Ouverts, jeudi, par le président de la République, les travaux de la Conférence nationale des avocats ont pris fin hier avec l'adoption des résolutions suivantes. L'adoption du discours du Président comme document de travail et de référence dans les travaux à venir, la promulgation d'un statut régissant la profession, la création d'une école pour les avocats dont la gestion du programme de formation sera assurée par l'Union du conseil des barreaux et, enfin, la mise en œuvre de tous les moyens pour renforcer le droit de la défense. Cependant, les propositions faites par les participants, notamment la participation de l'avocat dans toutes les étapes de la procédure, y compris dans les locaux des services de sécurité, l'élargissement du jury populaire afin qu'il soit majoritaire dans la délibération, la constitution d'une juridiction d'appel auprès du tribunal criminel et le droit de l'avocat de représenter le prévenu au niveau du tribunal correctionnel et de la cour pour les délits de moins de deux ans, n'ont pas été retenues. Cette rencontre, qui a regroupé plus d'un millier de participants, a été marquée par l'absence de nombreuses pointures des barreaux, notamment de Constantine, d'Annaba et d'Oran. Une absence volontaire, diront certains, « dans le but de ne pas cautionner le soutien des avocats à la charte pour la paix, décidée dans les coulisses par quelques membres de l'Union nationale des barreaux ». Invités à la conférence, une cinquantaine de représentants de barreaux européens, méditerranéens, américains et arabes, ont fait office de figuration, puisqu'aucun parmi ces derniers n'est intervenu. Par delà, même si le niveau de la majorité des communications était en deçà des attentes, il n'en demeure pas moins que la conférence a permis de lever le voile sur une profession qui malgré les avancées rendues possibles par la réforme de la justice reste très en retard et, surtout, marquée par une anarchie dans son fonctionnement global. A titre d'exemple, les honoraires des avocats ne sont pas fixes et n'obéissent, à ce jour, à aucune réglementation, comme c'est le cas dans tous les pays. Une situation qui parfois nuit à la crédibilité de la profession, notamment lorsque certains avocats, comme l'a si bien résumé un intervenant, courent derrière des considérations matérielles et financières et portent atteinte à la profession. La parole de cet intervenant a vite été coupée par les organisateurs, l'empêchant même de poursuivre son exposé. Le bâtonnier national, maître Sellini, a lui aussi fait ressortir, entre les lignes, cette anarchie qui gangrène sa corporation en l'expliquant par le fait que le projet de réforme qui a donné une grande place aux magistrats n'a rien prévu pour les avocats. « La justice n'est pas uniquement concentrée autour des juges, mais aussi autour des avocats, notaires, huissiers de justice et greffiers... », a-t-il noté. L'autre grande tare de cette conférence a été l'absence des avocats femmes à la tribune et dans le programme des communications. Ce qui a été sévèrement critiqué lors des débats. Même majoritaires au sein de la corporation, les femmes continuent à être exclues des débats. A ce titre, il est important de signaler que dans le conseil de l'Union nationale des barreaux siègent 13 bâtonniers hommes. Pour sa part, maître Issaâd, invité - qui a improvisé sa communication sur place parce que n'ayant pas été informé qu'il allait intervenir - est revenu sur l'historique de la commission nationale de la réforme de la justice, qu'il a présidée en 2001 et qui a proposé 507 recommandations. Il a appelé à « ce que l'avocat reprenne sa place dans la décision de justice. Nous avons besoin d'une justice transparente et forte. Il faut rééquilibrer les pouvoirs et appeler pourquoi pas à ce que l'instruction ne soit pas frappée du secret... » Maître Farouk Ksentini a plutôt axé sa communication sur le rôle des avocats dans l'application de la charte. Dans une allocution magistrale, maître Hadj Hamou, représentant du collectif des avocats du FLN, est revenu sur l'histoire de la guerre de libération à travers les avocats français et algériens qui ont défendu la cause du FLN et de l'ALN, dont une partie, comme maîtres Verges, Nicole Dreyfus, pour ne citer que ceux-là, était dans la salle. A signaler que les avocats ont honoré le Président en le nommant avocat honorifique. Une robe lui a été donc offerte par le bâtonnier national. Cette robe faite à Paris aurait coûté 12 000 euros.