Washington s'intéresse au rapprochement entre l'Algérie et la Russie. Moins d'une semaine après la visite à Alger du président Vladimir Poutine, le secrétaire d'Etat adjoint américain chargé des Affaires du Proche-Orient, de l'Afrique du Nord et de la péninsule Arabique, David C.Welch, s'est déplacé en Algérie. Il a déclaré, hier, lors d'un point de presse au siège de l'ambassade des Etats-Unis à Alger, avoir eu d'« excellents entretiens » avec le président Abdelaziz Bouteflika, avec le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, et avec le ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui. Il a eu un déjeuner avec le secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, M. Lamamra, ex-ambassadeur d'Algérie à Washington. Jusque tard dans la soirée de lundi 13 mars, l'entrevue avec le chef de l'Etat n'était pas prévue. Selon des sources diplomatiques, les services de la présidence de la République n'avaient pas confirmé le rendez-vous avec Abdelaziz Bouteflika. David Welch n'a pas voulu commenter la récente décision de Moscou d'effacer la dette algérienne et d'établir un contrat de fourniture en armement. « Les relations entre l'Algérie et la Russie ou toute autre relation relèvent de la décision propre de l'Algérie. » Ce n'est pas aux Américains de décider de quoi que ce soit. Nous n'avons pas discuté de ce sujet aujourd'hui », a-t-il dit. Seulement voilà, ce haut diplomate américain a pris le soin d'ajouter : « J'ai demandé aux amis algériens quels étaient les résultats de la visite de M. Poutine en Algérie. Ceci pour pouvoir être en mesure de comparer les points de vue lorsqu'il s'agit de questions à caractère régional ou de problèmes régionaux. » Washington a-t-il l'intention de vendre des armes à l'Algérie ? « Si l'Algérie avait à demander à renforcer la coopération militaire, y compris l'achat d'armement, à ce moment-là cette question sera examinée quant au fond, à la substance », a indiqué David Welch. Le Fond ? Le représentant du département d'Etat a précisé que les demandes seront étudiées au cas par cas. « Rien ne nous a été demandé de précis. Mais si le cas se présentait, nous aurons à traiter la question avec respect et trouver des réponses aux nécessités exprimées », a-t-il répondu. Selon Donald Rumsfeld, secrétaire à la Défense, cité par les médias US après sa tournée maghrébine en février dernier, les Etats-Unis étudient actuellement la possibilité de vendre des armes et de la haute technologie militaire à l'Algérie. David Welch a précisé, hier, que l'Algérie et les Etat-Unis ont « une étroite coopération » en matière de lutte contre le terrorisme, « quel qu'il soit et là où il est ». « Nous estimons que la première obligation d'un gouvernement est de protéger ses citoyens (...) Il y a quelque chose qui apparaît à tout visiteur en Algérie : c'est que le pays a émergé, il est sorti des difficultés du passé. Il y a dialogue entre les Algériens sur les événements du passé et pour savoir sur ce qu'il y a lieu de faire. C'est aux Algériens de décider. Souvent, ce ne sont pas des décisions faciles pour les personnes concernées. Je respecte les décisions du gouvernement et du peuple algériens », a-t-il répondu à une question sur sur la mise en application de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. « Je voudrais être prudent et ne pas laisser entendre que le gouvernement des Etats-Unis a un rôle direct ou autre dans cette question. Nous sommes encouragés par les progrès qui ont été réalisés. Le gouvernement algérien a pris l'engagement de pousser plus loin les réformes. En général, nous encourageons cet état d'esprit », a déclaré David Welch, ex-ambassadeur américain au Caire. Selon lui, les relations entre l'Algérie et les Etats-Unis ont évolué rapidement et couvrent un large éventail d'aspects. « Nous avons un authentique partenariat », a-t-il précisé. A Alger, David Welch a discuté de plusieurs questions comme les relations entre Israël et la Palestine, « en particulier depuis les dernières élections (victoire du Hamas, ndlr) », la situation en Irak, la problématique du Darfour soudanais et l'évolution du dossier iranien. Il a reconnu l'existence de divergences : « Comme c'est le cas quand les relations atteignent un niveau de maturité et qu'elles sont fondées sur la confiance, nous sommes d'accord sur nombre de points communs. Sur certaines questions nous avons des points de vue différents », a-t-il déclaré. Invitation a été adressée à Mohamed Bejdaoui de rendre visite à Washington « dans un avenir proche et lorsque son agenda lui le permet », pour « poursuivre » les discussions sur les questions qui intéressent les deux pays. « La rencontre a permis d'examiner les questions qui intéressent et notre pays et notre région et le Moyen-Orient. Nous nous sommes retrouvés d'accord sur assez de points et je crois que c'est encourageant », a déclaré le chef de la diplomatie algérienne, cité par l'APS, après avoir reçu David Welch qui a discuté de la question du Sahara -Occidental avec tous ses interlocuteurs. Il a estimé important d'écouter le point de vue algérien sur cette question. « Cette question a été re-débattue au niveau des Nations unies. L'année dernière, je me suis rendu au Maroc, où j'ai écouté le point de vue des Marocains. J'ai également rencontré le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU. En leur qualité de membre permanent du Conseil de sécurité, les Etats-Unis sont très attentifs et suivent de près cette question. Nous estimons qu'il est important pour la stabilité et la sécurité de la région de parvenir à une solution », a-t-il indiqué. Interrogé sur les divergences de points de vue, notamment sur le dossier iranien, David Welch a trouvé naturel que cela arrive avec un gouvernement qualifié d'ami. « On peut être d'accord sur le fait qu'on ne veut pas voir plus de prolifération d''armes nucléaires, en particulier entre les mains d'un pays comme l'Iran. On peut ne pas être d'accord aussi et voter différemment au niveau de l'AIEA (...) Il ne faut pas s'arrêter de réfléchir uniquement sur les points de désaccord, mais de trouver la voie qui permet d'aller de l'avant », a-t-il déclaré. Selon lui, l'Iran doit accepter de faire siennes ses obligations liées au Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et respecter ses obligations par rapport à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). « Avec la partie algérienne, nous avons convenu que la meilleure façon d'atteindre cela serait d'emprunter la voie diplomatique, la solution diplomatique », a-t-il indiqué. Par le passé, David Welch s'était occupé du bureau des affaires du Proche-Orient au département d'Etat et était chargé de mettre en œuvre la stratégie politique des Etats-Unis envers l'Irak, l'Iran et la Libye, pays installés dans le fameux « axe du Mal » de Washington. Il a occupé plusieurs postes diplomatiques, notamment à Aman, Ryad et Damas. Après Alger, qu'il a visité pour la deuxième fois, David Welch se rend aujourd'hui à Tunis.