Malgré leur discours rassurant, les nouvelles autorités libyennes sont encore loin d'avoir réussi le pari de réinstaurer la sécurité. Preuve en est : le président de l'Assemblée nationale libyen, Mohamed Megaryef, a été la cible, jeudi, d'un attentat à Sebha, une oasis du sud du pays. «L'hôtel où il logeait a été attaqué pendant trois heures. Il y avait des tirs de snipers. Il semblerait qu'il s'agissait d'une tentative d'assassinat», a déclaré à la presse le porte-parole du chef de l'Assemblée, Rassmi Beruwien. «Trois membres de la sécurité militaire ont été blessés, malheureusement personne n'a été arrêté. L'attaque a été perpétrée contre l'endroit où réside le président, ce qui constitue une tentative d'assassinat», a-t-il ajouté. Mohamed Megaryef, qui n'a pas été blessé dans l'attaque, a d'ailleurs tenu à revenir sur l'«incident» dans un discours télévisé. Ce n'est pas tout. Un chef d'un groupe salafiste libyen, Salem Abou Khattala, a affirmé hier avoir été aussi la cible d'une tentative d'assassinat la veille à Benghazi, ville de l'extrême Est libyen. Présenté comme l'un des dirigeants du groupe Ansar Al Charia, Salem Abou Khattala a déclaré qu'un homme a été tué et un autre blessé alors qu'ils plaçaient une bombe sur la voiture de son frère avec l'objectif de le tuer. Le dirigeant islamiste a affirmé en outre que les assaillants étaient de la famille d'un officier tué avec le chef d'état-major rebelle, Abdelfatah Younès, dans des conditions mystérieuses en juillet 2011 à Benghazi. Un responsable de la sécurité de la deuxième ville de Libye a confirmé la tentative d'assassinat contre Salem Abou Khattala et la mort d'un assaillant. L'explosion a détruit deux véhicules, dont une camionnette qui aurait été utilisée par les assaillants. Abou Khattala a, rappelle-t-on, été accusé dans l'affaire de l'assassinat de Abdelfatah Younès, tué avec deux de ses compagnons. Younès avait participé au coup d'Etat ayant permis à Mouammar El Gueddafi d'accéder au pouvoir en 1969 et avait été son ministre de l'Intérieur avant de joindre la rébellion. Benghazi a connu également, ces dernières semaines, une série d'attaques meurtrières contre des postes de police et des assassinats visant les officiers de l'armée. Vendredi dernier, un ancien responsable de la sécurité du temps de l'ancien régime libyen, Nasser Al Magrabi, a été retrouvé mort dans sa ferme de la zone de Sidi Ferdj. Il a été tué d'une balle. Al Magrabi avait travaillé pour les services de sécurité intérieure à l'époque de l'ancien régime. Son meurtre est survenu après le rapt, mercredi dernier, par des hommes armés du chef par intérim du département des enquêtes criminelles de Benghazi, Abdelsalam Al Mahdawi. Tous ces incidents confirment si besoin est la fragilité de la situation politico-sécuritaire en Libye tout autant qu'ils renseignent sur l'importance des défis auxquels font face les nouvelles autorités pour asseoir la sécurité notamment à l'est et dans le sud du pays. Ces deux régions désertiques – où sévissent de nombreux trafics illégaux, notamment celui des armes issues des arsenaux du colonel El Gueddafi – sont minées par des conflits tribaux et des règlements de comptes d'une rare violence. Face à cette situation explosive, le nouveau gouvernement paraît aussi impuissant que désarmé.