En inaugurant, dimanche dernier, sa nouvelle ligne Paris Charles de Gaulle vers Alger, la compagnie française Air France porte à trois ses fréquences quotidiennes au départ d'Alger vers Paris. « C'est un nouveau élément de fierté pour nous, car nous branchons Alger avec le plus puissant réseau qu'est le hub de Charles de Gaulles », dira Etienne Rachou, directeur général d'Air France pour la zone Europe et Afrique du Nord. Et d'ajouter : « Il était temps de rajouter un vol sur Paris, puisque notre clientèle est intéressée aussi bien par Paris que par les correspondances possibles qu'offre le Hub de Roissy Charles de Gaulles (CDG). En arrivant à 17h30 à Paris, on offre à nos clients algériens toute une palette de dessertes aux Amérique, Asie, Europe...etc. » Loin de constituer une simple liaison de plus entre Alger et Paris, la spécificité de cette nouvelle fréquence réside dans le fait qu'elle permet de relier Alger avec le plus grand Hub d'Europe en terme de trafic. 17 900 correspondances hebdomadaires « Cette nouvelle ligne en liaison directe avec le Hub de Roissy permettra de répondre à la demande en croissance et accompagnera ainsi tous les projets de tourisme et d'affaires au départ d'Alger vers plus de 189 destinations dans le monde », dira M. Rachou, pour qui « il y a un boom de la demande du transport aérien en Algérie, et qui dénote d'un dynamisme économique certain ». Le hub est un terme anglais signifiant « moyeu », où arrivent et d'où partent les rayons d'une roue. Inauguré en avril 1996, le hub de Roissy CDG, dont les aéroports de Paris (ADP) est le propriétaire et gestionnaire des installations aéroportuaires, est une véritable fourmilière. Répartis en 6 plages de rendez-vous, c'est un trafic de plus de 830 vols par jour et qui offre plus de 17 900 opportunités de correspondances hebdomadaires dans les deux sens, selon Luce Marc, la chargée du département presse du hub. 76 300 passagers par jour, entre arrivées et départs et quelque 23 900 passagers en correspondance par jour, soit plus de 53% du trafic, selon notre interlocutrice. Le hub emploie 8000 salariés. C'est dire que l'insécurité, ayant régné sur l'Algérie des années durant, aura certainement privé de relier Alger au reste du monde. Etienne Rachou, dira à cet effet, que comparativement aux pays voisins, « le marché algérien n'est pas au niveau de ce qui se fait avec le Maroc et la Tunisie qui sont déjà branchés ». « N'oublions pas que nous n'avons repris nos vols sur Alger que depuis 2003 », a-t-il tenu à préciser. M. Rachou semble ne pas aimer exhiber les bénéfices que fait le transporteur aérien français. A notre question de savoir ce que pèse la destination Algérie pour Air France, il a eu cette réponse : « Le marché algérien pèse 1% des lignes européennes, lesquelles représentent 25% du total d'Air France. » Et à propos de la nouvelle aérogare d'Alger, dont la gestion est confiée à ADP, le partenaire d'Air France, Etienne Rachou considère qu'elle « représente un service amélioré pour nos clients ». Et les responsables d'Air France à Alger semblent piaffer d'impatience de voir la mise en service de cette infrastructure. Et pour cause, la compagnie ne compte pas rester en Algérie, marge de la forte montée en puissance des e-services d'Air France dans le monde : + de 110 % de vente sur Air France.fr. 10 000 enregistrés par jour sur les bornes libre-service, à en croire les chiffres communiqués par la compagnie en fin d'année 2005. « Le e-service sera opérationnel chez Air France dès l'ouverture de la nouvelle aérogare d'Alger », dira Roland Fischer, le directeur commercial d'Air France à Alger. La généralisation du billet électronique étant l'un des points-clés du programme de réduction des coûts entrepris par l'IATA en 2004, baptisé « Simplifier les affaires ». L'enjeu est de taille pour les compagnies aériennes frappées de plein fouet par la flambée des prix du pétrole. Et M.Fisher d'indiquer : « Sur une ligne où est entré en vigueur le billet électronique, il faudra payer 8 euros de plus pour avoir un billet papier. » « La ligne billet électronique sera éligible, dès l'ouverture de la nouvelle aérogare, afin de se conformer aux exigences de l'IATA, et nos équipes se préparent et se forment déjà à cet effet », selon la chargée de presse d'Air France à Alger