Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
«Des promesses loin des compétences de l'APN» Docteur Sahel Makhlouf. Politologue et chercheur associé au Centre de recherches sécuritaires et stratégiques
-Les discours des partis politiques durant cette campagne sont empreints de populisme et de beaucoup de promesses. Pensez-vous qu'ils soient en adéquation avec les attentes du peuple ? Au départ et avant d'analyser le contenu des discours politiques véhiculés lors de cette campagne, il faudrait au préalable souligner le fait et constater que la classe politique actuellement en Algérie est composée structurellement parlant de deux catégories de partis politiques, une catégorie de partis anciens qui activent depuis un certain nombre d'années et la deuxième qui est composée de partis politiques nouvellement créés dans le sillage des dernières réformes politiques engagées dans le pays . Idéologiquement parlant ces deux catégories se distinguent entre une catégorie islamiste et une autre non islamiste. Maintenant si au niveau des références politiques ces deux catégories divergent certainement, il reste qu'au niveau des références économiques, on peut trouver une sorte de convergence et cela malgré cette distinction idéologique citée auparavant, comme c'est le cas des partis islamistes et certains partis démocrates qui se réfèrent tous à des idées et des choix libéraux. On trouve également des partis politiques qui se réfèrent à certaines réflexions de gauche ou même de démocratie sociale. Partant de ce constat du paysage politique, cet ensemble d'éléments devrait influer théoriquement sur la typologie et la nature des discours politiques prônés par les partis et devrait aussi les rendre différents les uns des autres. Or, en revenant à la variable fondamentale de votre question, je dirais que des partis politiques ont développé un discours quasiment semblable et sont tombés dans le piège des promesses populistes et cela malgré l'importance capitale de ce rendez-vous électoral, exception faite de certains partis qui ont prôné un discours réaliste et compatible avec la nature du scrutin, à savoir l'élection de l'Assemblée populaire nationale et relativement en adéquation avec les attentes du peuple, ils ont également bien souligné l'importance de ces élections dans le contexte régional et international actuel. Cependant, il est indispensable de noter que les partis politiques se doivent de comprendre qu'ils ont un rôle assez important à jouer dans l'édifice d'une démocratie fonctionnelle en Algérie, et pour ce faire, il faut qu'ils soient fondés sur un programme et un projet de société clairement défini. -Le fait que les partis fassent des promesses dont la réalisation ne relève pas des compétences de l'APN, émane-t-il d'une volonté délibérée de tromper le peuple ? Je ne partage pas votre point de vue et je ne pense pas qu'il y ait une volonté délibérée de tromper le peuple comme vous dites, mais vous avez raison de dire que des partis font des promesses dont la réalisation ne relève pas des compétences de l'APN. Ceci relève, à mon avis, soit d'un manque de professionnalisme politique ou d'absence de clairvoyance ou peut-être même de méconnaissance des prérogatives attribuées par la Constitution au député, dont il est indispensable de souligner qu'elles sont très importantes du fait qu'elles consacrent et définissent le champ de compétence et domaines d'intervention du pouvoir législatif . Il y a lieu de mentionner aussi que l'Assemblée élue constitue un des cadres structurants les plus importants et les plus indispensables dans l'architecture institutionnelle démocratique, par ailleurs elle consacre la pratique de la démocratie participative quand elle résulte d'une citoyenneté active et consciente. -Au cours des dernières législatures, le rôle de l'APN a été marginalisé. Ces fonctions de légiférer de contrôler, ou d'enquêter sont peu ou pas exercées. A quoi cela est-il dû ? Chaque législature a sa particularité et dépend largement du contexte dans lequel elle est élue et évolue, toutefois concernant votre constat, je dirais que cela est profondément lié à la problématique du principe de séparation des pouvoirs qui constituent un levier impératif dans un système démocratique, dont la consécration effective contribue à l'approfondissement de l'exercice démocratique et la promotion de la démocratie en Algérie. Aussi et comme je l'ai souligné précédemment, l'APN constitue une des deux chambres du pouvoir législatif conformément à l'article 98 de la Constitution, en conséquence, elle dispose de larges prérogatives constitutionnelles qu'elle doit exercer pleinement pour rester fidèle au mandat du peuple et demeurer à l'écoute permanente de ces aspirations tel qu'il est souligné dans l'article 100 de la Constitution -Un système politique qui consacrerait la séparation des pouvoirs et permettrait à l'APN d'exercer ses fonctions, est-il possible en Algérie ? L'article 14 de la Constitution souligne clairement que «l'Etat est fondé sur les principes d'organisation démocratique et de justice sociale», et sachant que le principe de séparation des pouvoirs est un des piliers de tout système démocratique, de ce fait, on peut déduire que l'expérience démocratique entamée dans notre pays depuis 1989 et qui a connu une phase de réorganisation avec la constitution de 1996 a introduit ce genre de principes démocratiques dans la vie politique nationale. Il reste à mon avis que la concrétisation de ce principe d'une manière effective contribue à la promotion de la démocratie dans le pays et transformera certainement l'essence de la gouvernance. A partir du moment où parmi les missions confiées à la prochaine assemblée, il y a la possibilité de contribuer à l'amendement de la Constitution actuelle, ceci constitue une étape importante, dans ce cas, j'estime qu'il est du devoir des futurs élus de concevoir la Constitution comme un contrat social entre le gouvernant et le gouverné, qui consacre davantage l'Etat de droit, les droits de l'homme et la citoyenneté et approfondisse la démocratie en Algérie.