Dans le cadre de la célébration du cinquantième anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, la cité des mémoires étudiantes de Paris, en collaboration avec l'université Paris 8 - Vincennes Saint-Denis et le Groupe d'études et de recherche sur les mouvements étudiants (Germe), organise, entre le 21 et le 31 janvier 2013, une exposition intitulée «Mouvements étudiants et guerre d'Algérie». Cette manifestation, accueillie par La Coupole de Paris VIII, voudrait mettre en exergue, selon ses organisateurs, «le double impact entre jeunesses, mouvements étudiants et guerre d'Algérie». L'inauguration officielle de cette exposition enrichissante, le 24 janvier dernier, a été marquée par une journée d'études. De nombreux spécialistes en histoire et des mouvements étudiants, français et algériens, ont présenté des communications sur le sujet. Le professeur Aïssa Kadri, de Paris VIII, un des organisateurs de la manifestation, a abordé dans son intervention le caractère colonial de l'université d'Alger et puis «les résistances à l'intérieur de cette institution contre cette situation. Les résistances ont été surtout étudiantes, notamment à partir de 1955 avec la création de l'Union générale des étudiants musulmans algériens - Ugema». En plus de l'Ugema, créée, selon lui, pour répondre aux exactions commises par les étudiants français ultras contre leurs camarades algériens, M. Kadri affirme que «le Ceald (Comité étudiant d'action laïque et démocratique), qui réunissait des étudiants libéraux, juifs, chrétiens et musulmans, a mené une lutte remarquable contre les ultras de l'Association générale des étudiants d'Alger (AGEA), dirigée par Lagaillarde». Pour rappel, l'AGEA sous la direction de Pierre Lagaillarde, qui va devenir plus tard cofondateur de l'Organisation de l'armée secrète (OAS), a été une section locale dissidente de l'UNEF (Union nationale des étudiants de France). Parmi les membres du Ceald, créé en 1959, on retrouve le grand sociologue algérien, Abdelmalek Sayad. La jeunesse française contre la guerre De son côté, Robi Morder, président du Germe, revient dans son exposé sur les relations étroites entre l'UNEF et l'Ugema. «L'UNEF, certes, en tant que syndicat étudiant n'a pas défendu ouvertement l'indépendance de l'Algérie, mais a soutenu les actions de l'Ugema», a-t-il indiqué. Et d'ajouter : «L'Ugema, par contre, voulait jouer un rôle important dans la défense de l'intérêt collectif du peuple algérien, en militant pour l'indépendance de l'Algérie sans ménagement.» L'Ugema, en effet, déclencha une grève illimitée à partir du 19 mai 1956. Cette action a eu comme conséquence immédiate le ralliement des maquis de l'ALN par des milliers d'étudiants et lycéens algériens. Quand Tramor Quemeneur, auteur et enseignant universitaire, spécialiste de la guerre d'Algérie, prend la parole, c'est pour dire que la jeunesse française en général et l'UNEF en particulier a lutté aussi, à sa manière, contre la présence coloniale française en Algérie. «Depuis le déclenchement de la guerre d'Algérie en novembre 1954 et jusqu'au cessez-le-feu en mars 1962, l'armée française a dû affronter près de 12 000 cas de refus de passer le service militaire en Algérie, entre désobéissance, objection de conscience et désertions», a-t-il précisé. Voulant donner des exemples concrets de l'engagement des jeunes Français contre la guerre d'Algérie, T. Quemeneur cite la messe en l'église Saint-Séverin du 29 septembre 1955, où des dizaines de jeunes militaires ont organisé une messe collective et distribué des tracts appelant à la paix et à l'arrêt de la guerre. Aussi, de fortes manifestations étudiantes contre la guerre d'Algérie ont été organisées par l'UNEF en 1960, d'après le conférencier. Ce dernier explique que d'autres jeunes Français ont carrément choisi le camp du FLN et la lutte pour l'indépendance de l'Algérie. C'est le cas du Réseau Jeanson (Francis) ou les porteurs de valises. Ce groupe a été un vrai soutien au FLN, en le dotant de fonds et de faux papiers. Ensuite, le Manifeste des 121 a été rendu public le 6 septembre 1960 comme signe de contestation contre le procès qui inculpa les membres du réseau Jeanson, démantelé au début de la même année. 121 intellectuels français, de gauche et d'extrême gauche, ont signé une déclaration où ils critiquent l'attitude de la France et la violence de son armée en Algérie, et soutenu le droit de «la population algérienne opprimée» d'accéder à son indépendance.