Est-ce aux impératifs protocolaires inhérents à la perspective du démarrage des activités, tant attendu, du très controversé complexe ammoniac/urée «Sorfert Algérie» que répond l'invitation adressée, il y a quelques jours, par le ministère de l'Energie et des Mines, à Nassef Sawiris, le numéro un d'Orascom Construction Industries (OCI) pour venir en Algérie début avril 2012 ? Tout porte à le croire si l'on se réfère à la toute récente déclaration faite à El Watan par Wael Khairy, Chief Financial Officer à la société algéro-égyptienne, fruit d'une joint-venture entre la compagnie nationale Sonatrach (49%) et OCI (51%). «Le complexe est fin prêt. Sa réalisation est presque achevée à 100%. Si tout va bien, la première ligne d'ammoniac devrait donc être officiellement lancée au cours des dix premiers jours du mois d'avril. Celle d'urée, une semaine plus tard» a, en effet, assuré l'Egyptien qui tient les rênes des finances de Sorfert rencontré, la semaine passée, au siège d'Orascom Construction Industrie Algérie-OCIA- (Hydra Alger). Le terrain a-t-il enfin été dégagé ? Les entraves, justifiées ou injustifiées ont-elles toutes été levées? Cette fois, la réponse vient de l'Algérien, Farès Boulahbel, représentant officiel en Algérie du conglomérat OCI qui, outre les 51% à Sorfert, détient 98% à OCIA. «Le projet Sorfert qui s'inscrit dans l'ambition de faire de l'Algérie un grand pôle de production d'engrais a suffisamment pâti du laxisme administratif et des distorsions bureaucratiques. A l'heure actuelle, nous n'avons aucun problème sérieux qui pourrait retarder davantage le démarrage de l'usine. Je pense que le manque à gagner de 50 millions de dollars/mois de février 2011 à fin mars 2012, a visiblement réveillé les consciences», nous dira-t-il. Nassef Sawiris répondrait-il présent ? Interrogé, par ailleurs, sur l'éventualité d'une visite qu'effectuerait Sawiris dans notre pays, le jeune diplômé en marketing a confirmé l'invitation, se gardant toutefois de préciser si cette visite était en rapport avec l'inauguration officielle du complexe ou non. «Effectivement, le ministère de l'Eénergie et des Mines a demandé la présence, début avril 2012, de Nassif Sawiris en personne, mais je ne peux vous dire quel est au juste l'objet de cette invitation», précise-t-il. L'épée de Damoclès, qui planait sur ce qui pourrait faire de l'Algérie l'un des leaders mondiaux d'engrais et pourvoir le marché de l'emploi national de quelque 5000 à 6000 postes directs et une estimation de 3000 autres postes indirects, a-t-elle été levée ? A en croire les affirmations des deux représentants en Algérie de la troisième fortune d'Afrique, la réponse est oui. Du moins ce que laisse comprendre Farès Boulahbel : «A l'heure actuelle, Sorfert n'a plus de problèmes et je précise bien avec aucune des institutions de la république de notre pays, qu'elles soient directement ou indirectement impliquées dans le projet». Peut-on donc parler de dénouement de ce qui était devenu affaire Douane-Sorfert et ayant fait couler beaucoup d'encre et nourri, des mois durant, les spéculations les plus folles ? Les services des douanes ont, faut-il le rappeler, bloqué pendant près de quatre mois toutes les opérations de dédouanement relatives à pas moins de 87 expéditions au total. Cette situation lourdement pénalisante, la même source l'impute à une simple mauvaise lecture et interprétation des détails du dossier inhérent à l'une des opérations de dédouanement. Le contentieux alors engagé avait pris des dimensions inouïes, s'en était suivi un effet de dominos qui s'était étendu sur le reste des opérations. La thèse de transfert illicite de devises réfutées Document à l'appui, il fera savoir que « d'après les chiffres qui, faut-il le souligner, sont partagés avec plusieurs institutions nationales et surtout avec notre partenaire Sonatrach, Sorfert a ouvert une lettre de crédit pour l'achat d'une usine clé en main auprès du fournisseur allemand UHDE sur la base d'un contrat irrévocable». Et de rappeler que le projet était financé à hauteur de 70% par cinq banques publiques algériennes, la BNA, la CNEP Banque, la BDL et le CPA et la BEA comme chef de file. Les 30% restant à la charge de Sonatrach-OCI. A ses yeux, ce rappel s'impose puisque, «le montant de la lettre de crédit s'élève à 943,585 millions d'euros. La BEA a poursuivi le transfert des financements des achats de Sorfert en dépit du blocage, pendant trois mois, des expéditions par les services des douanes des ports et aéroports d'Oran et d'Alger. Comment dans ce cas parler de transfert illicite de devises alors que Sorfert n'a pas encore consommé ladite lettre de crédit dans son intégralité ?», s'interroge M. Boulahbel qui a eu à gérer le département des relations bancaires puis celui des crédits au sein d'Orascom Construction Industrie Algérie (OCIA). Ce qui a, toujours selon lui, suffi pour convaincre l'administration douanière de réétudier de plus près le dossier Sorfert et de libérer tous les équipements de l'usine, en souffrance au niveau des sites portuaires et aéroportuaires avec comme conséquences immédiates des sommes importantes en pénalités, frais d'entreposage, surestaries, etc., en plus du retard dans le redémarrage du projet. Aussitôt saisie de l'affaire, la direction du contrôle a posterior,i avait ordonné la main levée sur tous les équipements de Sorfert. Conscient de l'enjeu stratégique que représente ledit projet pour le pays et des lourdes retombées de son blocage, le premier responsable de ce département a déverrouillé l'affaire Sorfert dans la même séance de travail où il avait été sollicité», reconnaît M. Boulahbel, soulignant au passage l'absence de toute action judiciaire intentée par la douane algérienne à l'encontre des représentants d'OCI à Sorfert Algérie. «Conformément aux nouvelles lois en vigueur, la justice doit systématiquement être notifiée de tout contentieux opposant les douanes aux opérateurs économiques. La procédure est normale et Sorfert ne fait pas l'exception». Et, d'ajouter avec assurance en sa qualité de délégué pour tous les investissements en Algérie de la maison mère OCI : «Jusqu'à preuve du contraire, la justice n'a toujours pas engagé d'actions judiciaires à notre encontre. Aucun de nos éléments n'a été invité ou convoqué à se présenter devant un magistrat de siège». Ce qui n'est pas le cas de certains hauts responsables algériens, à l'image de l'ancien directeur général adjoint (DGA) de Sorfert, Mohamed Zemouri, auditionné le 31 janvier 2012 dans le cadre de cette affaire par le juge d'instruction de la première chambre relevant du pôle spécialisé d'Oran. Une audition curieusement intervenue à peine deux jours après son remplacement par Moufid Benmerabet, sur résolution de l'assemblée générale du 29 janvier 2012 du conseil d'administration de la société algéro-égyptienne Sorfert. Le lendemain, soit 30 janvier 2012, ce même nouveau DGA a, lui aussi, été convoqué par les services de sécurité de la wilaya d'Oran.