Petites habitations en ruine, escaliers branlants et murs défraîchis. Taleb Bendiab Saâd Allah et Khalid Mekamcha, jeunes photographes, ont consacré une exposition «Derb Messoufa». Le siège de l'association La Grande Maison, à Tlemcen, accueille l'expo qui se tient jusqu'à dimanche 15. En mai 2011, Saâd Allah, jeune étudiant de 21 ans, décide de faire visiter sa ville à des amis étrangers. Etudiant passionné en architecture, il décide de leur faire découvrir ce qu'il appelle «le véritable Tlemcen». Et de leur faire connaître Derb Messoufa, petites ruelles anciennes qui serpentent entre plusieurs dizaines de vieilles maisons. Armé de son appareil photo professionnel, il est interpellé par un habitant qui le confond avec un agent de l'APC. Celui-ci le prend à témoin et lui montre l'ampleur de la dégradation de son habitation exiguë. «J'ai été très touché par cette scène et ai décidé d'y retourner le plus souvent possible et de prendre des photos du quartier», raconte-t-il. En déambulant dans les rues étroites de Derb Messoufa, il espère se faire inviter encore une fois chez un habitant et prendre des photographies. Il sympathise avec les plus jeunes et s'amuse avec les enfants pendant trois mois avant que son souhait ne soit exaucé. «Vous savez, les gens craignent l'appareil photo, il faut leur expliquer votre démarche, votre volonté de faire avancer les choses. J'ai réussi à les convaincre que j'ai un outil qui permet de faire connaître la situation», explique-t-il. Khalid le rejoint en cours de travail alors qu'il propose le thème à l'association La Grande Maison, dont il est membre. Jusqu'à dimanche 15, leurs photos sont exposées au siège de l'association, à Tlemcen. «J'ai été attiré par le message et le travail de sensibilisation», confie Khalid. Le trentenaire travaille à la Société nationale de l'électricité et du gaz (Sonelgaz) et n'avait encore jamais mis les pieds dans ce vieux quartier, mais s'indigne quand il découvre son état de délabrement. «On dépense d'énormes sommes d'argent dans le cadre de “Tlemcen, capitale de la culture islamique“, mais rien n'est fait pour la sauvegarde de notre patrimoine», déclare-t-il. Saâd Allah renchérit : «J'ai honte de l'état de délabrement de notre patrimoine, alors que dans d'autres pays, c'est la première chose qu'on met en valeur.» Free Photo Dz Les habitants du «derb» n'ont pas manqué le vernissage de l'exposition. Emotion et reconnaissance se confondent sur le visage juvénile de Saâd Allah quand il évoque le souvenir d'un des habitants qui a été gagné par l'émotion. «Alors que nous prenions des photos, les vieilles dames nous interpellaient en nous disant qu'elles espéraient que notre action leur porterait chance», se rappelle Khalid. L'association La Grande Maison, fondée il y a une dizaine d'années, tend à faire revivre l'œuvre de Mohamed Dib à travers des ateliers d'écriture, des pièces de théâtre ou encore des expositions de photographie. Trois principaux projets sont en cours, Free Photo Dz : des expositions de photographie organisées dans des cafés populaires, une exposition par mois au sein de l'association et un futur festival de photo. «Le premier projet a été notamment organisé à Tlemcen et à Oran et a reçu un accueil assez favorable, explique Saâd Allah. Il a eu pour effet que des femmes aillent dans des cafés populaires pour voir ces expositions…»