Docteur ès Sciences, Maître de recherche, Abdelkader Harfouche s'occupe du département génétique et amélioration des arbres forestiers à l'Institut national de recherche forestière (INRF). Dans cet entretien, il affirme que restaurer la forêt est du domaine du possible tout en préconisant les bienfaits de la génétique. La dégradation du patrimoine forestier peut-elle être perçue comme une fatalité ? L'Algérie est en mesure de restaurer la flore forestière à condition qu'il y ait une volonté politique et administrative. Car il faut savoir que de la survie de ce patrimoine dépend l'avenir de l'homme dans ce pays où, ne l'oublions pas, le problème de l'eau se pose déjà avec acuité avec des cycles de sécheresse de plus en plus longs. Or la forêt est une réserve hydrique et un régulateur climatique, une véritable machine à fabriquer la pluie ; moins de forêts, moins de pluies. Les conséquences en seraient insupportables. Ce qu'il est urgent d'entreprendre, c'est d'impulser et de maintenir un rythme de reforestation d'au moins 50 000 ha/an, la superficie que nous perdons en moyenne chaque année à cause des incendies et du surpâturage, pour espérer maintenir le niveau actuel du taux de boisement dans le pays. Lors du lancement de la Journée nationale de l'arbre, le 25 octobre 2005, le ministre de l'Agriculture avait lancé officiellement la campagne 2005-2006 qui consiste en la plantation de 70 000 ha. C'est donc au-dessus des normes que vous préconisiez. C'est une très bonne chose. Un immense chantier qui n'interpelle pas uniquement la DGF mais d'autres acteurs comme les collectivités locales et qui doit être soutenu sur le plan scientifique par l'INRF. En tant qu'institut de recherche forestière, nous pouvons apporter les solutions à même de préserver cette richesse. En développant notamment la génétique forestière dont le concept de conservation s'est établi à partir des années 1950 dans certains pays développés. Il s'agissait à l'époque d'un lancement de programmes de sélection et d'amélioration des espèces forestières. Pour rester dans le sujet, je dois revenir sur une question que j'ai posée en préambule d'une étude faite en 2001 : Quelles sont les voies et moyens scientifiques et/ou techniques, dont nous pouvons disposer pour assurer la gestion ou, encore mieux, les gestions de ces ressources et quelles peuvent en être les perspectives ? D'ores et déjà, il convient de dire que le patrimoine forestier recèle encore des ressources génétiques qu'il est nécessaire de gérer efficacement au double point de vue de sa préservation et de son développement. Pour aussi un intérêt économique... Le développement des ressources génétiques peut être réalisé concrètement par le lancement de programme d'amélioration génétique pour des espèces d'intérêt économique ou social. Son but est la création de variétés améliorées pour des caractères recherchés par les utilisateurs du bois ou d'autres produits forestiers tel le liège ou paraforestiers tel l'alfa. Cela dit, la gestion des plantations expérimentales, déjà réalisées par l'INRF au niveau du domaine forestier, pose beaucoup de problèmes. La protection par une clôture s'est révélée insuffisante ; il est indispensable que ces plantations fassent l'objet de mesure de surveillance de la part des agents de l'administration des forêts. Les moyens de l'INRF permettent-ils de mener à bien les programmes de recherche ? Le budget annuel, tous chapitres confondus, de l'INRF, est de l'ordre de 1,4 milliard de centimes. Cette maigre dotation est à dispatcher également aux 14 stations régionales. Pour ce qui est de la documentation, outil capital pour la recherche, l'enveloppe consentie n'est que de 50 000 DA par an. Une bouchée de pain. En tant qu'institution scientifique et technique, partenaire incontournable de l'administration forestière et acteur avéré du développement durable en Algérie, l'INRF devrait bénéficier d'une rallonge à la mesure de ses ambitieux plans de charge. Il en va de l'avenir de la forêt algérienne.