Le parti centriste Kadima, créé en un tour de main par Sharon avant qu'il soit rattrapé par la maladie, a remporté une courte victoire aux élections législatives israéliennes et, contre toute attente, son chef Ehud Olmert se dit prêt à des concessions territoriales et à des négociations pour permettre la création d'un Etat palestinien ! C'est que durant la campagne électorale, Olmert, que Sharon avait désigné comme son dauphin, avait tenu un tout autre langage. Fidèle à la ligne de son sponsor, il avait juré de ne pas prendre langue avec le gouvernement palestinien aux couleurs de Hamas et de tracer lui-même les frontières dans la Cisjordanie, en procédant à un démantèlement de petites colonies et à l'annexion des grands blocs d'implantation. Le chef du gouvernement palestinien, Haniyeh, qui n'avait pas cessé de mettre en garde Olmert contre son plan unilatéral, devait, lui aussi, déclarer devant les députés palestiniens sa disponibilité à reprendre les négociations dans le cadre du quartette international. L'annonce avait été faite au moment où le Parlement l'investissait le jour des législatives israéliennes ! Tout un symbole. Les deux protagonistes ont ainsi chacun, pour sa part, coupé la poire en deux. Olmert va-t-il prendre langue avec Hamas ? La question semble éludée dès lors que le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, devait finir par frapper sur la table pour mettre en garde Hamas et réaffirmer que la conduite des Affaires étrangères relevaient de sa seule compétence. Ce qui a fait baisser la pression exercée par les donateurs occidentaux, Washington et Bruxelles principalement, qui menaçaient de couper les vivres aux Palestiniens. Washington a certainement joué un rôle dans le retournement d'Olmert dont les premiers mots ont été adressés aux Palestiniens. “Je suis prêt à renoncer au rêve d'un Grand Israël, à évacuer les Juifs qui vivent dans des implantations pour vous permettre de réaliser votre rêve d'avoir un Etat”, a-t-il dit, fondant ses espoirs sur Mahmoud Abbas. Mais, il n'y a pas que les pressions internationales. Les résultats des législatives laissent entrevoir une forte lassitude chez les Israéliens, pressés de voir se concrétiser la paix. Kadima, qui a remporté 28 sièges sur 120, pourra gouverner avec les travaillistes (20 sièges) et d'autres formations du centre dont les retraités, trois listes arabes (10 sièges, pour un million d'Arabes israéliens), qui ne demandent qu'à rejoindre une coalition capable d'arrêter la guerre avec leur voisin. Les partis hostiles à l'idée même d'une entité palestinienne se sont plantés. Le parti orthodoxe sépharade Shass, qui fantasme sur le Grand Israël, n'a récolté que 13 sièges. L'ultra-droite russophone, Israël Beiteinou, qui veut jeter les Arabes de l'autre côté du Jourdain, 12 sièges. Le Likoud, parti historique à l'origine de l'Etat hébreu, n'a recueilli que 11 sièges. Sa cuisante défaite n'est pas due qu'à Netanyahu, raciste notoire et sulfureux ex-Premier ministre. Les troupes du Likoud avaient massivement rejoint Kadima. Le scrutin de mardi signe de ce fait l'effondrement des ultras et de la droite nationaliste opposés à toute perspective de dialogue avec les Palestiniens. D. Bouatta