Wassila B. Le billet électronique devra être généralisé chez toutes les compagnies aériennes au plus tard le 31 décembre 2007. Chez Air France, le billet électronique, qui a été introduit progressivement depuis 1998, est désormais utilisé par près de 70% des passagers de la compagnie sur le réseau France. Au cours des six derniers mois, les ventes sur le site Air France.fr ont connu une croissance supérieure à 110% pour représenter près de 9% du chiffre d'affaires réalisé en France, selon les chiffres de la compagnie. La possibilité de s'enregistrer et d'obtenir sa carte d'embarquement sur Internet est déployée depuis le 1er décembre 2005 sur l'ensemble du réseau domestique et sur une grande partie du réseau international. Le long-courrier : source de profits pour la compagnie En Algérie, Air France compte beaucoup sur l'ouverture de l'économie algérienne pour faire des profits sur les longs courriers. Désormais, les Amériques, l'Asie et bien d'autres contrées lointaines fréquentent régulièrement la destination Algérie. Le long courrier reste la source de profits des compagnies européennes et qui n'est pas à l'abri d'une concurrence accrue, notamment des low-cost et par la montée des compagnies du Moyen-Orient. Air France ne désespère pas de puiser dans la clientèle du secteur pétrolier en Algérie, en mettant en avant l'un des programmes de fidélisation d'Air France et de KLM, à savoir le Petroleum Club. Ce dernier est un produit de fidélisation qui répond aux besoins spécifiques d'un segment de clientèle particulier : les professionnels du gaz et du pétrole. L'objectif d'Air France et de KLM est de se positionner comme transporteurs privilégiés de cette clientèle qui représente un enjeu économique important (fréquence des voyages et recette élevées). Selon le directeur commercial d'Air France à Alger : « le Petroleum Club apparaît aujourd'hui comme un véritable levier de fidélisation auprès des sociétés pétrolières, parapétrolières et gazières. Il compte aujourd'hui plus de 20 000 adhérents. » Air France-KLM : un groupe qui prend de l'envol Depuis le rachat par Air France de KLM, le groupe semble bien prendre son envol. Pour l'année 2004-2005, la compagnie a fait 534 millions de résultats d'exploitation. Finies les années noires des compagnies aériennes qui ont enregistré 42 milliards de dollars de pertes depuis 2001. Le secteur pourrait afficher un profit de 7 milliard de $ en 2007, malgré un pétrole cher, selon les prévisions de l'Association internationale du transport aérien (IATA ), le trafic mondial devrait progresser de 5% à 6% en 2006, après les fortes hausses de 7,6% en 2005 et de 15,6% en 2004, selon la même source. La flotte en exploitation d'Air France compte 249 avions au 31 mars 2005, ainsi que 121 appareils exploités par ses filiales régionales (Brit Air, City Jet, Régional). Dans un monde où la concurrence fait rage, la compagnie opte pour une politique de marketing agressive. Des enquêtes de clientèle sont menées régulièrement par Air France, afin de connaître avec précision les « profils » des différentes catégories de passagers que la compagnie accueille sur ses lignes, selon l'un des responsables de la compagnie. Les résultats de ces enquêtes permettent à Air France de valider ses choix en matière commerciale et stratégique, dit-il. Les caractéristiques socioéconomiques des quelque 24 000 clients, qui transitent chaque jour par le hub d'Air France à Roissy-CDG2, mettent en évidence le grand nombre de clients européens et internationaux de la compagnie. Selon les lieux de résidence, l'enquête donne 24% pour la France ; 7% Asie ; 24% Amériques ; 5% Afrique-Moyen-Orient et 40% Europe. Par contre, la sécurité semble poser quelques soucis à la compagnie. En effet, les mesures de sécurité désormais draconiennes au hub de Roissy CDG, notamment lors du passage dans la zone sous-douane dû au plan Vigipirate en vigueur en France, indisposent les clients. Désormais, il est recommandé de voyager léger, par exemple de porter des bottes que d'avoir trop de bagages dira M.Fisher. Alors que pour Luce Marc, la chargée du département presse du hub, « en tant que compagnie, on ne fait que subir ces mesures de sécurité. La sécurité c'est contraignant et ça nous coûte plus cher », dit-elle. Mais c'est utile tout de même, ajoutera-t-elle.