Le ministre de la Solidarité nationale a annulé in extremis la visite qu'il devait effectuer jeudi dernier à El Tarf. Un programme très ambitieux avait été concocté pour l'occasion. Il se trouve, par coïncidence, que M. Ould Abbas est aussi le dernier représentant du gouvernement à s'être rendu dans la wilaya, le 2 juin 2005, à l'occasion de la Fête de l'enfance. Depuis 8 mois, pas un seul ministre n'a mis les pieds dans la région. El Tarf serait-elle à ce point pestiférée pour être boudée par Alger ? C'est vrai que les émeutes barrent trop souvent les routes et que les rumeurs les plus folles courent sur la corruption des cadres et les élus. Il y a, en effet, un climat délétère très perceptible engendré par un affairisme qui ne se donne plus la peine de cacher sa nature interlope. Certaines supputations s'avèrent toutefois fondées comme le prouvent ces enquêtes menées de manière très discrète par différents services de sécurité et anticorruption. Mercredi dernier, ce sont des enquêteurs de la gendarmerie qui ont procédé, à la Direction du logement et de l'équipement public (DLEP), à la saisie de dossiers concernant des marchés publics. Deux membres de la commission des marchés de la wilaya ont été entendus par les enquêteurs. D'autres, dont des membres de l'exécutif, le seront dans les prochains jours. Les marchés publics à El Tarf ont été, à maintes reprises, pointés du doigt. Par le ministre de l'Habitat en personne, des investisseurs, des entrepreneurs et par un seul élu de l'APW, Lakhdar Bélaïd, qui en a fait les frais, lui et les membres de sa famille, sans que cela ébranle ses pairs de l'Assemblée. « Les projets inutiles », un des aspects de la corruption, pour reprendre la formule de l'ex-Premier ministre M. Benbitour, font florès. Et gare à celui qui se placerait à contre-courant du mouvement général où le niveau intellectuel est tel que certains protagonistes trouvent la corruption tout à fait justifiée, car pratiquée aussi dans les pays développés ! Toujours à propos des marchés publics, l'APW d'El Tarf s'est réunie, mercredi dernier, pour tenter de retirer son mandat d'élu à Lakhdar Bélaïd - par qui le scandale est arrivé - au motif qu'il est sous le coup de poursuites judiciaires (voir El Watan du 1er février 2006). Dans la même journée, des élus, dont le président de l'APC de Aïn Karma, nous ont informés que le wali leur a signifié leur suspension pour des raisons similaires. « Nous venons de saisir le ministre de l'Intérieur, car cette mesure n'est pas légale. C'est à l'Assemblée que revient le droit de suspendre l'un de ses élus », nous ont-ils répondu en ajoutant qu'ils refusaient de faire les frais de la cabale montée contre Lakhdar Bélaïd.