Séisme de 3,2 degrés dans la wilaya de Médéa    Une rencontre nationale sur la modernisation de l'école algérienne    Un champ d'exploitation inférant un manque à gagner au Trésor public    CAN-2025 U17 féminin à Oran: l'Algérie entame la compétition par une victoire devant le Burkina Faso 26-21    Le président de la République nomme les membres du Gouvernement conduit par Sifi Ghrieb    La santé à l'école    Une priorité absolue pour l'Algérie    Macron parachève le processus de remilitarisation de la France    L'Assemblée générale de l'ONU adopte une résolution en faveur de la solution à deux Etats    Elaboration d'une feuille de route fondée sur le soutien aux initiatives des associations dédiées aux personnes à besoins spécifiques    Triathlon-Coupe d'Afrique Open : L'Autrichien Perlt et la Hongroise Peszleg sacrés à Oran    Ligue 1 Le CRB s'est enfoncé dans le sable    CAN de hand U19 féminin : L'Algérie termine à la 5e place    Formation de cadres de la Sonelgaz par l'Université Abdelhamid Ibn Badis    Face à la concurrence internationale, évaluer objectivement l'impact de la Foire commerciale intra-africaine (IATF-2025) sur l'économie algérienne    Wilayas du sud du pays Pluies orageuses    Gendarmerie nationale Saisie d'importantes quantités de comprimés psychotropes et de kif traité    Vernissage de ''Traces et dialogues : chronologie'' de Farid Izemmour    Du 20 au 24 septembre à Constantine    Huit pays à l'affiche, la Palestine invitée d'honneur    La diaspora sahraouie en France réaffirme le droit inaliénable du peuple sahraoui à l'autodétermination    Aéroport international d'Alger: intégration des technologies de l'IA à compter de décembre prochain    Nasri reçoit l'Ambassadeur de la République Islamique d'Iran en Algérie    Premier ministre : le président de la République a donné des instructions pour être au service des citoyens et promouvoir l'économie nationale    Gymnastique/World Challenge Cup : l'Algérienne Kaylia Nemour en or, aux barres asymétriques    Ouverture de la session parlementaire : Boughali préside une réunion préparatoire avec les présidents des groupes parlementaires    Djamel Allam, un artiste aux multiples talents    Cause palestinienne : Boughali se félicite de l'adoption par l'Assemblée générale des Nations unies de la Déclaration de New York sur la solution à deux Etats    Hidaoui visite le camp de formation des jeunes médiateurs pour la prévention de la toxicomanie à Alger    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 64.871 martyrs et 164.610 blessés    Programme de financement des projets associatifs dédiés à la jeunesse pour l'exercice 2025 : 81 projets sélectionnés    Séisme de 3,6 degrés à l'est de Larba, dans la wilaya de Blida    L'expérience législative algérienne saluée à Lima    13e Festival international de la danse contemporaine: huit pays à l'affiche, la Palestine invitée d'honneur    AGNU: la Palestine salue l'adoption d'une résolution en faveur de la solution à deux Etats    Ligue 1 Mobilis: le MC Alger impose sa loi, le MC Oran nouveau co-leader    Programme TV - match du mercredi 29 août 2025    Programme du mercredi 27 août 2025    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«C'est l'écriture des noms qui cause le plus de dégâts»
Farid Benramdane. Docteur en sciences du langage
Publié dans El Watan le 08 - 09 - 2012

Chef de la division de recherche sur les systèmes de dénomination en Algérie au Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc), Farid Benramdane indique dans cet entretien que «la tradition onomastique algérienne, de souche berbère ou arabe, était différente du système français.»
- Pensez-vous que la question de l'identité ne sera pas encore résolue tant que les patronymes donnés durant la période coloniale n'auront pas été révisés par l'ensemble des Algériens ?

