Les élections législatives en Israël s'ouvrent aujourd'hui sur fond d'incertitudes, car le scrutin n'est à l'évidence pas motivé par un enjeu de changement. La campagne électorale, animée pour l'essentiel par Ehud Olmert, Premier ministre par intérim, a mis au devant la rigidité israélienne par rapport à l'avenir de la région. Olmert, qui entend tirer avantage de la figure charismatique dans l'opinion israélienne d'Ariel Sharon, auquel il a succédé, a ainsi pesamment insisté sur la problématique des frontières et la nécessité impérative pour Israël de préserver son caractère juif. Ehud Olmert, conforté par les sondages qui créditaient son parti centriste, Kadima, d'une victoire aux législatives, envisage de dessiner définitivement les frontières d'Israël sans en référer aux dirigeants palestiniens. Cette unilatéralité que le Premier ministre israélien par intérim place sous l'égide d'Ariel Sharon lui paraît d'autant plus réalisable qu'il ne doute pas qu'elle aura l'aval des Etats-Unis. Assez explicitement, le successeur d'Ariel Sharon se propose d'enfermer la Palestine dans des limites territoriales qu'Israël aura définies et qui ne pourraient être négociables, car Ehud Olmert juge que l'unilatéralité, dont Ariel Sharon s'était posé en champion, est la seule stratégie possible. Ehud Olmert a calculé qu'il lui faudrait près de quatre ans pour finaliser le tracé définitif d'Israël et pour parvenir à séparer l'Etat hébreu de la Palestine. Ehud Olmert et le parti Kadima ont ainsi travaillé sur le thème récurrent dans l'argumentaire politique israélien du choc démographique, étant entendu qu'Israël a toujours entretenu la peur de succomber sous le poids du nombre de la population palestinienne. C'est ce qui a conduit les administrations qui ont dirigé Israël à mettre en œuvre des mesures coercitives contre les Palestiniens et surtout à refuser d'entendre parler du droit au retour. L'arrivée au pouvoir d'Ariel Sharon, et sa vision d'un Israël séparé - avec à la clé l'édification du mur de la honte - a marqué un recul significatif des efforts de dialogue engagés avec la bénédiction de la communauté internationale. La démarche de Sharon visait dans le même temps à isoler et à affaiblir l'Autorité palestinienne, sous Yasser Arafat, puis avec Mahmoud Abbas. La méthode Ariel Sharon paraît être la voie royale pour son successeur Ehud Olmert qui a fait de la sécurité d'Israël le mot-clé de sa campagne électorale. L'essentiel consiste pour lui à verrouiller l'Etat palestinien dans un territoire en forme de peau de chagrin, variante du bantoustan, qui ne lui laissera aucune marge de manœuvre et aura pour finalité de le rendre totalement dépendant du bon vouloir d'Israël. Ehud Olmert, qui se revendique d'Ariel Sharon pour l'accomplissement de cette stratégie, compte sur la charge symbolique et émotionnelle qui entoure le fondateur de Kadima pour forcer la décision des électeurs israéliens. Il table que ceux-ci lui assureront la confortable majorité qui lui est indispensable pour gouverner seul. Pour le reste, Ehud Olmert compte bien que les Etats-Unis continueront de fournir à Israël les ressources financières qui lui permettront de mettre en application son programme électoral. Car le Premier ministre israélien n'ignore pas que les frontières, dont il envisage de doter Israël - s'il est élu pour les prochaines années - auront un prix que ne pourront pas payer les contribuables israéliens rattrapés par un seuil de pauvreté grandissant. Comme Ariel Sharon avant lui, Ehud Olmert, s'il devient Premier ministre israélien par le biais des urnes, devra tendre la main à la généreuse Amérique, dont l'ombre plane sur ces élections législatives israéliennes.