On ne peut pas toucher au crucifix de l'Assemblée nationale du Québec et s'en sortir indemne. Djemila Benhabib, une candidate d'origine algérienne aux prochaines élections québécoises qui se tiendront le 4 septembre, en sait quelque chose. Candidate du Parti québécois, un parti nationaliste de gauche et qui milite pour l'indépendance du Québec du reste du Canada, Djemila Benhabib a occupé le devant de la scène la semaine dernière lors de l'annonce par son parti de la charte sur la laïcité qui devrait, entre autres, interdire le voile islamique dans la fonction publique québécoise. Militante pure et dure de la laïcité, Djemila Benhabib a reconnu devant les journalistes que, pour elle, le crucifix qui trône au-dessus de la place du président de l'Assemblée nationale du Québec n'a pas sa place dans un Etat moderne. Bien que ce soit son avis, elle a déclaré qu'elle s'alignerait sur la position de son parti qui ne veut pas l'enlever. Il n'a pas fallu moins que ça pour que cette auteure de deux essais anti-islamistes, carrément islamophobes pour certains observateurs, Ma vie à contre-Coran et Les soldats d'Allah à la conquête de l'Occident, s'attirent les foudres du «très religieux» maire de Saguenay, à 500 km au nord-est de Montréal. «Nous, les Canadiens français mous, allons se faire dicter comment se comporter, comment respecter notre culture par une personne qui vient d'Algérie. On n'est même pas capable de prononcer son nom», a déclaré le maire Jean Tremblay qui est connu pour commencer les conseils municipaux par une prière avant que la justice canadienne le lui interdise. Les réactions de la classe politique québécoise ne se sont pas fait attendre pour défendre celle que la chef de son parti présente comme un «modèle d'intégration». Née en Ukraine, de mère chypriote grecque et de père algérien, Djemila Benhabib a toujours vécu en Algérie jusqu'à son départ forcé avec sa famille au plus fort de la décennie noire. Parachutée dans la circonscription de Trois Rivières, à 140 km au nord-est de Montréal où ses chances de devenir députée seraient plus grandes qu'à Montréal, elle pourrait devenir la première immigrante d'origine algérienne à accéder à ce poste qui lui ouvre aussi les portes d'un éventuel ministère de l'Immigration.