Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, dont le département s'engage avec force à «éradiquer le commerce informel», estime «utile» le marché parallèle de la devise. Etrange paradoxe ! «On essaye de combattre ce genre de marché informel de la devise, mais les citoyens y trouvent leur compte. Je ne trouve pas d'inconvénient à ce qu'on le supprime ou on le laisse», a déclaré Ould Kablia, hier, lors d'une conférence de presse en marge de la rencontre nationale avec les cadres de l'administration locale tenue au Palais des nations à Alger. Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales ajoute que le marché parallèle de la devise «permet de prémunir contre la fausse monnaie». «Certes, c'est une activité illégale. Mais elle peut prémunir contre la fausse monnaie», déclare-t-il. «Le change qui se pratique dans ces marchés est à la limite correct par rapport au taux de change officiel», indique-t-il. Daho Ould Kablia qualifie également de «mineur» le problème que génère ce marché parallèle de la devise. A en croire le ministre de l'Intérieur, ce marché a encore de beaux jours devant lui, dès lors que «l'Etat n'est pas disposé à ouvrir des bureaux de change». Cet aveu du ministre de l'Intérieur va à l'encontre des analyses faites par les économistes et les spécialistes qui mettent en garde contre les dangers qui guettent l'économie nationale et qui peuvent venir de ce marché. En effet, les économistes et les experts de la finance sont unanimes à dire que l'existence d'un marché parallèle de la devise «nuit gravement à l'économie nationale». La circulation des grosses sommes en devises en dehors de tout contrôle des autorités monétaires met en danger la sécurité économique du pays. L'existence de ce type de marché permet, selon les spécialistes, la fuite massive de la devise vers l'étranger. Un sérieux problème donc qui nécessite une intervention des pouvoirs publics. Dans son intervention devant les chefs de daïra, des directeurs de la réglementation et de l'administration générale et des directeurs de l'administration locale, le ministre plaide pourtant pour la résorption du commerce informel. «Une nécessité impérieuse pour lutter contre la spéculation et la violence», a-t-il estimé. La lutte contre l'informel de «survie» devrait être accompagnée d'une lutte sans merci contre «l'informel prédateur». Elle passe nécessairement par l'assèchement des sources de son financement que représente, entre autres, le marché noir de la devise. Garder la neutralité de l'administration Par ailleurs, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales a exigé des cadres de l'administration locale de se mobiliser vigoureusement pour «réhabiliter le service public de qualité en mettant fin à toute forme de népotisme, de bureaucratie et de clientélisme afin de rétablir la confiance du citoyen en l'administration». Daho Ould Kablia a établi un constat désastreux en matière des services fournis aux citoyens. De son côté, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, affirme qu'il est «temps de corriger la situation en matière de gestion des affaires locales». «Beaucoup de choses ont été faites, mais les résultats ne sont pas satisfaisants, alors que les moyens financiers et humains sont disponibles. Il s'agit de changer les mentalités», martèle-t-il. Très critique lorsqu'il dresse l'état des lieux en termes de service public, M. Sellal trouve «insupportables les conditions auxquelles les citoyens sont soumis dans leur rapport avec l'administration». «Le fléau de la bureaucratie engendre la corruption», ajoute-t-il. Le Premier ministre a également «sommé» les cadres de l'administration locale à garder la neutralité à l'occasion des élections locales du 29 novembre prochain. «Jusqu'à présent, le climat dans lequel se déroulent les préparatifs de ces élections est acceptable, mais je dois vous rappeler que l'administration doit être neutre au maximum», avertit-il.