Le chef de la diplomatie russe a averti qu'il était «impossible» de persuader le président Bachar Al Assad de quitter le pouvoir. L'issue du tête-à-tête, hier, entre l'émissaire international pour la Syrie, Lakhdar Brahimi, et le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, n'a pas trop rassuré quant à la fin de la crise en Syrie. Les deux responsables s'accrochent à un mince espoir de «solution politique» dont les contours demeurent encore flous. Et pour cause, le chef de la diplomatie russe a averti qu'il était «impossible» de persuader le président Al Assad de quitter le pouvoir. Or, c'est précisément la condition sine qua non que pose l'Alliance nationale syrienne pour un début de «solution politique». Un dialogue de sourds dont il est difficile d'intercaler cet espoir (fou) de Brahimi et Lavrov de pouvoir parvenir à une solution politique. Les deux hommes étaient «unanimes pour dire que les chances d'atteindre une solution politique existaient toujours» pour mettre fin au conflit qui a fait 45 000 morts en 21 mois. Elles existent peut être, mais sont-elles tout de même exploitables ? Telle est la question qui coule de source de cet optimisme très mesuré de Brahimi et Lavrov qui partagent le souci d'éviter une intervention militaire ou même la poursuite du cycle infernal de la guerre civile. Mais l'entêtement de Bachar Al Assad à rester sur son trône malgré les appels du pied, y compris de ses amis russes, ne laisse entrevoir aucune possibilité de solution. «M. Assad a dit à maintes reprises, en public comme en privé, qu'il n'avait l'intention d'aller nulle part, qu'il resterait à son poste jusqu'au bout (...). Il n'est pas possible de changer cette position», a réaffirmé hier Serguei Lavrov. L'impossible compromis De fait, la mission de Lakhdar Brahimi s'annonce de plus en plus difficile, voire impossible face à cette de guerre de positions entre Al Assad qui tient à son fauteuil, quitte à marcher sur les cadavres, et les rebelles qui font de son départ un préalable non négociable. Pour autant, l'émissaire international pour la Syrie a réitéré, hier, son appel à «intensifier» les efforts pour arriver à une solution politique afin d'éviter «l'enfer». «S'il faut choisir entre l'enfer et une solution politique, nous devons tous travailler sans relâche en vue d'une solution politique», a-t-il déclaré après son entrevue avec Lavrov. Mais une fois n'est pas coutume, M. Brahimi a évoqué la Syrie d'après-Al Assad qui ne serait pas forcément stable : «Même un changement de régime en Syrie n'aboutirait pas obligatoirement à une régularisation du conflit», observant que «la Syrie risquait de devenir une deuxième Somalie.» La Russie, qui est la seule grande puissance à entretenir encore des relations étroites avec le régime syrien, tente tant bien que mal de sauver la tête d'Al Assad. Elle a bloqué jusqu'ici, avec la Chine, tous les projets de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies condamnant le président Al Assad et ouvrant la porte à des sanctions, voire au recours à la force. Désigné du doigt par la communauté internationale et évidemment par les rebelles syriens comme étant le parapluie protecteur du régime, Moscou peine à convaincre du contraire. Mais la Russie commence, par petites doses, à prendre ses distances avec Al Assad, en témoignent les déclarations récentes du président Vladimir Poutine, selon lesquelles la famille Al Assad était «au pouvoir depuis 40 ans» et que des changements étaient sans aucun doute «nécessaires». Une déclaration qui n'a pas changé l'appréciation que se fait la Coalition de l'opposition syrienne de la Russie, dont elle exige des «excuses» pour son soutien sans réserve au régime de Damas.