Les officiels algériens tiennent à faire la lumière sur cette triste affaire. Plus de deux semaines après le refoulement «forcé» de trois ressortissants algériens de l'aéroport de Francfort alors qu'ils étaient en règle, le ministère algérien des Affaires étrangères rompt son silence. Dans une déclaration hier à l'APS, le directeur de la communication du ministère des Affaires étrangères, Amar Belani, a précisé que «le chargé d'affaires de l'ambassade d'Allemagne à Alger avait été convoqué afin de fournir des explications suite aux informations faisant état de mauvais traitements infligés par les autorités aéroportuaires de Francfort à des ressortissants algériens». Suite à cette première convocation qui aurait eu lieu le 16 mai, le diplomate allemand aurait, selon la même source, «fait montre de compréhension à l'égard de la réaction de la partie algérienne et s'est engagé à saisir immédiatement sa tutelle à ce sujet». Une première réaction officielle qui apaise quelque peu la colère des Algériens ayant été maltraités, sans raison valable, à Francfort. Aucune information n'a encore été fournie quant aux raisons de ces dépassements. Les trois Algériens refoulés au début du mois de mai de l'aéroport de Francfort avaient été contraints à payer des amendes de 150 euros chacun et à attendre trois jours durant dans des conditions inhumaines en zone franche avant d'être expulsés vers Alger sans explications et cela après avoir subi de longs et éprouvants interrogatoires. Les questions qui leur ont été posées ? Les interrogations les plus ciblées, relatives à d'éventuelles implications dans le terrorisme et de souhait d'immigration illégale, à leur goût vestimentaire en passant par leurs loisirs et mode de vie en Algérie. Le tout sur un ton inquisiteur et rabaissant. Restrictions sécuritaires dues au Printemps arabe, à la lutte antiterroriste ou à la lutte contre l'immigration clandestine, autant de raisons invoquées pour expliquer de tels agissements. L'atteinte à la dignité humaine est irréfutable, autant que la remise en question des principes de la libre circulation des personnes. Violation des règles régissant l'espace Schengen Ces trois Algériens – tout comme le groupe des 23 touristes également algériens ayant subi le même traitement l'an dernier à la même époque à Francfort – étaient pourtant en règle et détendeurs du visa Schengen. Ils remplissaient parfaitement les conditions d'entrée des étrangers dans l'espace Schengen édictées par le règlement (CE) n°562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen). Ils avaient en leur possession un document de voyage (passeport) en cours de validité permettant le franchissement de la frontière, un visa en cours de validité ainsi que les justificatifs de l'objet et des conditions du séjour. Dans l'article 5 régissant les conditions d'entrée dans l'espace Schengen, un seul élément peut justifier un tel dépassement : «Etre considéré comme une menace pour l'ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales de l'un des Etats membres et, en particulier, ne pas avoir fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans les bases de données nationales des Etats membres pour ces mêmes motifs.» Une appréciation qui ne peut se faire sans fondement. Des questions s'imposent donc : quelle menace peut constituer une jeune prothésiste dentaire de 22 ans, qui a déjà eu l'occasion d'entrer en l'Allemagne auparavant sans jamais être dérangée ? Des employés d'un ministère algérien voyageant dans un cadre professionnel peuvent-ils être accusés de constituer une menace pour l'Allemagne sans que l'Algérie officielle ne soit avisée par un tel rejet ? Quelles sont les limites entre l'application des règles en vigueur et le jugement discriminatoire envers une nationalité donnée ? Des réponses que devra apporter le chargé d'affaires de l'ambassade d'Allemagne en Algérie qui devrait être reçu au ministère des Affaires étrangères dès son retour en Algérie.