Cette école n'est pas dotée de cantine et encore moins de chauffage. Les élèves de cette structure sont issus de familles démunies et victimes de terrorisme. Le ras-le-bol et l'exaspération ont atteint leur paroxysme dans un CEM à Maramane, commune de Blida. Cet établissement du savoir s'est transformé en un lieu de dévergondage, de désordre et de laisser-aller flagrant. Un rapport accablant a été envoyé à plusieurs organes de presse, à la wilaya de Blida, ainsi qu'au ministère de l'Education, décrivant le chaos qui règne au sein de l'établissement Amara Rabah, qui se trouve juste à cinq kilomètres du centre de Blida. «Un CEM dont l'état équivaut plus à une écurie d'élevage de bestioles qu'à un lieu où l'on est censé accueillir des personnes humaines pour leur inculquer le savoir et les bonnes mœurs», note-t-on sur le rapport qui nous est parvenu. Le rapport porte un doigt accusateur sur la tutelle qui fait dans le deux poids, deux mesures. Ce manque de responsabilité flagrant des autorités concernées à l'égard d'un établissement d'enseignement moyen, perdu dans un village enfoui dans les vergers de la Mitidja, est dû, note la requête, au fait que les élèves scolarisés dans cet établissement de tous les scandales sont issus de familles démunies, illettrées, victimes du terrorisme ou de parents divorcés. La plupart des enfants sont orphelins, maltraités par leurs parents et leurs professeurs, abusés sexuellement ainsi que verbalement, des enfants battus. Depuis 2005, l'établissement manque de presque tout : pas de clôture, pas de cantine, encore moins d'un chauffage central, de tables et chaises, etc. Cela fait belle lurette que les toilettes des garçons sont condamnées, alors que filles et garçons utilisent les mêmes toilettes, conséquence : les agressions sexuelles sont monnaie courante au niveau du CEM Amara Rabah. Les élèves les moins forts physiquement et qui sont les plus dociles, note le rapport, font le ménage, l'administration leur donne des outils et les oblige à tout nettoyer. Les sanitaires des enseignants et des élèves sont infects. Côté ressources humaines, il y a un manque criant de professeurs, de surveillants, d'agents de sécurité. «Malgré les articles sur les journaux dénonçant le chaos et un fax envoyé directement au bureau de la directrice de l'académie de Blida, personne n'a bougé le petit doigt, et ce, jusqu'à aujourd'hui», raconte un enseignant désespéré, qui a vivement requis l'anonymat en raison de l'esprit de représailles qui règne dans cet établissement et même dans la commune de Maramane, très réputée pour être un repaire de repris de justice et de dealers les plus dangereux de la wilaya de Blida. La chronique des faits divers, dans cet établissement, est nourrie au quotidien par la violence des élèves, bien épaulés à l'extérieur par des malfrats, contre principalement des enseignantes, dont bon nombre ont été giflées, tabassées sans oublier que même la gent masculine a aussi son lot d'insultes et parfois de coups, comme le note le rapport. «Le directeur de l'établissement, qui arrive souvent bien après 10h et repart toujours avant 15h, a toujours fermé les yeux sur les infractions les plus dangereuses à l'intérieur même de l'enceinte du CEM, même quand il s'agit d'agressions sur des enseignants de la part d'individus externes à l'établissement ou de vols de biens ou casse de voitures», mentionne la requête. Des enseignants au double emploi et «dragueurs» ! Un autre fait qui distingue le CEM Amara Rabah et explique ainsi la médiocrité des résultats enregistrés chaque année, est celui du double emploi où, selon le contenu de la requête, les enseignants excellent dans la multidisciplinarité monde. Ainsi, cette structure scolaire a des enseignants qui arrivent soit très en retard, puis partent très tôt ou ne se présentent que très rarement, perturbant ainsi fatalement le volume horaire annuel réglementaire imparti pour chaque matière par le ministère. Le rapport parle aussi d'enseignants boulangers soucieux de la livraison de leurs marchandises : pains, biscuits, gâteaux, etc. Et puisque c'est dans l'air du temps, on trouve aussi des enseignants affairistes dans des créneaux juteux, comme l'achat et la revente de voitures, ou encore des enseignants entrepreneurs qui sèchent les cours pour aller superviser les travaux de leur chantier… et les exemples sont légion. Et, lit-on sur la requête, il y a ceux «qui passent de bons moments à draguer les filles (leurs élèves) et à les appeler au téléphone». Autre anomalie dans cet établissement de tous les maux, la secrétaire refuse de faire la saisie, donc de travailler, parce qu'elle a juré qu'elle ne se fatiguerait pas pour un directeur démissionnaire ni pour les professeurs et du coup, les élèves n'auront pas leur bulletin ce trimestre. Le double emploi, le vice et l'anarchie affectent énormément l'apprentissage pédagogique, et comme tout le monde n'en fait qu'à sa tête, bon nombre d'enseignants des matières techniques et scientifiques ont décidé de ne plus dispenser de TP (travaux pratiques) aux élèves. Si certains enseignants donnent le mauvais exemple, l'effet boule de neige a atteint certains surveillants qui n'assurent plus de permanence, donnent des billets d'entrée sans aucune justification et «renvoient souvent les élèves, au risque de faire de mauvaises rencontres, se faire agresser et violer dehors par les repris de justice qui rôdent souvent autour de l'école, sachant que juste à côté il y a un oued et une forêt très dense et de la broussaille», précise le rapport. Notre source note que très prochainement le ministère de l'Education va être non seulement destinataire d'un nouveau rapport sur la situation catastrophique de l'établissement, mais aussi d'une vidéo qui donnera, nous l'espérons, des sueurs froides dans le dos des responsables.