L'isolement, le manque de vivres, et de gaz, les coupures d'électricité sont le lot quotidien des habitants de Bouyanem, Ighil Ouzagaghen, Iftahen et Ahmam, des bourgades dépendant de Aït Tizi, l'une des communes les plus touchées par la dégradation des conditions climatiques. La coupure du courant à Souk Ethnine et Tounarine, chef-lieu de la commune, accentue le calvaire des habitants d'une région au bord de la catastrophe. Même le réseau de téléphonie mobile s'est, au grand dam des gens de la région, inscrit aux abonnés absents dans bon nombre d'endroits complètement coupés du monde. Contacté par nos soins Mohamed M., un citoyen de Takerkert, un hameau situé à 3 km de Bouandas (chef-lieu de commune et de daïra situé à plus de 70 km de Sétif) lance un SOS : «Bloquée par des dunes de neige, la route reliant notre village à Bouandas est coupée depuis plusieurs jours. Même si notre situation est bien meilleure comparativement au calvaire vécu par nos concitoyens de Boussellem, Aït Tizi et Nawel Aït M'zada qui crèvent de faim et manquent du strict minimum, nous faisons face à un déficit en gasoil et en vivres. Pour éviter une catastrophe humanitaire car la vie des malades, des personnes âgées, des enfants en bas âge est en danger, l'intervention du génie militaire est demandée pour désenclaver ces régions où on ne peut parfois même pas enterrer nos morts.» Slimane, de Boussellem, enfonce quant à lui le clou : «Il est vrai que nous nous attendions pas à de telles chutes de neige qui ont atteint par endroits plus de 3 mètres d'épaisseur, mais tout de même. Il ne faut pas se voiler la face. Les responsables ont oublié que gouverner c'est prévoir ; ils n'ont pas pris le taureau par les cornes car même l'eau nous fait défaut à Boussellem, où on manque de tout. On nous parle de l'intervention de l'armée, mais on n'a rien vu jusqu'à maintenant. Si on veut éviter des décès par hypothermie, on ne doit pas attendre une seule seconde car la situation est plus que critique à Boussellem.» La situation à Babor et Aïn Kébira n'est guère meilleure. De nombreux hameaux du nord-ouest de la wilaya sont eux aussi isolés. Afin d'atténuer un tant soit peu les souffrances des populations, l'on apprend que les communes de Aït Tizi, Aït Nawel M'zada, Boussellem, Babors, Aïn Elkébira, Mezloug, Maouane (Ouricia) et Aïn Abassa ont bénéficié hier chacune de 210 bouteilles de gaz butane. Des cargaisons de 30 000 litres de carburant ont été acheminés vers les daïras de Beni Ouartilane et Beni Aziz. 8 camions de 2,5 tonnes chargés de semoule et de farine ont été, nous dit-on, envoyés à 8 localités dont Aït Tizi, Aït Nawel M'zada, Boussellem et Babors, pour ne citer que ces centres très éprouvés par les exécrables conditions climatiques. Des averses d'une intensité qui n'a pas été enregistrée depuis 1986 ont plongé, hier, presque toute la wilaya de Sétif dans l'isolement. Les fortes chutes de neige ont bloqué en de nombreux endroits l'autoroute Est-Ouest. Epargné quelque peu ces derniers jours, le chef-lieu de la wilaya a été recouvert par plus de 50 cm de neige. Les citoyens, qui sont restés cloîtrés chez eux, ont par ailleurs déploré le mouvement de grève des boulangers qui débrayent pour trois jours. Les grévistes n'ont pas, pour de nombreux Sétifiens, choisi le bon moment pour lancer leur débrayage. Ils revendiquent la majoration du prix du pain, introuvable du côté de Aïn El Fouara, où les mauvaises conditions climatiques se poursuivront, selon les services de la météo, jusqu'à dimanche prochain…