Vêtues de tenues traditionnelles, les jeunes filles de l'association Al Manara de Miliana, dirigée par Mohamed Landjerit, ont lancé, dimanche soir au Palais Abdelkrim Dali-Imama de Tlemcen, une série de concerts de musique andalouse en hommage notamment à l'école de Tlemcen (Alger et Constantine sont les deux autres écoles algériennes). Des concerts organisés à la faveur des cérémonies marquant la clôture de la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique». Les jeunes milianaises ont interprété sans accompagnement musical, Charaâ Allah maak ya Ahmed et Njik njik, fortement applaudies par le nombreux public. La première chanson évoque Si Ahmed Benyoucef, le saint patron de Miliana. La star montante du chant andalou, Lila Borsali, a pris ensuite le relais en interprétant partiellement une nouba Hcine avec Mceder, Inklab et insraf. Cette ancienne élève de l'association Ahbab Larbi Bensari de Tlemcen, prépare un nouvel album (la sortie est prévue pour le 26 avril) dans lequel elle reprend, à sa manière, la nouba Rasd Edhil. Revenue de France, il y a deux ans, Lila Borsali mène désormais sa propre carrière. «Auparavant, j'étais dans le mouvement associatif pour faire connaître la culture algérienne à l'extérieur du pays. Il faut avancer dans la recherche sur le patrimoine andalou et éviter de tomber dans le piège des règles rigides de la commercialisation. Certains pensent que l'andalou ou la musique du patrimoine ne sont pas vendeurs», nous a déclaré Lila Borsali. L'artiste a son propose site internet : www.lilaborsali.net. Hamid Taleb Bendiab, lui, a chanté des morceaux de style hawzi d'après les textes de Benmessaib, de Bentriki et Bensahla. Il a notamment chanté, Mal hbibi malou , Fnit ou chmaa yesberni, Sefet echamaâ ou el kandil, Khayef la chmissa, etc. «Nous avons un patrimoine très vaste. Il faut continuer à l'explorer. Pour moi, la manifestation ‘‘Tlemcen, capitale de la culture islamique'', qui est une réussite dans tous les sens, a permis de faire connaître davantage ce patrimoine et faire connaître également Tlemcen, la capitale des Zianides», a souligné Hamid Taleb Bendiab. Toufik Benghebrit a, pour sa part, interprété un cocktail de inklabat et des madayah. Il a aussi chanté une des ses compositions, Ya lahbab al wahch rah ban. «Souvent, on confond entre hawzi, châabi et andalou. L'andalou est un héritage maghrébin. Nous cherchons encore à savoir si la nouba andalouse était interprétée de la même manière ou non à l'époque de Ziryab. C'est une musique qui a été façonnée au Maghreb, notamment à Fes, Tétouan, Tlemcen, Alger, Béjaïa et Constantine. D'où ses différentes couleurs», nous a expliqué Toufik Benghebrit. Pour lui, il y a certain engouement pour la musique andalouse et ses dérivés, dans la mesure où cet art n'est plus l'apanage des grandes villes algériennes. Il a regretté que la télévision et les radios ne diffusent pas de l'andalou à des heures de grande écoute. «Je suis favorable à l'enseignement de cet héritage andalou à l'école pour le transmettre aux nouvelles générations», a-t-il dit. De son côté, Zakia Kara Torki a interprété Ya dhaoua ayani et Chams Al achiya. Le chef d'orchestre Yacine Hamas a rappelé que l'Ensemble régional andalou de Tlemcen, qui a accompagné les quatre chanteurs, a été constitué avec ceux de Constantine et d'Alger en 2006. «Les musiciens des trois ensembles créés par le ministère de la Culture, jouent aussi dans l'Orchestre national de musique andalouse», a-t-il expliqué. Issmet Wail Tchenar, musicien, a relevé, de son côté, que le but de la création de ces ensembles est de protéger le patrimoine andalou. «Nous allons enregistrer les noubas dans des CD dans des studios professionnels. Tous les musiciens de l'ensemble de Tlemcen sont issus des associations de la ville, mais aussi de Sidi Bel Abbès, Oran et Mascara. L'ensemble représente l'école tlemcénienne. Les musiciens ont appris des chouyoukh», a-t-il relevé. Khalil Baba Ahmed, autre musicien membre de l'Ensemble de Tlemcen, a estimé qu'il serait bon d'enseigner la musique andalouse à l'Institut national supérieur de musique (INSM). «Nous essayons de notre part de communiquer ce genre de musique que ce soit la nouba, le répertoire purement classique, ou le répertoire hawzi et aroubi. Nous pouvons déjà toucher un public assez jeune. Pour nous, c'est un signe de réussite. A la fin de chaque concert, les jeunes nous attendent et nous posent des questions sur cette musique. Le plus important est de retourner à ses racines», a-t-il estimé. Khalil Baba Ahmed a précisé également que l'Ensemble fait un travail pour s'approcher de l'authenticité des pièces chantées ou interprétées. «Nous sommes ouverts à toute proposition d'innovation et de recherches. Pour les noubas, nous travaillons sur les enregistrements. L'authenticité est souvent remise en question, donc, ce n'est pas toujours facile. Cette musique n'est pas écrite. Elle a été transmise oralement», a-t-il appuyé.