L'inexistence d'un centre d'enfouissement technique a fait que les déchets toxiques et les boues sont entreposés au sein de l'usine. L'entreposage et le stockage de déchets dangereux continuent de faire peser un danger sur la santé de la population comme sur l'environnement en général à Témouchent. Ainsi, sur une dizaine d'entreprises inspectées par les services de l'environnement, quatre présentent une situation alarmante. Il s'agit de l'unité de Trans-Canal de Chabat El Laham, la tannerie d'El Amria et les CCLS de Hammam Bou Hadjar et d'Aïn Témouchent. La tannerie à laquelle nous avions consacré un reportage en 2008 était même menacée de fermeture et de lourdes amendes, ce qui apparemment n'a pas été dissuasif. Dans un bulletin de la Direction de l'environnement, elle est menacée d'être destinataire d'une mise en demeure. Nos appels téléphoniques ont été vains en vue de recueillir plus amples informations auprès du responsable du secteur. On ne peut pas rater d'apercevoir la tannerie Tafna SPA si l'on emprunte l'évitement d'El Amria sur la RN2. Elle s'étale sur près du tiers de ses 49 000 m2. Mais ce qui frappe le regard, c'est surtout l'amoncellement à l'air libre de centaines de quintaux de déchets dits spéciaux car classés dangereux. À l'époque, en 2008, du côté de la Direction de l'environnement, on avait dégagé sa responsabilité en arguant que la réglementation avait été mise en œuvre. La tannerie aurait été soumise de régler une taxe annuelle d'un montant de 2 millions de DA sur la base de la quantité de déchets entreposés. Malgré cette lourde amende, cette entreprise publique, qui employait 85 salariés, ne s'est pas pliée à la loi. Elle n'avait ni acquitté la taxe ni déstocké ses déchets. Son PDG nous avait expliqué que la loi a été appliquée dans un sens coercitif alors que dans son esprit elle est plutôt d'essence incitative. Il avait également prétendu que tous les déchets solides stockés n'étaient pas nocifs, précisant que les déchets liquides, eux, étaient traités dans une station d'épuration mise en place en 1997 sur injonction du ministère de l'Environnement sous peine de fermeture. La nécessité d'une solution Les effluents liquides se composent des eaux industrielles chargées de produits chimiques en solution ou en suspension. Ce type de déchets est le plus dangereux parce qu'il est constitué de corps actifs tels les sulfures, le chrome, les sels, les acides et d'autres composants. Après traitement, l'eau est rejetée et les boues obtenues sont stockées. Mais, au bout du compte, ce traitement n'aura servi à rien puisque ces boues demeurées à l'air libre sont lessivées par les pluies, le ruissellement des eaux pluviales, récupérant alors le chrome et les autres produits chimiques, va polluer la nappe, la sebkha, les champs et le quartier voisin. Puis, à côté de ces boues, il y a tous les déchets résultant du process de fabrication du cuir. Ces derniers ne sont pas nocifs, assurait notre interlocuteur.Pour ce qui est des déchets de cuir non tanné, ils seraient biodégradables. Quant à ceux qui sont tannés, ils ne le sont pas car devenus imputrescibles puisqu'ils ont les mêmes caractéristiques que le cuir. Le chrome qu'ils contiennent est fixé par le tannage de la même façon qu'il l'est sur le cuir de toute chaussure. Enfin, notre interlocuteur expliqua que si les déchets toxiques et les boues sont entreposés au sein de l'usine, c'est parce que, d'une part, ils ne sont pas recevables dans les décharges publiques et que, d'autre part, il n'existe pas de centre d'enfouissement spécialisé : «Nous, on voudrait bien s'en débarrasser mais pour les jeter où ?» En outre, ajoutait notre interlocuteur, si la tannerie d'El Amria était auparavant la seule à l'ouest à produire des déchets, aujourd'hui, il y en a une dizaine, ce qui milite pour une solution globale dans la mesure où aucune entreprise ne peut supporter l'investissement nécessaire pour l'élimination de ses propres déchets. À quand une solution ?