Face aux ravages du cancer, la société s'organise pour mieux se défendre. A Constantine, l'association Waha vient de signer l'acte de naissance d'un projet de maison d'accueil destinée aux malades cancéreux et à leurs parents proches. Devant le déficit qu'accuse le Centre anticancer (CAC) de Constantine et l'impossible prise en charge des patients et de leurs parents accompagnateurs, cette infrastructure est un miracle qui, une fois mis sur pied, soulagera la population touchée. Il s'agit d'un élan de citoyenneté qui vient enrichir le réseau associatif algérien des maisons d'accueil de cancéreux, à l'image des initiatives portées par l'associations El Badr de Blida, El Amel et Nour Doha d'Alger, Ennour de Sétif et Chouaa El Amel de Djelfa. Les dirigeants de Waha n'ont pas perdu de temps pour passer à l'action. En mars 2012, à peine deux mois après la naissance de l'association, le wali a été saisi pour une demande de terrain pour la réalisation d'une maison du cancéreux. La demande est heureusement traitée avec célérité puisqu'en novembre, le wali signe une décision portant affectation d'un terrain de 6000 m² à Ali Mendjeli. «Nous n'avons trouvé aucune autre possibilité pour bénéficier d'un terrain d'une aussi importante superficie, sinon en nous inscrivant comme investisseur auprès du Calpiref», explique Ahmed Zemouli, secrétaire général de Waha et cheville ouvrière du projet. Cette option, hélas, a forcé l'association à acheter le terrain au prix du marché, soit 18 millions de dinars. Un prix exorbitant pour une entité à caractère non lucratif. «En soi, c'est une évolution vers le respect de la règlementation, c'est la raison pour laquelle cela ne nous gêne pas», explique le professeur Abdelhamid Aberkane, président de Waha, «mais le coût est très élevé, écrit-il dans le rapport moral, parce qu'il a été considéré comme un investissement économique ordinaire». L'association a commencé à payer grâce au don d'un opérateur économique local, selon l'échéancier imposé par la direction des domaines publics, mais un recours sera déposé dans les jours prochains dans l'espoir d'une décision du ministre des Finances de réduire le prix, en considération du cachet humanitaire du projet. En Algérie, les relais associatifs ne bénéficient d'aucun avantage dans leur action, qu'elle soit sociale ou culturelle. «Nous sommes très en retard quand il s'agit de donner des réponses aux sollicitations du mouvement associatif», regrette M. Aberkane. «Les lenteurs de l'administration dans le secteur de la santé ont permis cependant la découverte d'un potentiel extraordinaire chez les citoyens.» Dans chaque wilaya, on cherche des réponses spécifiques pour parer au drame causé par le cancer. L'exemple de Djelfa, où il n'existe pas de CAC, est sans doute édifiant. Les citoyens éreintés par l'effort de déplacement à Blida pour bénéficier de la thérapie ou accompagner un parent malade ont trouvé l'idée ingénieuse de construire une maison d'accueil pour eux-mêmes, sur le territoire de Blida. Le projet a souffert, certes, des tracasseries administratives, mais il a fini par voir le jour, forçant le respect et créant l'émulation ailleurs.Un autre défi est lancé par Waha : faire l'état des lieux du cancer dans la wilaya de Constantine. En 2010, presque 1400 nouveaux cas venant de 16 wilayas ont suivis des traitements en oncologie médicale au CAC de Constantine. Ces chiffres sont loin de la réalité, estime-t-on à Waha, car contrairement à Sétif et Oran, par exemple, Constantine ne dispose pas d'un registre du cancer. A cela s'ajoute l'abandon du traitement ambulatoire dû aux frais supplémentaires occasionnés par les déplacements temporaires et surtout le problème d'hébergement. Le cancer est une pathologie lourde et durable, qui souvent fait exploser la famille. 44 000 nouveaux cas sont enregistrés chaque année en Algérie et 25 000 Algériens en meurent annuellement.