t-il noté, «ceux qui y assistent conviennent qu'il y a des besoins et des défis urgents et que chaque pays et chaque organisation présents à cet atelier possède l'expertise unique et pourrait donc apporter sa contribution. Nous savons que ce qui peut être adapté à un pays peut ne pas l'être pour un autre, mais nous pouvons apprendre beaucoup des uns et des autres pour faire face à la menace terroriste». Le coordinateur américain a qualifié le forum de «plateforme informelle de lutte contre le terrorisme multilatéral concentrée sur l'identification des besoins civils en termes de lutte, la mobilisation de l'expertise et de la ressource nécessaires pour faire face à ce genre de besoin et le développement de la coopération globale». En un mot, a-t-il précisé, «le Forum va adopter une approche plus stratégique en ce qui concerne les efforts des civils en matière de lutte antiterroriste et aider à augmenter le nombre de pays capables aussi bien sur le plan technique que pour ce qui est des capacités et la détermination pour faire face au challenge terroriste». 100 millions de dollars pour les pays en transition sortant d'un état d'urgence Daniel Benjamin a rappelé le lancement d'un programme majeur sur le renforcement des capacités de l'Etat de droit d'un montant de 100 millions de dollars concentrés sur les pays en transition et sortant d'un état d'urgence, mais aussi l'annonce faite par les Emirats arabes unis, de la création d'un Centre international d'excellence pour contrer l'extrémisme violent, «le premier centre multilatéral de formation, de dialogue et de recherche». Il a ajouté que son pays a accueilli la première réunion du groupe justice et Etat de droit, il y a deux semaines, des procureurs spécialisés dans lutte contre le terrorisme des 30 Etats membres du Forum «en vue de développer les meilleures pratiques contre le terrorisme dans le système judiciaire criminel». Il a insisté sur «la participation complète des gouvernements locaux-clés ainsi que des instances et organismes régionaux et sous-régionaux afin de créer un sentiment de propriété et de légitimité dans la région et assurer de ce fait le succès des groupes». Pour ce qui est du groupe Sahel, il espère avoir une vision plus claire sur les challenges de renforcement des capacités et des priorités dans la région à travers les interventions des experts. «Nous pensons que ce groupe peut jouer un rôle catalyseur par rapport au nombre croissant des activités relatives à la lutte contre le terrorisme dans la région (…) il va aider à apporter une meilleure cohérence et maximiser l'impact des efforts.» Lui emboîtant le pas, Mme Sabine Nolke, directrice générale du bureau principal du programme de sécurité internationale, au ministère des Affaires étrangères canadien et coprésidente du groupe Sahel, s'est d'abord inclinée à la mémoire des victimes des attentats terroristes survenus au Nigeria le 4 novembre et la semaine écoulée et qui, selon elle, rappellent aux experts leur participation à l'atelier. Elle a avoué être consciente que le fait de reconnaître un problème et d'avoir la volonté de le confronter ne suffit pas pour lutter contre. «Les Etats de la région, a-t-elle souligné, «font face à de nombreux défis et vos ressources sont sujettes à diverses pressions qui se font concurrence. Nous sommes venus ici avec l'idée que vous pourriez bénéficier de l'expertise et du renforcement des capacités des Etats membres du Forum. Ces efforts doivent être dirigés par les Etats du Sahel eux-mêmes et avoir une approche régionale pour porter leurs fruits». Et parce que les terroristes ne respectent pas les frontières nationales, a-t-elle ajouté, «toute approche qui se limite à la frontière d'un Etat est voué de ce fait à l'échec. Le terrorisme dans le Sahel est un problème régional. Ce qu'il faut alors, ce n'est rien de moins qu'une solution régionale». Pour elle, la réunion regroupe des experts «directement touchés par le terrorisme avec ceux de tous les continents. Nous avons des attentes élevées en matière d'échange d'idées, de perception et de stratégies». Elle a exprimé son souhait de voir cette rencontre s'achever en approuvant la proposition de la coprésidence du groupe (Algérie-Canada) relative à la tenue de réunions régionales d'experts pour chacun des thèmes : «Nous ne voulons pas que cette réunion soit celle de la parole, mais plutôt celle des échanges pour des actions concrètes qui mèneront à des résultats substantiels. » Pour cela, «il est important de mettre de côté nos commentaires préparés, les intérêts personnels étriqués et les différences politiques (…) Nous devons tenir un même langage qui met l'accent sur la coopération et le partage de l'information». Le représentant turc, Mustapha Kamel Mikini, a, lui aussi, mis l'accent sur la menace terroriste «qui pèse sur le monde entier et qui constitue la première des priorités des Etats. A partir du moment que les terroristes bénéficient de la liberté et contournent les lois, les Etats sont mis devant la nécessité de coopérer et de partager leurs expériences pour venir à bout et de manière ferme de ce fléau». Les travaux de cet atelier reprendront aujourd'hui, toujours à huis clos, et s'achèveront en fin de journée avec une déclaration finale. -Erratum: Une malencontreuse erreur technique s'est glissée hier dans notre article relatif à l'entretien avec Abdelmadjid Attar, ancien PDG de Sonatrach. L'article en question a été illustré d'une photo de l'actuel PDG de Sonatrach, Nordine Cherouati en lieu et place de celle de M. Attar. Toutes nos excuses aux concernés et à nos lecteurs.