Le nombre des familles habitant des bâtisses menaçant ruine ne cesse d'augmenter dans le seul périmètre de la ville de Constantine. Des familles continuent de vivre un quotidien hanté par le spectre des effondrements, surtout durant la saison hivernale. C'est le cas des quartiers de la vieille ville où les habitants sont toujours dans l'attente d'un relogement salvateur. Les chiffres de service de la Protection civile, ayant effectué au cours de l'année écoulée 269 interventions en sus des opérations de reconnaissance, ont recensé 1524 familles habitant des bâtisses menaçant ruine. Le tissu urbain menacé est localisé essentiellement au niveau des parties basse et haute de Souika et dans le quartier de Sidi Djeliss situé dans la partie nord-est de la vieille médina, alors que des maisons implantées dans le quartier de La Casbah n'échappent pas à la règle. La fameuse rue Mellah Slimane (ex-Perrégaux) séparant Souika en deux secteurs ainsi que les ruelles secondaires semblent être la partie la plus affectée. Dans la rue Benzegouta (ex-Morland) ainsi que la rue Daâra Kaddour (ex-Kleber), les maisons et les locaux commerciaux démolis en février 2005 côtoient toujours des maisons délabrées, alors que des boutiques de fortune construites en parpaings ont poussé au milieu des débris. A l'intérieur des pièces sombres et trop exiguës où les odeurs de l'humidité vous frappent aux narines, on s'adapte comme on peut avec les infiltrations des eaux pluviales. Les locataires n'ont que le plastique pour colmater un plafond qui s'effrite. « Nous avons cultivé longtemps l'espoir d'être un jour relogés. Nous attendons toujours, alors que des gens étrangers au quartier ont bénéficié de logement », nous dira une vieille dame qui vit encore avec ses deux fils mariés, non loin de la mosquée de Sidi Afane. Non loin de là et juste à l'endroit dit Sabat El Bouchaïbi, une bâtisse ayant perdu une bonne partie de sa façade menace de céder à tout moment, mettant ainsi en péril la vie des passants et des riverains. Un autre cas de danger extrême et face auquel les autorités de la ville manifestent encore une indifférence incompréhensible est celui de la bâtisse dite Dar Bendali située dans la rue Abdallah Bey, dans le quartier d'Essayeda, à quelques pas de la mosquée de Sidi Moghrof. Il n'est pas nécessaire d'être un expert en la matière pour constater de visu l'état menaçant de la bâtisse dont l'inclinaison des murs et les fissures béantes sont effrayantes, alors que le pavé se décolle lentement du sol sous l'effet des eaux souterraines. A Sidi Djeliss, l'état des lieux ne diffère pas, sauf que le site, presque oublié, se dégrade de plus en plus offrant aux regards des plaines de détritus séparant ce qui reste encore des maisons habitables. Le phénomène des bâtisses menaçant ruine n'est pas l'unique spécificité de la vieille ville, puisque d'autres secteurs dans les quartiers de La Casbah, Kitouni Abdelmalek, les Maquisards et Ben Chergui vivent une pareille situation face à laquelle les autorités locales se sont avérées impuissantes et se contentent de gérer les choses, selon les urgences et les priorités, et au gré des quotas des logements proposés et qui seront partagés aussi avec les familles recasées dans le cadre de l'évacuation des sites menacés par les glissements de terrain ainsi que du fameux projet de « débidonvillisation » de la ville de Constantine. Pour les centaines de familles habitant toujours des bâtisses menaçant ruine, il faudra encore plusieurs années avant de pouvoir sortir enfin de la précarité.