Comme nous le craignions, l'année 2006 débute avec l'emprisonnement d'un autre journaliste. Bachir Larâabi s'en est allé rejoindre derrière les barreaux Mohamed Benchicou, enfermé depuis 19 mois et 16 jours dans une cellule d'El Harrach. 18 journalistes au moins, condamnés à la prison ferme courant 2005, risquent, à leur tour, d'être embastillés à tout moment. D'autres journalistes sont désormais éligibles à la prison, et au vu de la cascade de procès intentés aux journalistes, nous redoutons une véritable hécatombe dans les rangs de la presse dans les prochains jours. Ce triste palmarès détenu par l'Algérie des années 2000 est le résultat d'un climat de tension sciemment entretenu par le régime pour tuer ce qui reste de liberté dans la presse, avant de liquider les autres libertés. Toutes les libertés. Parce que la liberté de la presse est mère de toutes les libertés. Parce qu'il ne saurait y avoir de débat public, démocratique et sain en l'absence de médias libres et de journalistes indépendants. Parce que sans liberté d'expression, l'Etat de droit, le pluralisme et la démocratie tant vantés par nos gouvernants sont tout simplement un leurre, nous disons non à la mise à mort de la liberté de la presse ! Nous signataires de la présente déclaration : journalistes, organisations de défense des droits de l'homme, syndicats, partis politiques, organisations de la société civile... citoyens, exigeons : 1 la cessation immédiate du harcèlement systématique sauvage qui a pris pour cible les journalistes ; 2 la libération de Mohamed Benchicou et Bachir Larâabi et la relaxe des journalistes condamnés à des peines de prison ferme ; 3 l'abolition des articles prévoyant des peines de prison et des amendes exorbitantes pour diffamation : l'article 144 bis s'étant révélé à l'application une arme absolue pour détruire massivement la presse ; 4 l'adoption d'une loi qui promeut la liberté de la presse et protège le journaliste dans l'exercice de son métier, tel qu'il en existe dans les régimes démocratiques, en remplacement de l'actuel code de l'information. Pour appuyer le combat pour la liberté de la presse et la liberté d'expression en Algérie, nous appelons instamment : les instances onusiennes concernées ainsi que les ONG de défense des droits de l'homme à exiger de l'Etat algérien de se conformer aux conventions et pactes internationaux relatifs à la liberté d'expression et à la liberté de la presse, auxquels l'Algérie est partie ; les partenaires politiques et économiques de l'Etat algérien, notamment l'Union européenne à travers l'application de l'article 2 de l'accord d'association, à user de toute leur influence pour le respect, par les pouvoirs publics, de la liberté d'expression en Algérie, tel que l'imposent les règles qui fondent leurs relations en matière de politique étrangère et les principes officiellement proclamés par leurs plus hauts dirigeants politiques.