Il paraît que les Japonais adorent danser le flamenco, pourtant, c'est très loin de leur culture. Comme les filles de Californie fanatiques du tatouage au henné... Aujourd'hui, il faut voir pour le croire, les Algéroises sortir les bras chargés d'achats des boutiques chinoises dont quelques-unes ont pris d'assaut la capitale. La dynamique ultrarapide de l'expansion commerciale chinoise, semblable à la vitesse de connexion par Internet, donne le vertige et suscite des jalousies. Ce qui se passe à Prato, petite ville industrielle de Toscane, provoque des réactions xénophobes en Italie. Au rythme des arrivées d'émigrés chinois dans la région, Prato se couvre de boutiques et d'ateliers de couture, de jardins à l'oriental, de tricycles et peut-être aussi de pousse-pousse... Une vraie petite succursale de Pékin. Les saveurs subtiles de la cuisine chinoise doivent aussi rendre jaloux les marchands de pasta. Prato est un exemple parmi d'autres de la « globalisation » à la chinoise. Partout où ils vont, les Chinois sont des travailleurs sans relâche. C'est un fait incontournable. An Ordinary Fact of Life, comme disent les Américains, eux-mêmes de fieffés protectionnistes. Ce n'est qu'un commencement. Partout où l'on va, les enseignes chinoises pullulent. Karl Marx et Fredrich Engels avaient déjà prévu tout ça : le commerce planétaire, la circulation de l'argent, le désir frénétique de chacun de nous d'acquérir les produits des contrées les plus lointaines. C'est pourquoi aujourd'hui, de Chine et d'ailleurs, les marchandises voyagent, les peuples s'expatrient, les idées et les cultures bougent comme au temps des Routes de la soie. Pour les Chinois, le monde extérieur est devenu comme un aimant, synonyme de business et de réussite. Le choix des Algéroises qui ont adopté le shopping chinois est avant tout économique. Les prix sont satisfaisants pour une marchandise de qualité standard et surtout à usage immédiatement pratique. Spectacle étonnant très algérois de cette marée d'acheteuses, sous le regard de jeunes Chinois nonchalants campés derrière leur caisse, qui se serrent dans la bonne humeur, dans un petit espace, et qui finissent par brandir leurs achats avec un large sourire, parce qu'on ne trouve ça nulle part ailleurs : broderie, soierie, nappes, pyjamas égayés de toutes les couleurs, chaussures d'enfants, etc. Si le « made in China » a le vent en poupe à travers le monde, la réciproque est peut-être aussi vraie. Il suffit de regarder la chaîne CCTV (187, Hotbird) basée à Shangai. Sous l'opulence des buildings de verre et d'acier prolifèrent des boutiques de style occidental. Et on voit de somptueux shopping. Centers à Shanghai dont les vitrines regorgent de vêtements haut de-gamme comme à Rome et à Paris. Sur CCTV, les présentateurs eux-mêmes ont l'allure de businessmen prospères en costumes stricts... Les étudiants en histoire ont toujours un programme prestigieux consacré aux fameuses Routes de la loie. Les grandes routes terrestres et maritimes qui ont servi pendant des siècles (1500 ans) au commerce entre l'Extrême-Orient et le reste du monde. Voies commerciales mais aussi d'échange d'idées et qui ont déjà suscité mille récits de voyages. La Chine était déjà l'un des pôles de cette Route de la soie. D'où vient sinon la soie des haïks algérois et tlemcéniens ? Dans la Rome antique, Sénèque disait aussi les bienfaits de la soie de Chine (pays lointain et pour lui « pays obscur ») : « Je vois des vêtements de soie, sur lesquels il n'y a rien qui puisse protéger les corps... Une fois qu'elle les a mis, une femme jurera qu'elle n'est pas nue, sans qu'on puisse la croire. »