Le crooner du raï dans la même veine que Houari Benchenet ou encore Rahal Zoubir, Abderrahmane Djalti, signe un retour remarqué, histoire d'étrenner l'année 2006. Et justement, son nouvel album présente l'estampille : Bonne année ! Une délicate attention à l'endroit de ses fans et des éventuels chineurs des bacs à disques. Intitulé Dalila Allah Yahdik, ce nouvel opus est sorti chez le label Soli et renferme une teneur musicale fraîche, digeste et recherchée. Car celui qui est aux manettes des arrangements et autre direction orchestrale n'est autre que le talentueux et à l'humilité exemplaire, Amine Dehane, une référence en matière de musique raï (remember sa dernière prestation aux côtés de Lotfi Attar de Raïna Rai, à la radio nationale, au Ramadhan). La chanson éponyme Dalida est dans la même fibre que Un Gao à Oran de 113, Mohamed Lamine et Magic System issu de l'album au succès phénoménal Raï'n'b Fever dont le djing est de Kore et Scalp. Une biguine antillaise algérianisante mâtinant un rythme afro-beat, oriental et surtout dance. Du beau zouk-raï qui fera sûrement le bonheur des clubbers en ces longues nuits hivernales dansant collé-serré sur la musique et muse Dalila taquinant Djalti à travers ses caprices. Allah Yahdik Ya Samra, dont les paroles et composition sont de Degdouga, est une immersion dans le rythme extatique d'ébène et d'ivoire de Sidi B'lal où le goumbri acoustique et traditionnel (joué par Amine Dehane, une autre corde !) flirte avec les karkabous et le jazzy-électro. Daâwat El Khir est une ode déclamée à la mère où Djalti lui demande pardon et sa bénédiction. Une chanson pathétique et émouvante qui ferait bien une bande originale d'un feuilleton télévisé algérien ramadhanesque (comme l'a fait Houari Benchenet dans El Bedra). Sur Les femmes qui m'ont aimé, Djalti est un gentleman charmeur. Une bluette pianistique, sentimentale et romantique mêlant bendir, flûte synthétique... Et puis, Djalti sort les violons et les archets sur une ballade où il fait son mea maxima culpa devant les femmes qu'il a chéries : « Belles, elles étaient belles les femmes qui m'ont aimé. Mais je regrette qu'aucune n'a réussi à me changer de l'homme que j'étais. Plus jaloux, orgueilleux, possessif et impulsif. En amour, j'étais rebelle et jamais fidèle. Pardon ma blonde, ma rousse, ma brune... Tous mes regrets et excuses à toutes ces femmes douces et exquises... » C'est l'Algerian lover, quoi ! L'album recèle aussi deux reprises. La première Ouh Ya N'tia de Mahboubati, une version chaâbi joviale, chorale et de varieté et la seconde est Chah Fia de Mohamed Lamari où Djalti adopte le phrasé de Rabah Deriassa. Un cover au raï-medahatte incisif et vital quand retrouve dans les lives. Ya Rabi Khalihali est un titre de jeel music d'Oum Edounia et Kaltoum. Et Djalti en est l'auteur. Cependant, avec Mani Fahem Walou, arrangé par Christophe Massiera, Djalti se défausse de la chanson légère et futile pour celle utile et hardcore (radicale) émaillée d'un rap protestataire et d'une digression orientalisante. « C'est à ne rien comprendre. L'indigence, la pauvreté et la musique adoucit les ‘'morts''. On erre dans le noir sans travail ni futur. L'étouffement et puis les autres... » Bref, un album agréable à écouter, celui d'un chanteur de charme aux textes très clean. Et ce qui est de surcroît méritoire chez Djalti. Abderrahmane Djalti Dalila Allah Yehdik 1CD/1K7 Soli music