Les 84 agences de voyages activant dans la wilaya se demandent comment 35 000 touristes peuvent passer inaperçus. Depuis février 2010, date de l'interdiction du Tassili aux étrangers, la situation du tourisme à Tamanrasset va de mal en pis pendant que le ministère de tutelle distille des chiffres «imaginaires» relatifs au nombre de visiteurs reçus par an. L'Algérie a accueilli, selon le premier responsable du secteur du Tourisme, Smaïl Mimoune, 2,5 millions de visiteurs en 2011. A elle seule, la wilaya de Tamanrasset en a reçus 35 000, a indiqué la direction du tourisme de la wilaya lors de la dernière session de l'Assemblée populaire. «On a la berlue, peut-être, car on se demande d'où viennent ces chiffres. Pendant les plus belles saisons touristiques, on n'a jamais atteint ces résultats. La saison 2011-2012 est plus catastrophique que celle de 2003 quand s'était produit l'enlèvement de 32 touristes étrangers à Tamanrasset. En tout cas, les 84 agences de voyages activant dans la wilaya se demandent comment 35 000 touristes puissent passer inaperçus. Maintenant si les missionnaires, les Chinois qui réalisent des projets à Tamanrasset et les transitaires sont considérés comme touristes, c'est une autre paire de manches. Pour nous, un véritable touriste est celui qui génère de l'argent et contribue à la promotion de l'économie locale. Les touristes qui ont visité Tamanrasset peuvent être comptés sur les doigts d'une main et le bagagiste qui travaille à l'aéroport peut, lui, corroborer cela. Les agences les plus chanceuses ont fait deux à trois voyages pendant toute la saison. Le bilan de l'année 2011 est négatif», s'indigne Sollah Mohamed, vice-président de l'Association des opérateurs en tourisme à Tamanrasset. Lors d'une réunion qui s'est tenue récemment avec le conseiller du ministre du Tourisme, les responsables des agences de voyages se sont plaints du vide touristique qui a poussé nombre d'entre eux à mettre la clef sous le paillasson. «Nous lui avons remis un compte rendu exhaustif sur la situation du tourisme saharien et de l'embargo qui frappe l'ensemble des agences de cette wilaya du Grand Sud. Nous avons soulevé le problème des visas qui se pose toujours. Beaucoup d'étrangers ont déjà fait leurs propositions et d'autres se sont inscrits pour les vacances d'automne. Toutefois, ils se trouvent bloqués à cause de la lourdeur des procédures imposées par les autorités compétentes. La solution que le conseiller nous a suggérée est de conclure des contrats de coopération avec les tours opérateurs étrangers pour organiser des voyages collectifs. Cependant, nous n'étions pas d'accord parce que la majorité des touristes viennent visiter notre région individuellement. Avec l'évolution de la technologie de communication, le touriste n'a plus besoins de passer par un tour opérateur européen pour venir à Tamanrasset. Il contacte directement l'agence de son choix et entame ses démarches sans charges ni frais supplémentaires», a ajouté M. Sollah qui a, au passage, dénoncé l'absence de culture de communication entre le ministère de tutelle et les agences touristiques de l'Ahaggar, lesquelles crient à la marginalisation. «Nous ne sommes pas informés à temps de ce qui se passe au niveau de notre ministère. On ne reçoit l'information que tardivement. Nous avons raté plusieurs salons du tourisme juste parce qu'on nous a informés à la dernière minute. Le pire, à notre grand étonnement, c'est qu'aucune agence de voyages de Tamanrasset ne figure sur le site électronique créé par le ministère pour établir le contact avec l'ensemble des opérateurs touristiques du pays», se lamente-t-il. Lassoui Kamel, délégué régional du premier tour opérateur national, l'ONAT, a pour sa part indiqué que le nombre de touristes accueillis en 2011 est de 250 nationaux et 50 étrangers. «C'est vrai que les instances supérieures concernant l'activité touristique misent sur le tourisme national. Mais si l'on tient compte des quelques petits groupes de visiteurs reçus, on ne peut guère parler du travail de tourisme. Certes, on a beaucoup travaillé pour la promotion du tourisme national eu égard à la situation de crise qui prévaut dans les pays voisins et qui a fait que nos partenaires se sont abstenus. Les voyages organisés sont cependant insuffisants pour atteindre les objectifs assignés», dit-il. Pour remédier à cette situation, une campagne de vulgarisation a été menée tambour battant par l'ONAT. A l'initiative de son directeur général, fraîchement installé, un voyage promotionnel a été organisé dernièrement au profit des directeurs régionaux et centraux et des chefs d'agences affiliées à l'ONAT. A la même occasion, une journée de travail a été prévue pour débattre de la gestion de l'office dans son ensemble, des résultats réalisés durant l'année 2011 et des prérogatives envisagées à l'horizon 2013. «La journée de travail est réservée uniquement aux cadres de l'ONAT qui ont été conviés à un voyage de rêve au cœur du Tassili n'Adjer et de l'Ahaggar. On a fait une visite de trois jours à Djanet et de deux jours à Tamanrasset à l'effet de leur faire découvrir les plus beaux sites de notre Sahara. L'objectif est de montrer ainsi à ces vendeurs de produits touristiques ce qu'ils doivent commercialiser sur le plan international mais aussi sur le plan national qui suscite un intérêt particulier compte tenu de la situation actuelle de nos frontières», a conclu M. Lassoui.