Le Parlement européen (PE), réuni hier à Strasbourg, a rejeté, à une large majorité, « la procédure d'urgence » pour la soumission de l'accord de pêche, conclu en juillet dernier entre la Communauté européenne et le Maroc, incluant les eaux territoriales du Sahara-Occidental. Selon un communiqué du Front Polisario et le site internet du PE : au total, 127 Eurodéputés ont voté contre, 2 se sont abstenus et 53 se sont prononcés pour la « procédure d'urgence ». Une procédure qui aurait permis, en cas d'adoption, de mettre l'accord de pêche avec le Maroc sur l'agenda du Conseil des ministres de l'Union européenne (UE) pour sa ratification. Lors des débats dans la Commission Pêche, plusieurs intervenants, notamment des groupes parlementaires du PPE (Parti populaire européen), les libéraux, les Verts et la Gauche unitaire ont mis en exergue « l'inopportunité » de cette procédure, eu égard aux « lacunes politiques et techniques » que présente cet accord. Ces groupes parlementaires ont appelé à ce que « le territoire non autonome du Sahara-Occidental soit explicitement exclu du champ d'application de l'accord » et pour qu'une « correction appropriée soit adoptée par la Commission (de l'UE) et son service juridique ». Les désaccords portent également sur d'autres aspects techniques tels la maintenance de la flotte et des problèmes de quotas. Dans un appel aux parlementaires, à la Commission et aux gouvernements européens, le président de la République sahraouie, Mohamed Abdelaziz, a rappelé « les implications juridiques » et leurs conséquences au regard de la légalité internationale et a demandé à ce que la limite du champ d'application de l'accord ne doit pas dépasser le parallèle 27°40'. Dans une réaction à ce report, l'Eurodéputée Mme Karin Scheele a exprimé sa satisfaction qu'une majorité soit opposée à cette « procédure d'urgence ». Elle a souligné « la nécessité de discuter profondément cet accord d'autant plus que plusieurs députés souhaitent en exclure les eaux territoriales de la dernière colonie d'Afrique ». Des pays membres de l'UE, à leur tête la Suède, ont déjà appelé à ce que l'accord signé avec le Maroc tienne compte du respect des droits du peuple sahraoui. Le 12 mars dernier, le constitutionnaliste espagnol, Carlos Ruiz Miguel, avait estimé que « le Maroc ne peut, en aucun cas, négocier sur les eaux (territoriales) du Sahara-Occidental, en ce sens que sa présence dans ce territoire est dépourvue de toute légitimité juridique ». « L'UE n'a pas non plus la capacité de le faire en vertu de ses traités constitutifs (...) qui l'obligent à ne pas faire abstraction du statut juridique que les Nations unies attribuent au Sahara », avait-il ajouté. Une coalition d'activistes de 19 pays européens avait lancé, le 14 février dernier, une campagne internationale intitulée « Pêchez ailleurs ! », afin d'empêcher l'UE de ratifier l'accord, estimant qu'en son état actuel, il « viole le droit international », car englobant les eaux de la « dernière colonie en Afrique », le Sahara-Occidental. Les Etats-Unis, qui ont signé en juin 2004 un accord instituant une zone de libre-échange avec le Maroc, avaient précisé un mois plus tard qu'il excluait le territoire sahraoui dans cet accord. Le Sahara-Occidental est considéré depuis 1966 par les Nations unies comme « territoire non autonome », dont le statut définitif reste à définir via un référendum d'autodétermination.