Le coup de starter a été donné lundi dernier pour la 8e édition du Printemps des poètes à la salle de spectacle du Centre culturel français d'Alger. Un quatuor de poètes, dont le seul souci est de cajoler le verbe bien senti, était de la partie, à savoir Inam Bioud, Lazhari Labter, Isabelle Pinçon et Ouhiba Adjali. Aussi, les poètes n'avaient pas à déclamer leurs vers devant des bancs vides. Les spéculateurs y étaient, « empaquetés » dans ce lieu par un improbable enseignant. Lequel voulait, à n'en point douter, faire bonne figure. C'est dire que les procédés d'une certaine époque ont toujours la peau dure. A part ce couac, la rencontre s'est tenue dans une ambiance bon enfant où le verbe châtié était là pour faire oublier les tracas du temps qui court. Inaâm Bioud, responsable de l'Institut de traduction arabe, a ouvert le bal et fait couler des larmes à bien des présents. Sa manière à elle de déclamer les poèmes nous replonge dans les réminiscences qu'on croyait évanouies pour longtemps. Ses poèmes en arabe sont d'une saveur inoubliable, dont nous nous efforçons, assurément sans y arriver, à reproduire la sonorité, tant le verbe est fort. Je serai un jour Et tu seras Mais Laisse-moi éclabousser tes tripes T'enlever Les incantations de la violence originelle Et fuir la demeure de la rime hantée Elle dira dans un ultime souffle, l'être aimé. Lequel formera avec Elle un Seul. S'excusant presque de ne pas avoir la voix d'Inaâm, Labter Lazhari, le journaliste s'est mu, l'espace d'un après-midi en aède. Ses deux plaquettes de poésie dans la main, il rejoindra la scène. Labter y compulsera ses poèmes qui ont fait grincer les dents aux spectateurs guère habitués à entendre des paroles d'une telle consistance. Il saura reproduire dans ses vers le « moi » tu de chacun de nous. On n'est nous que lorsqu'on rime, semble dire le membre du syndicat national des journalistes. Extrait de vers du recueil intitulé Le pied d'ébène de Bilkis sur le pavé de cristal, sorti en 2005 aux éditions El Ikhtilef Tu t'adonnas fille de rêve Aux jeux de l'amour Comme une innocente Eve Au premier matin du premier jour Goûtant à l'ivresse Du fruit défendu Et y revenant sans cesse Isabelle Pinçon, une Algérienne de naissance, fera, elle aussi, « entendre le bruit de frottement ». L'autre poétesse est Ouhiba Aboun Adjali. Elle interrogera la géographie pour exorciser les peurs et les tensions qui l'a guettent. Elle parlera pour cela de l'exil et du père chéri. Beaucoup sont partis Dans les jours sombres où s'engouffre le temps Partis sans savoir te quitter Et combien, caresse encore ta lumière Et ta beauté Alger la gueuse La fin de la rencontre était l'occasion trouvée pour les présents de dépoussiérer leurs carnets. Chacun voulant se surpasser. L'une des présentes, Talbi Hasna de l'INPS déclamera avec une voix enrouée ces vers puérils mais ô combien touchant ! Ô vie cesse de m'épuiser J'ai vécu plus qu'il me faut Cesse de me trahir et de me ruser T'as tué tout ce qui est beau Par ailleurs, un concours de poésie en langue française « Ecrivez ! » sera lancé en collaboration avec tous les CCF d'Algérie. Il ambitionne, soutient-on, de découvrir de nouveaux talents, de sensibiliser et d'encourager les jeunes à l'écriture poétique. Les résultats de la finale seront proclamés lors de la manifestation « Lire en fête » au mois d'octobre prochain et les meilleurs poèmes seront récompensés, signale-t-on encore sur le site Internet du CCF d'Alger.