L'un dit une chose à propos de l'ampleur de la corruption ; l'autre affirme presque son contraire. «Ce ne sont pas des choses extraordinaires (...) Ce n'est pas la grande corruption, ce sont des miettes que nous voulons supprimer», a tenté de minimiser Mohamed Abdou Bouderbala, directeur général des Douanes algériennes. Ce responsable s'exprimait en marge d'un séminaire international consacré aux «Usages de la quantification dans les administrations fiscales et douanières des pays en développement et émergements», organisé hier à l'hôtel El Aurassi (Alger). Ce responsable a laissé entendre que son institution est victime de clichés : «Les Algériens ont une idée préconçue de l'administration des Douanes, ils ont accumulé sur elle des images et des clichés.» Pour M. Bouderbala, la tenue de cette rencontre vise à «changer la perception des citoyens vis-à-vis de l'administration des Douanes». Les Douanes disposent d'un dispositif réglementaire à même de combattre efficacement ce phénomène, a-t-il insisté, se refusant de fournir des statistiques sur son ampleur. Une trentaine d'agents douaniers ont été révoqués en 2011, pour des affaires liées à la fraude et à la corruption, révélait le directeur général des douanes en janvier dernier. A en croire M. Bouderbala, son institution a «beaucoup évolué» via la politique de recrutement de jeunes, l'informatisation des services et l'ouverture de quatre inspections régionales qui peuvent s'autosaisir dans des affaires de corruption. Les Douanes se sont équipées de cinq nouveaux scanners d'une valeur de six millions d'euros, a-t-il rappelé, promettant le renforcement du contrôle des marchandises importées à travers l'acquisition de nouveaux appareils. Auparavant, le ministre des Finances, Karim Djoudi, tenait un autre discours. «Personne ne peut nier qu'il y a des insuffisances, personne ne peut nier qu'il y a existence de la corruption, et qu'il y a matière à travailler», avait avoué le premier argentier du pays en réponse à une question sur l'ampleur de ce fléau dans l'administration douanière. Il avait estimé que l'Algérie a encore du pain sur la planche : «Avoir des objectifs signifie qu'on a des caps à atteindre, des écarts à réaliser», qualifiant de «probants» les résultats en matière de lutte contre ce fléau. M. Djoudi avait rappelé que la maîtrise de la quantification est une étape nécessaire si l'on veut détecter la fraude et mesurer l'efficacité des services douaniers. Des contrats de performance sont en cours dans plusieurs institutions, dont l'administration douanière, d'après le ministre : «Ces indicateurs de performance sont un élément-clé dans la lutte contre ces insuffisances et dans l'atteinte des objectifs.» En revanche, M. Djoudi a reconnu l'existence de «résistances» au sein de toutes les administrations qui ralentissent, selon lui, le traitement des dossiers. «Tout ce qui vient de l'extérieur comme élément nouveau de modernisation est souvent appréhendé avec un peu de suspicion», a-t-il déploré. Lever ces blocages passe, selon lui, par le rajeunissement de l'administration, l'introduction de l'outil informatique et l'amélioration des conditions sociales des fonctionnaires. Les douaniers étaient 14 000 en 2006, puis 20 000 en 2010 Les Douanes, selon ce responsable, attendent toujours le feu vert du gouvernement pour l'acquisition de cinq nouveaux hélicoptères.