Ahmed Bedjaoui, le Mister (et non pas mystère) «cinéma» algérien, celui qu'on ne présente plus, l'enfant terrible de la télévision, journaliste, critique, auteur, conseiller, producteur, a 44 ans de cinéma au compteur l Et il ne fait ni figuration ni son «cinéma». L'actualité d' Ahmed Bédjoui est la parution d'un ouvrage de très bonne facture, signé aux éditions Chihab, intitulé Images et visages au cœur de la bataille de Tlemcen, cosigné avec l'artiste peintre, Denis Martinez. Hôte étrennant le tout premier rendez-vous de la saison du forum Mawid maâ Kalima (Rendez-vous avec la parole) de l'ONCI (Office national de la communication et de l'information), Ahmed Bedjaoui commentera son beau livre non sans émotion. Et pour cause ! Quand il plonge dans sa mémoire et autres souvenirs d'enfance, ses yeux s'embuent, la larme à l'œil ! C'est dire de la fébrilité de cette rencontre ponctuée par des images et visages. Pour ne pas dire des plans, des séquences mnémoniques. «Mon premier acte politique à 10 ans» «Images et visages est un story-board retraçant la révolution, la résistance, le nationalisme… Je ne parle pas de glorification. Un seul héros, le peuple entier. Je parle de ces anonymes torturés et assassinés par l'armée coloniale française. Des femmes battantes et combattantes ayant milité à leur corps défendant. Elles, belles et rebelles ! Et elles sont mortes pour un idéal, une cause ! Bien sûr, je raconte le Colonel Lotfi, un stratège de la guerilla urbaine. Tlemcen étant une ville-médina, son combat et sa bataille ne pouvaient qu'être urbaines par opposition au maquis épars. J'ai assisté à la grande mobilisation de la population de Tlemcen à l'issue de l'assassinat du Dr Benzerdjeb. Une immense mobilisation ! Cela m'a marqué. J'ai vu des gens mourir, prendre le maquis…Mon frère y est monté 1957…Mon premier acte politique je l'ai accompli à l'âge de 10 ans. C'était en mai 1954. Mon oncle m'a chargé de remettre d'urgence un petit mot sur papier kraft (celui de l'emballage à l'époque) à mon père qui faisait la sieste. Le message disait : Bien Dien Phu est tombé ! Cela voulait dire si les Français ont été battus en Indochine, donc ils le seront en Algérie ! Un message de bon augure dans mon enfance. C'est tout cela que j'ai voulu raconter dans cet ouvrage. Une mémoire sensorielle...», précisera Ahmed Bédjaoui. Camouflet anti-colonial La bataille de Tlemcen proprement dite est en fait un haut fait d'armes. Il s'agit d'une fausse patrouille (moudjahidine portant des uniformes de l'armée française) menée par le Colonel Lotfi, lors du ramadhan, et ce, durant 1h30. Les révolutionnaires avaient frappé au cœur du commandement militaire colonial… Un camouflet anti-colonial. Aussi, cet ouvrage est un hommage datant de 40 ans conçu à quatre mains, en tandem ou encore en binôme avec Denis Martinez, avec en prime une bonne intelligence culturelle où le trait cursif côtoie le trait d'humour et voir d'humeur, l'art pictural croise le cinéma.. Une émotion et une générosité dans ce beau livre. Images et visages au cœur de la bataille de Tlemcen. Editions Chihab (2012) Ahmed Bédjaoui et Denis Martinez.