La récente crise du gaz entre la Russie et l'Ukraine et la hausse des prix de l'énergie, pétrole et gaz confondus, ont amené les dirigeants des grands pays consommateurs à développer une vaste campagne diplomatique pour s'occuper davantage de la sécurité énergétique, élevée au rang de priorité. Par sécurité, les grands pays consommateurs entendent tout d'abord garantir leurs approvisionnements et éviter l'instabilité qui a apparu dans la crise sur les prix entre la Russie et l'Ukraine. L'autre volet de cette sécurité réside dans la stabilité des prix qui permet de mieux gérer les économies et empêcher la volatilité, source de beaucoup d'incertitudes économiques. Dans cet ordre d'idées aussi bien l'Europe que les Etats-Unis et même la Chine voient en la Russie un fournisseur incontournable. Le nouveau rôle que va jouer la Russie dans l'approvisionnement mondial peut se mesurer au nouveau statut que lui confèrent nombre de puissances, y compris en lui confiant la présidence du G8. La rencontre des ministres de l'Energie du G8 de Moscou a abouti sur un consensus entre la Russie et les USA, celui d'établir un plan mondial pour développer le nucléaire civil, sans risque de prolifération militaire. Dans la conjoncture actuelle, le nucléaire semble être la grande solution pour deux raisons. Celle du coût de l'énergie et celle de l'environnement. La concertation avec la Russie, qui date de plusieurs mois, est conçue aussi pour éviter que d'autres pays puissent utiliser cette filière à des fins militaires et voir ainsi le club des puissances nucléaires s'élargir. La possibilité de créer des sociétés mixtes a déjà été entrevue dans le cas de l'Iran. Pour dénouer le différend entre l'Iran et les pays occidentaux qui ont peur de voir ce dernier se doter de l'arme nucléaire, la Russie a proposé d'enrichir l'uranium en Russie à travers une société mixte. Les Etats-Unis ont déjà déclaré leur intention de relancer le nucléaire afin de répondre à leurs immenses besoins en énergie pour les prochaines décennies. Pour l'Europe, le problème se pose autrement puisque la filière du nucléaire n'est pas adoptée par tous les pays. En attendant, l'Europe a besoin d'être sécurisée pour son approvisionnement, notamment, en gaz, si le vieux continent n'a pas de problèmes avec la Norvège et l'Algérie qui sont les deux principaux fournisseurs de gaz avec la Russie. Avec cette dernière, l'inquiétude persiste surtout depuis la crise du début de l'année, lorsque la Russie avait fermé le robinet pour l'Ukraine, pays de transit aussi du gaz russe à destination des autres pays européens. Mais voilà, pour vendre du gaz, il faut le trouver sinon le produire en développant les gisements et en le transportant. Ce qui ne nécessite pas d'investissements énormes. « Marché libre » C'est le point sur lequel ont insisté les Européens lors de la réunion du G8. Européens et Américains ont insisté sur le principe du « marché libre ». Dans pareil cas, cela veut dire que la Russie est appelée à s'ouvrir aux investissements étrangers qui permettraient d'augmenter l'offre et éviter la crise de l'approvisionnement. Il est clair que le potentiel gazier de la Russie intéresse beaucoup les pays consommateurs qui y voient une source de garantie de leurs approvisionnements, mais aussi et surtout un potentiel énorme pour les grands groupes pétroliers et gaziers. Avec les plus grandes réserves de gaz au monde, environ 47 000 milliards de mètres cubes, soit dix fois plus que celle de l'Algérie, le premier producteur au monde de gaz avec environ 630 milliards de mètres cubes par an et premier exportateur de gaz au monde avec 200 milliards de mètres cubes par an, la Russie est courtisée par les plus grands pays consommateurs, y compris les Etats-Unis. Le président russe, Vladimir Poutine, a promis de faire des propositions pour un partenariat mondial lors du sommet du G8 prévu au mois de juillet à Saint-Pétersbourg et qui portera sur la sécurité énergétique mondiale. Dans son intervention, le président russe a déjà avancé deux principales propositions, la garantie pour les pays producteurs à travers des contrats à long terme et les échanges d'actifs entre entreprises. Le président russe a en fait réitéré la vision des pays producteurs et exportateurs de gaz défendue au sein de leur forum. Tant il est vrai que la sécurité énergétique mondiale ne peut être conçue à sens unique à travers la vision des pays consommateurs et de leurs compagnies.