Les éléments du puzzle qu'est l'attaque du consulat américain à Benghazi à l'aube du mercredi 12 septembre commence à délivrer leurs secrets. La piste d'un acte terroriste prémédité n'est pas à écarter. Deux jours après la tragique attaque de Benghazi ayant engendré quatre morts américains, dont l'ambassadeur américain en Libye Christopher Stevens, et au-delà des excuses libyennes auprès du peuple et du gouvernement américains, et des promesses américaines de préserver les relations avec la Libye pour ne pas laisser le terrain libre aux terroristes, des éléments de l'enquête se dévoilent progressivement permettant de mieux comprendre ce qui s'est passé. Ainsi, le recoupement des données fournies par les Américains, le ministère libyen de l'Intérieur et quelques témoins présents sur place permettent de dire que la tension est montée d'un cran entre manifestants et gardiens de l'ambassade lorsque ces derniers ont ouvert le feu pour protéger la bâtisse. Lequel incident serait à l'origine de l'envahissement du consulat par les manifestants. D'autre part, les recoupements confirment qu'il y a eu deux temps forts de cet incident : d'abord l'envahissement et le saccage des lieux, ensuite l'échange nourri avec différentes armes, auquel ont pris part des éléments de la sécurité libyenne. Un autre élément est évidemment acquis, c'est que le prétexte de cette attaque fut le film américain portant atteinte au Prophète, rappelant étrangement l'incident de 2006 devant l'ambassade d'Italie en rapport avec les caricatures du Prophète. Toutefois, une question pertinente s'impose : y a-t-il préméditation ?
Chronologie Un responsable américain a reconnu lors d'une conférence de presse téléphonique organisée avant-hier par le département d'Etat « travailler dans la confusion des premières informations » car « beaucoup de détails sur ce qui s'est passé à Benghazi restent inconnus ou pas clairs ». Il a toutefois dévoilé une « petite partie de la chronologie » de l' « attaque complexe » perpétrée contre le consulat de Benghazi mardi soir. Il est 22h en Libye lorsque l'enceinte des bâtiments abritant la mission américaine est visée par « des tirs d'extrémistes libyens non identifiés », raconte le responsable. Un quart d'heure plus tard, « les assaillants pénètrent dans le complexe, ouvrent le feu sur le bâtiment principal, déclenchant un incendie ». Les gardes de sécurité libyens et américains « ripostent ». A cet instant, l'ambassadeur Stevens, un responsable de la communication, Sean Smith, et un officier américain pour « la sécurité régionale » sont dans le bâtiment principal du consulat. Mais l'incendie, qui dégage « une épaisse fumée noire », les contraint à « se séparer » et à « essayer d'évacuer le bâtiment en feu », poursuit le responsable. « L'agent de sécurité régionale parvient à sortir, puis retourne avec un autre agent dans le bâtiment en feu pour porter secours à Chris (l'ambassadeur) et à Sean (communication) », explique le responsable, saluant « un effort héroïque ». Les deux hommes découvrent alors « Sean, déjà mort, qu'ils sortent du bâtiment ». L'ambassadeur Stevens est introuvable. Plusieurs officiers de sécurité tentent de retourner dans le bâtiment principal. Ils sont à chaque fois « repoussés par des tirs nourris et se mettent à l'abri dans l'annexe du consulat ». Les Américains reprennent le « contrôle du bâtiment principal vers 23h20 ». Puis, c'est « l'annexe » du consulat qui est mitraillée « pendant deux heures ». « C'est à ce moment-là que deux agents américains de plus ont été tués et deux autres encore blessés », selon le responsable. D'après son récit, « il est 2h à Benghazi lorsque les forces de sécurité libyennes nous aident à reprendre le contrôle de la situation ». « A un moment, au milieu de tout cela, et nous ne savons franchement pas quand, nous pensons que l'ambassadeur Stevens a été sorti du bâtiment et emmené dans un hôpital à Benghazi. Nous n'avons pas d'informations sur son état à ce moment-là », assure le responsable américain, ajoutant que « son corps avait été remis ensuite à des agents américains à l'aéroport de Benghazi ». Il ajoute :« Nous n'y voyons pas clair sur les circonstances entre le moment où [l'ambassadeur]a été séparé du reste du groupe dans le bâtiment en feu et le moment où l'on nous a indiqué qu'il était dans un hôpital de Benghazi. » L'attaque a fait au total quatre morts, MM. Stevens et Smith, deux autres Américains non identifiés, ainsi qu'entre trois et cinq Américains blessés. Des agents de sécurité libyens ont également été tués.
Le film accusé
Le film ayant suscité tous ces incidents et autres manifestations à travers le monde islamique, a été pourtant mise en ligne il y a 14 mois. La vidéo de L'Innocence des musulmans avait jusqu'ici été consultée 22.877 fois. Il aura suffi qu'une version sous-titrée en arabe apparaisse la semaine passée pour que les médias égyptiens s'en emparent et mettent le feu aux poudres. Mardi, le prédicateur Terry Jones, qui avait brûlé un Coran devant les caméras en 2011, déclenchant de sanglantes représailles anti-occidentales en Afghanistan, a annoncé qu'il projetterait l'extrait de 13 minutes à ses fidèles de l'église de Gainesville, en Floride. Reste toutefois à savoir s'il y a préméditation. Les Américains voient déjà la main d'Al Qaîda, surtout avec la date du 11 septembre et les propos de Dhawahri, insinuant la vengeance de Abou Yahia ellibi, l'un des chefs de la nébuleuse, tué dernièrement en Afghanistan.