Les anciens ministres limogés du gouvernement à l'issue du remaniement ministériel opéré le 24 mai 2012 ont été – à l'exception de Nacer Mehal et Noureddine Moussa – désignés par le président de la République au tiers présidentiel du Conseil de la nation. Six ministres dégommés par le Président pour incompétence ont été repêchés, par ses soins, pour siéger dans la «prestigieuse» Chambre haute du Parlement. Une Chambre qui, il faut le rappeler, n'a aucune prérogative ; elle n'a ni le pouvoir de proposer des projets de loi ni le droit d'amender un texte de loi… La désignation au Conseil de la nation de ministres, dont certains sont «honnis» et «vomis» par la population, ne répond donc à aucune logique politique, mais plutôt à celle du clanisme. D'aucuns estiment que face à la pression de la rue, le président Bouteflika était, de toute évidence, obligé de mettre en «veilleuse» son clan, et à sa tête Djamel Ould Abbès. Tout n'est que question de calcul. Les ministres exclus ont été mis en réserve et rappelés une nouvelle fois au service de «la République». Hier, Bouteflika a tiré du tiroir les noms des ministres ayant porté haut et fort son programme. Ils feront, encore une fois, parler d'eux puisqu'ils occuperont pour une période de six ans des postes aussi importants que celui de ministre, que ce soit du point de vue rémunération ou avantages. La démarche du Président s'apparente à une insulte à la face d'une population qui a décrié et dénoncé le rendement et surtout la longévité de ses ministres. S'il s'était en effet avéré une quelconque compétence de ces ministres, pourquoi Bouteflika les aurait-il chassés du gouvernement ? Pourquoi recourir à ces liftings gouvernementaux si c'est pour que ceux qui sont remerciés par la porte reviennent par la fenêtre ? Djamel Ould Abbès, du haut de ses 75 ans, ministre «indésirable», l'homme le plus contesté par les professionnels de la santé et qui a géré de manière catastrophique le secteur de la Solidarité, a été repêché par son ami Bouteflika pour siéger au Sénat. Quel sera son rôle ? Va-t-il contribuer à la réussite des réformes engagées par le Président, lui qui n'a pas su mener à bien ne serait-ce qu'un seul chantier ? Saïd Barkat, un autre ministre décrié qui a eu à gérer de façon hasardeuse deux départements ministériels, et ce, durant plusieurs années, a fini par montrer ses limites. A la tête du ministère de l'Agriculture puis de celui de la Solidarité, Barkat n'a réalisé aucun exploit et n'a mené à terme aucune réforme. Il est toutefois récompensé par Bouteflika en devenant sénateur. D'autres ex-ministres comptant de maigres réalisations dans différents secteurs sont désignés aujourd'hui au poste de sénateur : El Hadi Khaldi, Hachemi Djiar, Boubakeur Benbouzid et Saâdia Nouara Djaâfar. Bouteflika a également désigné son interprète personnelle, Hafida Benchehida, et la présidente de l'association Iqraa, Aïcha Barki, comme sénateurs du tiers présidentiel aux côtés de Zohra Drif-Bitat, Leïla Ettayeb et Fouzia Ben Badis. L'actuel président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, semble tout indiqué pour avoir un autre mandat de président du Sénat puisqu'il a été reconduit comme sénateur. Sa reconduction est un signe de Bouteflika pour le désigner comme deuxième homme de la République. Salah Goudjil, l'ennemi juré de Abdelaziz Belkhadem et figure de proue du mouvement des redresseurs du FLN, est également au nombre des personnalités nommées par Bouteflika. Ce dernier a reconduit d'autres membres du tiers présidentiel, notamment les anciens moudjahidine, à l'instar de Ali Mahsas et Yacef Saadi, et a écarté Mostefa Boudina et Abdelkader Reguig ainsi que Zahia Benarous. L'installation des nouveaux sénateurs devrait avoir lieu le 9 janvier. Une séance plénière consacrée à la validation de la qualité de membre et l'élection du président du Conseil est prévue suite au renouvellement partiel de ses membres.