Dernièrement, l'association des Amis de la rampe Louni Arezki Casbah, en partenariat avec le Festival national de la chanson chaâbie, en prélude à sa 7e édition, a organisé, avec la contribution des éditions Barkat, une soirée thématique consacrée à l'immense érudit «faquih» et lumineux poète du XVIe siècle : Sidi Lakhdar Benkhelouf. A travers cette action culturelle de proximité, sur un lieu chargé d'histoire, de traditions et de mémoire, le barde, prodige d'une époque culturelle reluisante, a été revisité dans la légende de son œuvre féconde et de son fabuleux parcours de visionnaire éclairé. Avec l'apport d'une conférence didactique animée par l'écrivain chercheur, Abdelkader Bendaâmache, des pans précieux de l'épopée de ce monument de la culture d'oralité algérienne qu'est la poésie incarnée par Sidi Lakhdar Benkhelouf, ont été exhumés de l'amnésie et de l'oubli. Pour une culture de proximité dans la Cité antique Le palais El Minzah, qui a abrité cette rencontre, s'est avéré très exigu pour une affluence exceptionnelle de femmes, d'hommes et surtout de jeunes venus très nombreux, parfois de la lointaine banlieue d'Alger, pour une soirée ramadhanesque, en dépit de toutes les contraintes et des veillées écourtées par le temps. C'est une véritable procession inter-générationnelle qui était au rendez-vous de la mémoire d'un événement qui a suscité un engouement particulier à la faveur de conviviales et chaleureuses retrouvailles des veillées d'antan. Un voyage au bout de la mémoire Ce soir-là, l'histoire a ressurgi à l'écho de ses repères de noms et de lieux, pour transposer un très nombreux auditoire avide de connaissances dans les splendeurs culturelles de l'univers du XVIe siècle. L'ombre des savants et humanistes «awliya essalihine» Sidi Abderrahmane d'El Djazaïr et Sidi Lakhdar Benkhelouf de Mostaganem a plané dans la symbolique d'épopées glorieuses de savoir et de résistance du peuple algérien. C'est en cette émouvante circonstance que la remémoration d'un épisode révélateur d'histoire de La Casbah, méconnu jusque-là de sa population, et partant, complètement ignoré de la jeunesse, a été célébré dans la ferveur d'une communion de pensée collective. En cet été de l'an 1558, après la glorieuse bataille de Mazagran, près de Mostaganem, et de la victoire sur les conquérants espagnols, Sidi Lakhdar Benkhelouf, qui a participé à ce haut fait d'armes, a séjourné à Alger, hôte avec une délégation de résistants venus en la circonstance informer Hassan Pacha Berler, bey de la Régence d'Alger de l'issue de la confrontation armée avec l'ennemi. Cette héroïque épopée a été immortalisée par l'émouvant poème d'une sublime beauté : Quesset Mezeghrane, versifié dans l'extase par le barde de légende et moudjahid, Sidi Lakhdar Benkhelouf, à la gloire de la bravoure historique de ses compagnons de lutte. Commémorer l'histoire de noms et de lieux : Casbah 1558 - 2012 C'est dans ce contexte que le mystique «prince des poètes», invocateur de profonde foi, s'est rendu au mausolée Sidi Abderrahmane Ethaâlibi pour accomplir, en fidèle disciple, un acte de dévotion à l'endroit de l'illustre saint savant qu'il vénérait. Cette véritable résurrection de la mémoire, qui a eu lieu dans la solennité du recueillement et de l'émotion sur les lieux mêmes de l'événement historique, a imprégné l'ensemble de l'assistance qui, unanimement, a éprouvé un sentiment de fierté à l'évocation de La Casbah et de son histoire pluriséculaire qui fut jadis une matrice civilisationnelle et culturelle féconde de la nation algérienne. L'impact marquant de cette mémorable soirée a fait apparaître essentiellement auprès de la jeunesse, présente en nombre, un désir ardent d'appropriation du patrimoine culturel qui constitue un legs de ses aïeux et de ses ancêtres. Pour la promotion du patrimoine de la littérature orale : l'école, l'université Dans le recueillement et la liesse du souvenir, le génie proverbial de Sidi Lakhdar Benkhelouf a ainsi été restitué à la mémoire collective de la très nombreuse assistance, qui a pu également redécouvrir un immense trésor patrimonial de la littérature orale et de la poésie algérienne dans son rayonnement à l'échelle maghrébine et arabe. Pour la pérennisation et la préservation de notre patrimoine immatériel d'oralité, ce segment culturel majeur d'une richesse incommensurable doit être projeté en direction de la jeunesse et des générations montantes. Dans cette perspective, l'école, les institutions éducatives et l'université seraient les vecteurs privilégiés et déterminants de cette salutaire et noble mission d'appropriation de pédagogie culturelle. Celle-ci doit être orientée vers la préservation de cette entité patrimoniale qui demeure le substrat multiséculaire des fondements socioculturels structurants de la personnalité algérienne.