Une mission de contrôle dépêchée par l'inspection générale est en train de passer au peigne fin tous les dossiers de déclarations d'importation de véhicules et ce depuis 2001. Selon nos sources, les premiers résultats font apparaître quelque 3000 dossiers concernés par la double déclaration d'importation de véhicules de moins de trois ans, dont la plupart sont de type grosses cylindrées. L'importateur déclare une première fois en présentant uniquement les photocopies des documents dans le but d'avoir le montant exact des droits et taxes douaniers à payer. Grâce à la complicité de certains inspecteurs, il revient une seconde fois en présentant une autre déclaration, cette fois avec des droits et taxes largement minorés. La différence entre les premiers montants et les seconds varie de 50 000 DA jusqu'à 300 000 DA, nous a-t-on expliqué auprès des mêmes sources. A ce jour, les premiers dossiers ouverts par l'inspection ont fait ressortir un préjudice de près de 320 millions de dinars. Un chiffre qui risque de connaître une hausse importante au égard à l'importance des dossiers touchés par la double déclaration. Une source douanière a indiqué : « L'ouverture de ce dossier a été décidée par le directeur général des Douanes, lequel en a fait une affaire personnelle puisqu'il suit de très près le déroulement des investigations. » C'est la deuxième fois, en moins de deux ans, que le port d'Alger se trouve au centre d'un scandale lié au détournement des droits et taxes douaniers. Le premier a fait l'objet d'une enquête judiciaire, engagée par le tribunal de Sidi M'hamed, lequel a, à l'issue d'une expertise judiciaire, fait état de 308 dossiers d'importation de véhicules n'ayant pas fait l'objet de déclaration de versement des montants des droits et taxes entre 1999 et 2004, alors que les propriétaires concernés se sont acquittés de ces montants. Ce qui représente, selon l'expertise, un préjudice de 66 348 792 DA, soit plus de 6 milliards de centimes. Le procédé utilisé pour détourner ces sommes est un jeu d'écritures sur micro pour effacer les numéros de quittances de paiement du journal comptable. « Cette recette était gérée d'une façon anarchique, marquée par le laisser-aller et la déliquescence. Pour preuve, le recours des agents de la caisse à des cachets qui ne sont dotés d'aucun signe qui permet d'identifier l'auteur de la signature. Ce qui est très grave pour le service. Pis encore, ces mêmes cachets ne sont même pas enregistrés dans le registre officiel des cachets (...) », a écrit l'expert judiciaire dans son rapport. Il a relevé plusieurs autres anomalies dans la gestion du personnel de la recette et son contrôle par la hiérarchie, allant jusqu'à s'interroger sur le fait que « des véhicules importés en 2000 ne soient dédouanés qu'en 2004, sans que les responsables réagissent, alors que la loi exige que le dédouanement se fasse dans les 8 jours qui suivent l'introduction du véhicule sur le territoire national faute de quoi, il sera saisi. Toutes ces défaillances sont le résultat du laisser-aller et de la mauvaise gestion de cette recette par ses responsables qui n'obéissent à aucun contrôle de l'inspection régionale, ce qui a conduit au détournement de ses fonds ». De nombreux inspecteurs ont été convoqués et certains inculpés dans le cadre de cette affaire, alors qu'une nouvelle équipe avait été installée à leur place. Une équipe vite éclaboussée par l'affaire des détournements des droits et taxes liés à l'importation des véhicules, notamment ceux dits grosses cylindrées. Entre le premier scandale et le second, les services des Douanes d'Alger-Commerce ont fait l'objet d'un mystérieux vol entouré de nombreuses interrogations. Des individus, probablement au nombre de quatre, selon des sources proches de l'enquête, se sont introduits dans la salle des machines du système informatique à travers un tunnel qu'ils ont creusé entre cet endroit et le parking Bounetta (séparé par un mur en parpaing) pour prendre des dossiers de dédouanement de véhicules, mais aussi la mémoire centrale du système informatique et deux compteuses de billets. Les voleurs ont choisi le vendredi pour agir, certainement pour bénéficier de la complicité de certains agents qui, faut-il le préciser, étaient tous absents des lieux. Même si certains documents volés ont été retrouvés, il reste néanmoins de nombreuses interrogations, auxquelles aucune réponse n'a été donnée. Comme par exemple comment expliquer qu'un service aussi important soit hébergé dans des locaux loués auprès d'un privé et de surcroît situés en dehors du périmètre de sécurité du port d'Alger. De nombreux observateurs n'ont pas hésité à faire le lien entre ce vol et le scandale du détournement des droits et taxes douaniers, puisque ce sont probablement les traces des premières déclarations des grosses cylindrées qui intéressaient les voleurs.