L'expansion du cheptel ovin dans les zones steppiques inquiète les spécialistes. Les travaux de l'atelier maghrébin sur les effets des changements climatiques sur l'élevage et la gestion durable des parcours dans les zones arides et semi-arides se poursuivent aujourd'hui et demain par une série de communication et tables rondes sur la thématique de la situation actuelle et future de l'élevage des camélidés, caprins et ovins dans ces régions. La seconde journée a été marquée quant elle par plusieurs interventions très enrichissantes, notamment celle de Mme Nejraoui de l'université de Bab Ezzouar dont les travaux de recherche sur la steppe algérienne ont accompagné les changements dramatiques des parcours. Pour elle, l'augmentation exponentielle du cheptel ovin qu'elle situe à 80% est la première cause de la dégradation de la steppe qui souffre plus de mauvaise gestion que de désertification. Selon Mme Nedjraoui, «l'élevage ovin dont le cheptel atteint les 21 millions de têtes en Algérie, est artificiel vu le maintien de la gratuité des eaux de breuvage, le surpâturage et l'échec politique en matière d'organisation des espaces steppiques, aggravé par la difficulté de trouver des formules participatives impliquant la population agropastorale». L'oratrice soulignera par ailleurs qu'en l'état actuel des choses, force est de constater que l'Algérie enregistre plus de 50% de pertes d'espèces et de productions agropastorales avec deux contraintes majeures : l'aridité croissante et les pratiques agropastorales inadaptées. «Nos équipes parsemées à travers la steppe algérienne ont constaté une prolifération des espèces floristiques sahariennes, et cela est un indicateur majeur de surpâturage, ce n'est pas une malédiction mais il y a des dispositions économiques et sociales à prendre». L'autre intervention évocatrice a été celle de Mme Mokhtari, représentante du ministère de l'Agriculture algérien qui a ciblé l'élevage camelin dans le pays en remarquant l'accroissement notoire du cheptel qui s'élève à quelque 313 000 camelins au 31/12/2010. Selon elle, l'évolution des camélidés est très remarquée à l'extrême sud, où la wilaya de Tamanrasset occupe le premier rang avec 84 250 tetes, tandis que Tindouf et Adrar enregistrent 43 000 têtes chacune. La prévalence du cheptel a donc été inversée durant les dix dernières années, avec une nette prédominance du camelin dans l'extrême sud qui compte 50% du cheptel, tandis que les sud-est et le sud-ouest se partagent le reste. Relatant les mesures prises par le ministère de tutelle pour la promotion de cet élevage caractéristique des zones désertiques, la représentante du ministère a souligné la prime à la naissance de chamelle de 20 000 DA ainsi qu'une série d'études de diagnostics inscrites à l'indicatif des commissariats au développement de la steppe (HCDS) et des zones sahariennes (CDARS). Le Dr Adamou soulignera que l'appartenance tribale du camelin est primordiale dans ce type d'élevage, marginalisé selon lui par les politiques de développement alors qu'il constitue plus de 30% des abattages dans les wilayas sahariennes. Ce spécialiste international du camelin affirme que tous les pays ayant un potentiel camelin profitent au mieux de sa manne financière tant par son lait rehaussé au statut d'alicament, que par sa viande goûteuse et diététique que par ses qualités d'animal de bât et de course. L'Algérie est classée au dernier rang des pays où le camelin est un animal rustique valorisé à cause d'une vision dépréciative qui sous-estime ses effectifs et ses qualités. C'est d'ailleurs sa qualité d'animal ami de la biodiversité qui a été soulignée par Mme Nedjraoui, qui affirme que «quand le mouton dévaste la steppe, le dromadaire, lui, ne mange que les feuilles et s'abstient d'endommager le reste». Le Dr Chehma, de l'université de Ouargla, notera à ce propos qu'en matière de changements climatiques, le dromadaire gagne du terrain avec une pluviométrie très intéressante et des parcours plus riches, donc autant profiter de ce don du ciel pour encourager l'élevage camelin.