Le directeur commercial d'Algerian Cement Company, filiale du groupe Orascom, Hussein Mansi, a bien voulu répondre aux questions relatives à la cimenterie de M'sila. La réalisation d'une usine de ciment à M'sila par Algerian Cement Company du groupe Orascom est un bel exemple de réussite d'un investissement direct étranger en Algérie. Pourquoi avez-vous choisi d'investir en Algérie où la présence de 11 cimenteries constituait pourtant une sérieuse concurrence ? Le marché algérien a beaucoup de potentiel du fait qu'il y a d'importants programmes de développement qui requièrent des quantités de ciments de plus en plus grandes. Le déficit en ciments est tel que l'Algérie est obligée d'en importer pour satisfaire la demande. A titre d'exemple, l'importation de ciment durant l'année 2003 a été de 2,3 millions de tonnes. Environ 100 millions de dollars sont consacrés, chaque année, à ces importations. C'est dire l'importance du manque à gagner de la production intérieure par rapport aux besoins du pays. L'entrée en production de la cimenterie de 2 millions de tonnes que nous avons construite à M'sila a beaucoup contribué à l'amélioration du marché algérien du ciment. L'augmentation substantielle de l'offre que l'on doit en grande partie à notre usine et l'amélioration des performances productives de certaines cimenteries algériennes a, comme vous avez dû le constater, stabilisé le marché national du ciment en rendant le produit plus disponible. Le jeu de la concurrence a quelque-fois même engendré des baisses de prix comme vous avez certainement dû le lire dans les journaux. C'est un événement très important dans la vie de l'industrie algérienne du ciment qui a toujours été caractérisée par ses fréquentes pénuries et l'instabilité des prix. La disponibilité et la stabilité des prix de ce matériau stratégique auxquelles nous sommes parvenus sont des éléments fondamentaux pour les entreprises qui peuvent ainsi mieux évaluer les coûts de la construction. Quelle place occupe Orascom dans l'industrie mondiale du ciment ? Nous sommes propriétaire d'une des plus importantes usines de ciment au monde qui est implantée à Suez, en Egypte. Notre souhait est de figurer parmi les 4 ou 5 plus gros producteurs mondiaux dans les 5 années à venir, et l'usine que nous venons de réaliser en Algérie constitue un grand pas dans la réalisation de cet objectif. Vous êtes en Algérie depuis bientôt 4 ans, qu'estimez-vous avoir apporté de positif à l'industrie algérienne du ciment ? D'abord et avant tout, la concurrence très utile pour les consommateurs mais aussi pour nos concurrents qui ont été contraints d'améliorer leurs performances productives et la qualité du ciment. Pour votre information, les cimenteries algériennes ont réussi à produire 800 000 t de ciment supplémentaires, ce qui représente environ 20% de la production nationale. La concurrence y est pour beaucoup. Pour ce qui concerne notre société ACC, sa politique commerciale consiste à placer les clients au centre de ses préoccupations en restant constamment à leur écoute pour adapter chaque fois mieux nos produits à leurs besoins. C'est d'ailleurs le but du séminaire sur les technologies du béton auquel vous assistez. En réunissant les principaux acteurs de la construction (ingénieurs, chefs d'entreprises, négociants en ciments, etc.), nous visons à affiner les spécificités et les besoins précis en ciments tels que formulés par ceux qui ont la charge de construire et de produire des bétons de qualité. Les aspects positifs que nous avons apportés à l'Algérie sont également perceptibles sur le plan social. Nous avons apporté à la ville de M'sila 800 emplois directs et plus de 3000 indirects. En y louant plus de 200 appartements, nous avons fortement stimulé le marché local de l'immobilier. Selon les estimations le salaire mensuel moyen des travailleurs est passé de 5000 à 15 000 DA en l'espace de deux années, ce qui n'est pas rien. Votre premier investissement en Algérie dans l'industrie du ciment ayant été un succès, je suppose que vous n'allez pas vous arrêter en si bon chemin ? Effectivement. Une seconde chaîne de production de 2 millions de tonnes portera, dès mai prochain, la capacité globale de l'usine de M'sila à 4 millions de tonnes par an. Cette seconde chaîne, dont la réalisation est bien avancée coûtera 450 millions de dollars que nous avons pû mobiliser grâce à un consortium de banques parmi lesquelles on peut citer la Banque européenne, la Banque mondiale et la CNEP. Grâce à l'offre supplémentaire qu'elle dégagera, l'Algérie n'aura pratiquement plus besoin d'importer les ciments ordinaires. On pourrait même déjà penser à en exporter et les opportunités en la matière ne manquent pas, notamment vers les pays riverains de la Méditerranée et ceux de l'Afrique que nous avons d'ailleurs commencé à prospecter. Nous sommes également sur un projet de production de ciment résistant aux sulfates (CRS) qui sera opérationnel dès janvier prochain. Il couvrira 50 % des besoins du pays en ciments spéciaux aujourd'hui importés pratiquement en totalité. J'évoquerais aussi le projet de construction dans l'ouest du pays d'une usine de ciment blanc d'une capacité de 400 000 t par an. Nous n'attendons plus que l'accord des autorités algériennes pour démarrer les travaux. On avait espéré un temps que vous vous mettriez en partenariat avec une de nos entreprises publiques de ciment mais cela n'a pas été le cas... Nous appréhendons les problèmes technologiques et de management inhérents à ces usines dont les équipements datent de plusieurs années, alors que les technologies de production ont beaucoup évolué. Nous ne nous prononcerons toutefois sur la question que lorsque nous prendrons connaissance des détails du programme des privatisations arrêté par le gouvernement algérien.