-Durant la période évoquée par les joueurs internationaux, vous faisiez partie du staff médical de l'équipe nationale… J'étais déjà médecin de l'équipe quand Zdravko Rajkov était entraîneur. Puis Guennadi Rogov lui a succédé. Deux ou trois mois après son arrivée, il a ramené un médecin russe. Assez rapidement, je n'ai plus eu accès aux dossiers médicaux. Je pensais qu'ils faisaient des tests d'évaluation qu'ils ne voulaient pas divulguer. J'ai envoyé un rapport au directeur général du Centre national de médecine du sport et au ministère. On m'a répondu que je devais laisser Rogov travailler avec son médecin. Alors j'ai démissionné. S'ils avaient utilisé des produits dopants quand j'y étais, je l'aurais su. Que s'est-il passé après mon départ ? Je n'en sais rien. -Entre les lignes, vous dites qu'il est probable que ce médecin ait utilisé des produits dopants ? Je n'écarte rien. Je dis que les dossiers m'ont été enlevés pour me pousser à démissionner et pour qu'après, ils puissent faire ce qu'ils voulaient. A l'époque, le bloc de l'Est, connu pour ses pratiques comme l'autotransfusion, était très présent dans le sport. -Les joueurs parlent de comprimés… Ça ne veut rien dire. On leur donnait des comprimés tout le temps, comme de la vitamine C, par exemple. -Certains sportifs et médecins du sport expliquent que de tout temps le dopage a existé dans le sport, y compris à cette époque, et qu'il n'y a pas de quoi s'étonner qu'une telle affaire éclate aujourd'hui… Dans les années 1970, 80 et 90, le dopage n'existait pas en Algérie. Tout simplement parce qu'à l'époque, la charge de travail n'était pas très importante. Or, le dopage est apparu à partir du moment où on a demandé au corps de supporter davantage d'efforts. Et aussi, je le dis souvent, parce que l'argent a pollué le système sportif. -Avez-vous la conviction qu'il existe un lien entre la prise de produits et les handicaps dont souffrent les enfants des footballeurs ? Le lien n'est pas évident mais il est possible. Parce qu'aujourd'hui, personne ne peut faire le lien entre des produits dopants et les effets sur la progéniture de ceux qui les ont pris. Mais vu que plusieurs joueurs qui évoluaient dans la même équipe, à la même époque, sont touchés, on est en droit de se poser des questions… -Aujourd'hui, Rogov est décédé, on ne retrouvera probablement jamais le médecin russe en question, quant aux dossiers, ils auraient disparu avec le médecin… Le hic, c'est que même si on avait les dossiers, on ne pourrait rien prouver. Car si des produits dopants avaient été donnés, cela ne serait pas mentionné. -Pourquoi cette affaire éclate-t-elle maintenant ? Et que penser du silence des instances sportives ? Je crois que les footballeurs, aujourd'hui, vivent des problèmes sociaux sérieux. Après, que voulez-vous que disent les responsables ? Sur quelles bases mener une enquête ? Je pense qu'à la FAF, les responsables, qui sont d'anciens joueurs, pourraient proposer de les soutenir socialement, par une aide financière ou autre chose.