Le secrétaire d'Etat adjoint américain chargé des Affaires du Proche-Orient, de l'Afrique du Nord et de la péninsule Arabique, David C. Welch, n'avait certainement pas tort d'insister, au cours de sa visite à Alger, le 14 mars, sur l'importance des changements que connaît actuellement le Moyen-Orient. Depuis l'invasion de l'Irak, l'accession au pouvoir de Hamas en Palestine, le changement de régime en Arabie Saoudite, l'assassinat de Rafik Hariri au Liban, la décision « irrévocable » de Téhéran de se doter de l'arme nucléaire, il n'est pas nécessaire de sortir de Saint-Cyr pour remarquer que cette région est devenue, en un temps record, un gigantesque échiquier sur lequel se jouent des parties passionnantes, mais néanmoins serrées entre les grandes puissances. Chacune d'elles y va de ses moyens, de ses arguments et, surtout, de son savoir-faire pour provoquer une redistribution des cartes susceptible de garantir à long terme ses intérêts. Pour mesurer l'intensité de ses parties menées entre « monstres » (Etats-Unis, Chine, Russie, Grande-Bretagne, France), il n'y a qu'à suivre le feuilleton interminable des batailles féroces que se livrent régulièrement leurs compagnies pétrolières pour mettre la main sur les grands gisements pétroliers qui sommeillent sous les pieds des Arabes. La situation n'est pas moins stressante au Maghreb. Cela surtout depuis que Washington et Pékin - récemment rejoints par Moscou - ont décidé de rattraper le retard accusé sur Paris dans la région. Une région réputée jusque-là comme étant la chasse gardée de la France. La course opposant actuellement ces capitales pour l'obtention des gros marchés est aussi sournoise que celle en cours au Moyen-Orient. Explication : si le contrat d'arment de 3,5 milliards de dollars conclu entre Alger et Moscou, destiné à remplacer le vieux matériel de l'ANP, n'a pas - du moins en apparence - irrité Washington, celui-ci (le contrat d'armement) paraît avoir, en revanche, agacé au plus profond certains partenaires européens de l'Algérie. La preuve : ces partenaires, qui n'arrêtaient pas, il y a peu de temps encore, d'assimiler à des paroles d'Evangile le processus de Barcelone et de prodiguer des sermons sur la prospérité partagée, n'hésitent plus aujourd'hui à présenter l'Algérie comme la nouvelle menace au Maghreb.Que le monde des affaires est cruel ! Les perdants en savent d'ailleurs quelque chose. Et dire que l'Algérie s'évertue à ne léser aucun de ses partenaires...