Jeudi, le Tour d'Algérie est arrivé à Blida. Cette dixième étape a fait une halte à Chebli, une ville qui connaît bien le vélo et un certain Abdelkader Zaâf, le «casseur de baraque» des années 1950. A Chebli, ville-arrivée, c'est la fête ! Guirlandes, banderoles et drapeaux ont été sortis pour la circonstance. «Cela nous rappelle les années cinquante, nous répètent les vieux, le temps où l'on savait accueillir les cyclistes. Chebli était la capitale de la petite reine !». La liste des noms prestigieux des cyclistes qui ont marqué la région est longue. Les citer tous n'est pas chose aisée. Sur trois décennies (entre les années 1950 et 1970), presque chaque famille avait sa petite gloire. Le nom de Abdelkader Zaâf (1917-1986) émerge du lot, répété par tous les connaisseurs, même par un commentateur français venu couvrir l'événement. Il ressuscita, le temps de la course, cette légende du Tour de France des années cinquante, le «casseur de baraque». Cette remémoration fut rehaussée par la présence inespérée de l'un des derniers grands noms algériens des pistes cyclistes de cette glorieuse époque encore en vie, son ami et coéquipier, Ahmed Kebaïli, 88 ans, omniprésent sur le Tour de France de 1950 à 1954. Il fut par la suite directeur technique de l'équipe algérienne de cyclisme et driva l'autre non moins glorieux Zaâf Tahar (fils du premier) de 1944 à 2003. Tahar rafla toutes les distinctions dans cette discipline de 1960 à 1973. Une foule de plus de trois mille personnes avait occupé la placette de Chebli de 9h du matin jusqu'à 16h passées. Une foule constituée en grande partie de jeunes venus assister en direct à un événement qui fait partie de cette épopée glorieuse de leurs aînés et de moins jeunes, nostalgiques désireux de revivre un moment de leur passé et se rassurer sur l'avenir de ce sport, dans cette coquette commune de la Mitidja. Cette première étape du Tour de Blida a réuni une centaine de cyclistes venus de plusieurs pays étrangers. La population de Chebli a fait une gigantesque ovation, égale à son mérite, au Turc Mustapha Zaiar, vainqueur de cette étape, qui a raflé toutes les distinctions : le maillot orange (offert par Sonatrach), le maillot vert du meilleur sprinter (offert par Nedjma) et celui du meilleur grimpeur. Jamais dans sa carrière sportive ce jeune athlète n'a eu autant de distinctions à la fois, a assuré le commentateur français. Une journée, une étape et une ville qu'il ne va pas oublier de sitôt. Les spectateurs ont été à la hauteur de l'importance de l'événement. Ils ont accueilli ce jeune vainqueur de l'étape, ému par tant de chaleur humaine, comme on doit recevoir un héros. Qui a dit que les jeunes ne savaient pas se tenir dans les grandes occasions ? Ils ont donné à leurs détracteurs une bonne leçon de civisme et ont démontré que l'engouement des jeunes supporters n'est pas forcément agressif, comme ces actes de violence qu'ont vécus certains stades ces dernières années. Un grand bravo donc à la jeunesse de Chebli, qui semblait dire aux participants que la brutalité des stades qu'on veut coller à leur génération ne passera pas par leur commune.