La réunion des ministres arabes des Affaires étrangères, prévue hier à Djeddah, en Arabie Saoudite, a été reportée sine die sans explications de la Ligue arabe. Cette «réunion d'urgence» devait permettre de discuter du conflit et du remplacement du médiateur international Kofi Annan, qui a démissionné la semaine dernière après l'échec de ses efforts de paix. Le diplomate algérien, Lakhdar Brahimi, était pressenti pour lui succéder. Le concerné a néanmoins écarté, dans un entretien accordé samedi dernier à un site internet algérien, l'éventualité de reprendre du service. Malgré ce report, les chefs de la diplomatie des six monarchies du Golfe (Arabie Saoudite, Oman, Koweït, Emirats arabes unis, Qatar, Bahreïn) ont tenu à se retrouver dans la même ville pour aborder le sujet. La rencontre devait également servir aux pays du CCG à coordonner leurs positions en prévision du sommet islamique, prévu demain, dans le royaume à l'initiative du roi Abdallah d'Arabie Saoudite qui cherche à mobiliser le monde musulman en faveur du soulèvement en Syrie. La démarche de l'Arabie Saoudite est activement soutenue par Washington qui ne désespère toujours pas aussi de parvenir, à brève échéance, à renverser Bachar Al Assad. Pour réaliser cet objectif, l'administration américaine compte beaucoup sur la Turquie. A ce propos, la responsable de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, a déclaré samedi dernier, à Istanbul, avoir évoqué des plans opérationnels avec la Turquie, afin «d'accélérer la fin de l'effusion de sang et du régime Al Assad». «Nous continuons à accroître la pression de l'extérieur. Nous avons annoncé hier (vendredi, Ndlr) à Washington des sanctions destinées à exposer et à casser les liens entre l'Iran, le Hezbollah et la Syrie qui prolongent la vie du régime Al Assad», ajoute-t-elle. Mme Clinton n'a toutefois pas dit de quelle manière son pays et la Turquie comptaient casser ces liens. Clinton veut une zone d'exclusion aérienne Alors qu'on lui demandait si l'hypothèse d'une zone d'exclusion aérienne au-dessus du territoire syrien a été envisagée, elle a répondu par l'affirmative. «Les problèmes que vous avez soulevés dans votre question sont exactement ceux dont le ministre et moi-même avons convenu qu'ils nécessitaient une analyse plus approfondie», a-t-elle ajouté, même si elle a précisé qu'aucune décision n'était nécessairement imminente. Sur le front des combats, la situation restait toujours confuse, hier, à Alep. Les deux parties en conflit se sont livrées une guerre de communiqués pour revendiquer chacune des victoires sur l'autre. Quatre jours après avoir lancé son offensive terrestre pour déloger les rebelles qui s'y sont retranchés, l'armée syrienne a continué de pilonner plusieurs quartiers de la ville à l'aide de chars et d'avions de combat. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), les quartiers Chaâr, Tariq Al Bab, Hanano, Boustane Al Qasr et Salaheddine, secteur emblématique des insurgés où des combats ont lieu, sont la cible des violents tirs d'artillerie. Selon le journal officiel Al Watan, la voie vers le quartier Al Sukkari, deuxième bastion en importance des rebelles, «est désormais ouverte pour l'armée qui a pris le contrôle de plusieurs axes lui permettant de le prendre d'assaut». Bataille de communiqués Les insurgés de l'Armée syrienne libre (formée de déserteurs, de civils ayant pris les armes et de mercenaires originaires du Maghreb et du Moyen-Oorient) ont affirmé cependant avoir repris à l'armée des positions «stratégiques» à Salaheddine, après que l'armée ait dit contrôler totalement le quartier mercredi dernier. Des tirs ont été, en outre, entendus à Damas, alors que les localités proches d'Al Tal et de Harista étaient bombardées, d'après l'OSDH, une ONG basée en Grande-Bretagne qui dit tirer ses informations d'un réseau de militants et de témoins. Un journaliste de l'agence officielle syrienne Sana, Ali Abbas, a été assassiné samedi soir à son domicile dans la province de Damas, ont précisé l'agence et l'OSDH. Des accrochages avaient lieu par ailleurs dans la province de Deraâ (sud), berceau de la révolte déclenchée en mars 2011 contre le régime Al Assad. Cette contestation, d'abord pacifique, s s'est militarisée au fil des mois. La guerre civile dans ce pays a déjà fait, selon l'OSDH, 21000 morts, des dizaines de milliers de réfugiés et des centaines de milliers de déplacés. À Beyrouth, une source judiciaire a affirmé, hier, que le patron de la sécurité syrienne, le général Ali Mamlouk, est soupçonné par la justice libanaise d'avoir préparé des attentats au Liban, un dossier dans lequel a été arrêté l'ex-ministre libanais, Michel Samaha. Les observateurs au Liban soupçonnent le régime Al Assad de chercher à étendre la guerre. Affaire à suivre.