Effectivement, si on interroge l'identité algérienne à partir des données onomastiques (ou noms propres), la question de la formation des noms de famille (ou patronymes) dans notre pays est inévitable : soit nous voyons l'état civil comme un simple service administratif, soit on a une entrée multidimensionnelle et on le verra comme étant le dépositaire de la généalogie d'une société, dont «la filiation est établie depuis la plus haute Antiquité» (Dixit Lacheraf). Forcément, l'on évoquera un système de nomination traditionnel au travers des noms de lieux, de tribus, de personnes, de saints, etc. à leur lignage et à leur lointaine généalogie, séculaire, voire plusieurs fois millénaire, pour montrer en fin de parcours la gravité du déficit identitaire contenu dans les noms de famille, conséquences inconscientes et dévastatrices, opérées par la pensée coloniale française. L'autre génocide, culturel, dont on parle très peu.
Deux faits méritent d'être soulignés. Premièrement, la nomination dans cette région du monde, l'Algérie et/ou le Maghreb (l'Algérie est une unité politique, le Maghreb est une unité anthropologique) restitue une totalité irréductible de données de fonds sociologiques, démographiques, symboliques et linguistiques structurant une société dans la pluralité de son patrimoine historique et de ses parcours identitaires et culturels (libyque, berbère, punique, latine, arabe, espagnole, turque, française, etc.), de ses croyances religieuses et mystiques (païenne, juive, chrétienne, musulmane), de ses dimensions africaines aussi.
L'observation, sur la très longue durée, de ces faits de culture, au travers de ses noms propres, témoins fidèles et irrécusables, nous apprend à nuancer les certitudes et les «constantes» (thawabet) : l'amazighité, l'arabité, l'islamité sont et restent des composantes de l'identité nationale, l'Algérianité est une centralité, «trame des solidarités historiques» (Loi d'orientation sur l'éducation, 2008). Deuxièmement, le patronyme : la tradition onomastique algérienne, de souche berbère ou arabe, était différente du système français, patrilinéaire et matrilinéaire (touareg) pour la première, plus complète et systématique pour la deuxième, sous la forme : ism, alam, kunya, laqab, nisba. Prenons un exemple : ‘Abd al Rahmân Abou Zayd Walî al Dîn Ibn Khaldoûn al Tûnsî. Ici, deux approches sont développées dans les études, notamment celles de Yermeche et Parxymies, et à l'ouvrage collectif sous notre direction Des noms et des noms. Etat civil et anthroponymie en Algérie (Crasc, 2005).
Il y a celles et ceux (Soufi, Yermeche, Benramdane, Cheriguen, Benkada…) qui considèrent que le système de nomination traditionnel était archaïque, non économique et que la loi de 1882 (état civil) a introduit une certaine rationalité dans le système de nomination par l'imposition du patronyme : «rationalité coloniale», «syndrome nominal» «fracture du nom», «catégorie de la modernité civile», «processus redénominatif». Il est vrai que l'identification des personnes est beaucoup plus aisée avec le patronyme, dénomination dès lors commune et juridiquement invariable à toute une famille et sa filiation.
C'est, cependant, moins la validité intrinsèque de ce nouveau système de nomination qu'il faut analyser que les conditions historiques et administratives de son imposition, unique dans l'histoire ancienne et moderne de l'humanité. Le seul à avoir travaillé à un double niveau de la conscience dans un objectif de dislocation identitaire.
En France, le patronyme a connu une évolution historique «naturelle» d'une durée de dix siècles pour s'imposer comme catégorie de nomination. En Algérie, la constitution de l'état civil (était) et (devait) être «une œuvre de dénationalisation» (Ageron), c'est-à-dire «franciser plus résolument les patronymes indigènes pour favoriser les mariages mixtes». Il a été réalisé «en 13 ans à peine !»
- A l'heure actuelle, le changement de nom de famille doit être approuvé par la Présidence, et ce, pour les noms jugés obscènes et humiliants seulement. Pensez-vous que les modalités de changement de nom de famille doivent être facilités davantage (n'importe quelle personne désirant changer de nom peut le demander sans justificatif) ?

Des mesures ont été prises dès l'indépendance avec la suppression de l'innommable SNP (sans nom patronymique).
Ces demandes s'expliquent si on observe le corpus des noms dont souffrent beaucoup de nos concitoyens : Tahane, Kelb, Beghal, Ferkh, Khamadj, Zebiba, Chaddy, Rassenadja…
Mais la partie invisible de l'iceberg, c'est l'écriture des noms qui cause le plus de dégâts.
Des centaines de milliers de requêtes sont déposées chaque mois au niveau des daïras et tribunaux algériens. La «francisation coloniale», en touchant à la forme des noms, a atteint le signifié : ainsi, Farid devait devenir Alfred, Kaci/ Cassis, Naïma/Noémie, Adjemi/Eugene, Lahcen/Lancel, Slimane/Simon, Toumi/Thomas… (Quemeneur, 1963).
Il n'est pas étonnant que Belhoussine ait plus de 100 écritures en Algérie. Avec la numérisation (12 S), la mondialisation et son corollaire, la normalisation, en caractères latins, tolérant la circulation des biens et les personnes et interdisant la mobilité orthographique de leurs noms, la problématique a pris une dimension exponentielle. Il y a incompatibilité de gestion entre le refoulé historique et la modernité civile.
- Présentement, combien de noms de famille existent en Algérie?

Le seul répertoire (13 000 noms) que nous ayons entre les mains est celui établi en 1868 sous la direction de De Slane et Gabeau. Cependant, beaucoup de jeunes chercheurs (magistérants et doctorants) travaillent sur l'onomastique. Une unité de recherche au Crasc sur les systèmes de dénomination en Algérie (Rasyd) vient d'être agréée par le Mesrs (ministère de l'Enseignement supérieur) en 2012. C'est dire l'ampleur du travail à réaliser et le degré de (non) implication des institutions nationales dans la recherche onomastique.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.