L'enquête déclenchée par les pouvoirs publics dans le secteur de l'agriculture à Aïn Defla concernant de multiples malversations a pris fin et la machine judiciaire déclenchée au niveau du parquet de Chlef a révélé à l'opinion publique une affaire aux relents de scandale, particulièrement après l'audition récente de plusieurs cadres de la DSA ainsi que des responsables dans d'autres secteurs. Alléchant à plus d'un titre, le secteur de l'agriculture à Aïn Defla place la wilaya en deuxième position en termes d'investissements après celui des travaux publics. En effet rappellera le nouveau directeur, l'agriculture emploie 60% de la population active sur une surface estimée à 35 000 ha, soit 70% de la superficie totale de la wilaya. Le responsable du secteur ne manquera pas de souligner l'envergure des programmes de développement eu égard aux montants importants accordés à la wilaya. Le directeur fera état de 8000 projets validés pour un investissement global de l'ordre de 12 milliards de dinars, au titre du plan quinquennal et 7 milliards de dinars pour les projets soutenus par l'Etat dans le cadre du Plan national de développement agricole et rural (PNDAR. Mission difficile pour la DSA Toujours selon notre interlocuteur, les investissements sont orientés notamment vers le développement de l'irrigation (67%), la réhabilitation des agrumes (10%), l'élevage (5%), l'intensification des grandes cultures (5%) et la valorisation agro-industrielle (4%). Appelé en renfort après le limogeage de l'ex-directeur des services agricoles (DSA) actuellement sous contrôle judiciaire, Achour Merazga a endossé, il y a à peine cinq mois, la cape de Superman pour tenter de voler au secours d'un secteur où un conseil de gérance, selon lui, a constitué un « petit lobby » monopolisant ainsi plusieurs secteurs d'activité. De ce fait, insistera le responsable du secteur, « la mission fondamentale à l'heure actuelle consiste à mener des opérations d'évaluation et de contrôle de tous les projets soutenus par l'Etat. A ce jour, 1500 exploitations agricoles sur 6000 ont été contrôlées », ajoutant que des cas suspects ont été détectés et seront bientôt soumis à l'instance judiciaire. Prenant le ton d'un guerrier, le DSA poursuivra : « Je vais faire la chasse aux tricheurs », faisant allusion à la gestion des coopératives agricoles (Cassap) sur lesquelles le « lobby » cité par le responsable du secteur a fait largement main basse. A ce propos, le DSA constatera amèrement : « Toutes les coopératives agricoles ont été déviées de leur vocation initiale. On commencera, par redresser la situation à ce niveau, en veillant scrupuleusement au suivi des projets et à leur exécution. » A ce propos, il révélera le retrait de plusieurs agréments et des liquidations, conformément à la loi en vigueur. De nouveau, il constatera amèrement : « Au lieu de me consacrer au développement, je traite un dossier normalement clôturé en 1996 ! » Mission ambitieuse ? Un chef de service de la DSA s'interroge : « A-t-on les moyens de sa politique ? » Quant au responsable du secteur, tout en reconnaissant qu'il a du pain sur la planche, il trouvera sa mission possible à accomplir en collaboration avec tous les partenaires. « Les financements existent, même si l'on déplore un déficit en moyens humains. » Poursuivant, notre interlocuteur fera remarquer que la wilaya de Aïn Defla compte quelque 25 000 agriculteurs et un ingénieur pour 400 exploitations ! Par ailleurs, le nouveau DSA reprochera à l'agriculteur d'être responsable des défaillances enregistrées, disant sur un ton menaçant que les agriculteurs qui abandonnent leurs projets seront renvoyés à leur misère, prenant à témoin une équipe d'experts en végétaux venue d'Alger. Mais pourquoi un agriculteur abandonne-t-il son projet en si bonne route ? La question avait déjà été soulevée lors de la dernière visite à Aïn Defla de Rachid Benaïssa, ministre délégué chargé du Développement rural. Ce dernier avait, en effet, appelé les responsables à impliquer davantage les fellahs dans les programmes de développement rural après avoir constaté que nombre d'animateurs agricoles (des fellahs) avaient brillé par leur méconnaissance des contenus des programmes de développement rural. Quant au DSA et après avoir passé en revue les principaux axes de développement de son secteur, il conclura ainsi : « Ensuite, nous pourrons prendre en charge l'agriculteur en tant qu'entité humaine. » Mais n'est-ce pas l'erreur des responsables de n'avoir pas tenu compte en premier lieu de la dimension humaine du fellah à Aïn Defla, sachant que celui-ci représente le facteur déterminant pour la réussite de tout programme de développement qui le concerne.