Le 19e Festival international du cinéma méditerranéen de Tétouan (FICMT), au Maroc, se déroulera du 23 au 30 mars 2013. L'Algérie sera célébrée cette année avec la projection de plusieurs films et l'organisation d'un débat. -Qu'est-ce qui va marquer la prochaine édition du Festival international du cinéma méditerranéen de Tétouan ? Chaque année, nous tenons à organiser une édition différente du Festival. Pour 2013, nous allons insister sur l'aspect culturel. A cet effet, des tables rondes seront programmées. Nous allons ainsi évoquer le thème des Morisques et le cinéma. Malgré sa profondeur, l'histoire des Morisques (musulmans d'Espagne convertis de force au christianisme vers 1501 dont certains avaient trouvé refuge au Maghreb, ndlr) n'est pas prise en charge. Peu de recherches sont faites sur cette période qui concerne les Maghrébins. Aujourd'hui, il y a de l'intérêt, d'où le choix du thème. Une dizaine de films sont sortis en Espagne, au Portugal, au Maroc, dans les pays du Golfe… Nous allons également aborder le thème du roman et le cinéma. Dans le Monde arabe, les cinéastes et les hommes de lettres sont éloignés les uns des autres. Peu de romans sont adaptés à l'écran. Rien n'empêche un cinéaste marocain d'adapter un roman algérien ou un cinéaste algérien de le faire pour un roman marocain. Nous allons donc ouvrir le débat à Tétouan. Nous allons organiser également un colloque sur la coproduction cinématographique en Méditerranée. Une carte blanche pour le cinéma portugais est également prévue. -Et l'Algérie sera à l'honneur lors de la 19e édition du Festival… Nous allons célébrer les 50 ans du cinéma algérien avec la projection d'une quinzaine de films. Une table ronde est au programme. Avec l'aide des critiques et universitaires, Ahmed Bedjaoui et Mohamed Bensalah, nous allons publier un livre sur le 7e art algérien. Nous sommes toujours en négociation avec les distributeurs et les producteurs pour la programmation du dernier film de Merzak Allouache, Le repenti, et celui de Djamila Sahraoui, Yema.Ces films seront inscrits en compétition officielle. Pour le Maroc, nous avons sélectionné deux films : Zéro, de Noureddine Lakhmari et Les chevaux de Dieu, de Nabil Ayouche. Pour la Tunisie, nous avons opté pour Manmoutesh (Beautés cachées ), de Nouri Bouzid. -Comment se porte le cinéma marocain actuellement ? Sur le plan production, le cinéma marocain se porte assez bien. Nous produisons annuellement une vingtaine de longs métrages. Ce qui est nouveau, c'est que l'Etat a élaboré un cahier des charges pour la production, la distribution et l'organisation des festivals de cinéma. Ces cahiers des charges, qui seront mis en application à partir de 2013, permettront d'encadrer et de réglementer les activités liées au 7e art. A mon avis, cela va permettre au cinéma marocain de mieux se développer. Il faut dire que sans la contribution de l'Etat, la production de films ne peut pas s'améliorer. L'Etat a engagé un gros budget pour aider les cinéastes à produire des films. Des multiplex seront ouverts et l'Etat va soutenir à 100% l'équipement de dix salles en matériel de projection numérique (DCP). C'est un pas important pour le 7e art. -Comment évolue, selon vous, le cinéma au Maghreb d'une manière générale ? Les conditions de production de films en Tunisie, en Libye et en Mauritanie sont encore difficiles. Il n'y a qu'en Algérie et au Maroc, où l'on constate un certain dynamisme. L'Algérie a été à l'avant-garde dans la coproduction cinématographique. Elle a, par exemple, coproduit pour des cinéastes de génie, tels que Youssef Chahine, Tewfik Salah, Salah Abou Seif… L'Algérie peut renouveler cette expérience. Autant pour le Maroc qui a coproduit des films africains. Il faut trouver une certaine complémentarité, créer des fonds de soutien maghrébins. -Quels sont les thèmes dominants dans le cinéma marocain actuellement ? Ces derniers temps, les cinéastes reviennent sur le terrorisme, le fondamentalisme et le sexe. Des thèmes qui se sont imposés par la force des choses et qui sont également présents en Algérie et en Tunisie à travers les films de Rachid Benhadj, Les parfums d'Alger et de Nouri Bouzid, Beautés cachées. Le thème Les chevaux de Dieu, de Nabil Ayouch est lié au terrorisme aussi. Les cinéastes et les intellectuels du Maghreb et tout le monde arabe ont une certaine crainte par rapport à l'extrémisme religieux. Il y a actuellement des situations qui suscitent des appréhensions et des inquiétudes après les changements en Tunisie, en Libye et en Egypte. La stabilité est importante pour nos pays. Les changements doivent se faire à l'intérieur des pays. C'est le rôle des intellectuels. A mon avis, les dernières révoltes populaires dans le Monde arabe n'ont pas donné plus de liberté aux cinéastes. Les résultats de ces révoltes ne sont pas encore visibles. Pour la Syrie, les horizons paraissent obscurs.