Sans l'usage de ses jambes, elle s'est relevée, au lendemain d'une chute cruelle, pour mener le combat de sa vie. Wahiba Laraba, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, a su relever le défi. Nous l'avons rencontrée à Sidi Abdelaziz, son village natal, dans sa voiture, spécialement aménagée pour personnes handicapées. Visiblement peu affectée par ce que le sort lui a fait subir, en dépit d'une certaine frustration que n'importe quelle autre personne dans son cas peut ressentir, elle évoque le combat qu'elle mène. Sans concession, elle s'en prend au regard pitoyable d'une société qui réduit la personne handicapée à un être inférieur, non sans dénoncer la marginalisation dont fait l'objet cette frange de la société. Plus encore, loin d'être résignée à mener une vie sur une chaise roulante depuis son accident, ce combat, elle le dédie à ces personnes. «Les handicapés n'ont pas besoin d'une simple chaise roulante, ils ont envie d'être considérés comme des êtres humains à part entière, rien de plus», lance-t-elle. Dans son inébranlable combat, elle milite pour changer cette dure réalité. A L'occasion de la journée mondiale de la femme et celle, nationale, des personnes handicapées, Wahiba dit vouloir s'adresser à toutes ces mentalités dures à accepter dans un contexte où on lui refuse même le droit de réintégrer son poste de travail. «Je leur ai demandé de me trouver un emploi qui convienne à ma situation dans le secteur de l'enseignement ou j'étais employée, mais jusqu'à ce jour on me fait courir», se désole-t-elle. C'est à l'automne de l'année 1996 que la vie de cette femme, si heureuse d'enseigner l'arabe dans un CEM dans la région de Sidi Abdelaziz, a basculé. «Je suis une femme rurale, c'est d'un olivier que j'ai fait une chute, c'est mon destin», confesse-t-elle. A partir de cette chute, un horizon, pas du tout clément, s'est ouvert devant elle. D'abord son pénible parcours a été entamé à partir d'un lit d'hôpital avant de se poursuivre sur un terrain plein d'embuches pour appeler à l'insertion des handicapés dans l'activité économique. Son hospitalisation au CHU Mustapha Pacha et dans des centres de rééducation, toujours, à Alger, l'a mise en contact avec des mouvements associatifs qui militent pour le droit des handicapés. «Ce n'est qu'après que je me suis fixée sur mon sort, que j'ai accepté mon statut et me suis imposée dans mon milieu naturel, à Sidi Abdelaziz, et à Jijel, et c'est ce qui m'a poussée à m'investir dans le travail associatif au profit des handicapés», relate-elle. La création d'une association dénommée «Défi et espoir de la femme rurale», est le premier acte du combat qu'elle a engagé contre ce coup du sort fatal. Pour elle, le plus difficile, ce n'est évidemment pas son handicap, mais la réalité qui entoure la vie des handicapés. A l'entendre parler, Wahiba a un désir ardent de réparer cette injustice, de bannir cet ostracisme.