Les négriers des temps modernes font trimer ces enfants pour un salaire de misère, sachant qu'ils sont très pauvres et prêts à effectuer n'importe quelle corvée pour aider leurs parents. La wilaya de Tébessa connaît, ces derniers temps, une profonde mutation dans plusieurs domaines. Des projets structurels ont proliféré tous azimuts, induisant par voie de conséquence une forte demande en matière de main-d'œuvre ouvrière. Certaines entreprises ayant un grand mal à achever les petits travaux au niveau de leurs chantiers, embauchent, sans aucun scrupule, des enfants. Le phénomène de l'exploitation des enfants de moins de 18 ans, prend de jour en jour des proportions alarmantes. Ces enfants dans le besoin, sont corvéables à merci. En effet selon un rapport établi par une association locale, ils seraient plus de 500 enfants, dont l'âge varie entre 13 et 17 ans, à avoir été recensés dans des chantiers de bâtiment durant le premier semestre de l'année 2012. Leur nombre augmente en période estivale; ils ont recours à des petits travaux pour se faire un peu d'argent. Ceux-là, on les trouve notamment dans les marchés et dans les champs d'exploitation agricole. Ils travaillent également à leur compte, vendant des cigarettes au bord des routes, gardant des voitures dans les parkings, ou encore ramassant du plastique recyclable dans les décharges publiques. A Bir El Ater, des collégiens sont recrutés comme guetteurs par des contrebandiers. Parfois, ces enfants sont soumis à des travaux très durs, intolérables, qui mettent carrément leur vie en danger. Ceux qui les font trimer, savent que cette main-d'œuvre ne leur coûte pas grand-chose, surtout que ces enfants sont très pauvres et ne mangent pas toujours à leur faim; il sont donc contraints d'accepter n'importe quelle besogne pour aider leurs parents. C'est le cas de Mohamed, qui, âgé à peine de 17 ans, travaille avec son père, maçon dans un chantier de bâtiment au quartier Saâda, à Bir El Ater. Et un autre Halim, qui trime à SafSaf El Ouesra, de témoigner: «J'ai commencé à travailler à l'âge de 13 ans, au lendemain de la mort de mon père dans un accident, j'ai retroussé les manches et je travaille clandestinement dans cette sablière d'un proche depuis plus de 5 ans déjà ; je le fais pour mes deux frères scolarisés et ma mère. Ces enfants qui ne vont pas à l'école, sont soumis à des employeurs qui leur donnent un minable salaire journalier en contrepartie de tâches dures et pénibles qui portent préjudice à leur santé tant physique que mentale. Ils sont souvent exposés à des produits chimiques nocifs. Ahmed, ayant été manutentionnaire chez un revendeur de ciment, souffre d'asthme aigu suite à l'inhalation de poudre de ciment. Aujourd'hui, âgé de 22 ans, il nous fait part de ce qu'il a enduré: «Je trimais comme un esclave; je déchargeais plus de 400 sacs par jour, parfois plus, pour seulement 500 DA/jour, et du coup, je suis asthmatique.» Rencontré dans un champ d'exploitation de pomme de terre à El Ma Labiod, le jeune Halim est atteint d'une grave maladie de la peau après avoir manipulé des pesticides. «J'épandais des engrais à main nue, ce qui a fait apparaître des lésions rougeâtres sur ma peau», explique-t-il. Entre-temps, le massacre continue. Des enfants sont honteusement exploités, au-delà de toute raison, contre un salaire minable, et ce au et su de tout le monde. Les visites des agents de l'inspection de travail dans les chantiers et les exploitations agricoles, n'ont malheureusement rien changé à cet état de fait.