Fidèle allié de Damas, Moscou a annoncé, hier, qu'il allait pousser le Conseil de sécurité de l'ONU à approuver l'accord de Genève sur les principes d'une transition en Syrie. Alors que les violences ont encore fait 136 morts vendredi, un consensus s'est dégagé au sein des ministres européens des Affaires étrangères, réunis à Chypre, pour renforcer les sanctions contre le régime de Bachar Al Assad. Sur le terrain, après environ 20 heures de combats, les forces loyalistes ont repoussé avec des chars et des hélicoptères une attaque rebelle contre une caserne à Hanano, à l'est d'Alep, où ils avaient réussi à entrer vendredi, selon des témoins. D'après une source militaire à Alep, métropole du Nord, théâtre de violents affrontements depuis le 20 juillet, les soldats ont réussi à détruire six véhicules tout-terrain où les insurgés avaient commencé à entreposer des armes prises dans l'armurerie «Les rebelles ont mis toutes leurs forces dans cette bataille car ils manquent cruellement d'armes», a précisé cette source. Les insurgés avaient, la veille, souligné que la prise de cette caserne était «cruciale», cette base étant utilisée par l'armée pour les bombarder. Les témoins ont indiqué qu'«il y avait beaucoup de victimes de part et d'autre». Néanmoins, les rebelles ne lâchent pas prise. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), ils ont pris pour cible, hier, un point de contrôle de l'armée dans la zone industrielle d'Al Layramoun (nord-ouest). Cinq assaillants ont péri et plusieurs membres des forces de sécurité ont été «tués et blessés». Moscou contre les sanctions Déterminées à écraser l'insurrection, les forces gouvernementales multipliaient de leur côté les bombardements contre des bastions rebelles, comme les quartiers de Hajar Al Aswad et de Tadamoun dans le sud de Damas, ou Boukamal, dans l'est du pays. Des combats meurtriers étaient également signalés, notamment dans la province de Deraa (sud) et à Homs, ville martyre dans le centre de la Syrie. Le conflit a même fait des victimes en Irak : une fillette a été tuée et quatre autres personnes blessées par des obus syriens près de la frontière, selon des sources militaire et médicales. Alors que les initiatives diplomatiques ont pour le moment toutes échoué à mettre un terme à la spirale de la violence, qui a fait 26 000 morts en près de 18 mois, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a indiqué que «la Russie plaidera pour que le Conseil de sécurité approuve le communiqué de Genève» lors d'une réunion fin septembre. Cet accord, adopté le 30 juin par le groupe d'action sur la Syrie, fixe des principes pour la transition dans ce pays, mais sans appeler au départ du président Bachar Al Assad. A l'issue d'une rencontre avec la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, à Vladivostok (Russie), le ministre Lavrov a dénoncé les sanctions unilatérales américaines contre la Syrie et l'Iran, estimant qu'elles «prennent de plus en plus un caractère extraterritorial qui touche aux intérêts des entreprises russes». La Russie a bloqué à trois reprises avec la Chine des résolutions occidentales à l'ONU menaçant le régime de sanctions. Mais Mme Clinton a répété que toute résolution devait «prévoir de réelles conséquences en cas de non-respect», comme des sanctions économiques, selon un haut responsable américain parlant sous le couvert de l'anonymat.
«Devoir d'ingérence» A Chypre, où les ministres européens des Affaires étrangères se sont réunis durant deux jours, un «consensus» s'est dégagé «sur l'augmentation des sanctions contre la Syrie», selon la chef de la diplomatie chypriote, Erato Kozakou-Marcoullis. «Si on veut faire bouger les choses, il faut qu'à l'égard du clan de Bachar Al Assad les sanctions soient renforcées», a souligné son homologue français, Laurent Fabius, en précisant que la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, allait «étudier» les mesures à prendre, avec l'aide des Etats membres. Le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, a évoqué de son côté le principe du «devoir d'ingérence» si aucun point d'ancrage ne peut être trouvé au Conseil de sécurité avec la Russie et la Chine. Selon lui, «le débat qui se pose est : est-ce qu'on laisse s'installer cette guerre civile (...) ou est-ce qu'on estime que le devoir d'ingérence doit à un moment donné prendre le dessus ?» «Est-ce qu'on reste dans le cadre du Conseil de sécurité, et du veto, et pendant combien de temps ?», a-t-il jugé. Si devoir d'ingérence il y a, «il faut que ça se fasse avec les pays de la région», et donc en coordination avec les pays arabes. Après l'échec de son prédécesseur, Kofi Annan, le médiateur international, Lakhdar Brahimi, se rendra de son côté aujourd'hui au Caire pour des entretiens avec la Ligue arabe. Il souhaite aller à Damas dans les jours suivants, a indiqué son porte-parole.